Quand on s’intéresse aux westerns, il est difficile de passer outre la collaboration fructueuse entre le cinéaste Anthony Mann et l’acteur James Stewart, qui débuta avec un premier coup d’éclat : Winchester 73.


Le film s’ouvre sur un carton d’introduction parlant notamment de la célèbre Winchester 73 (qui donne son nom au film), une arme légendaire qui, toujours d’après le texte, conquit l’Ouest américain. Un compagnon de choix pour faire face à tous les dangers qui rôdent dans ces grands espaces encore sauvages et soumis aux lois de la nature. Anthony Mann choisit de faire commencer son film sans réelle introduction des personnages. Lin McAdam, tireur émérite, accompagné de High Spade, arrive à Dodge City, une ville où l’on bannit les armes, selon les ordres de Wyatt Earp, le sherif. Une exception sera faite, cependant, lorsqu’un concours de tir est organisé pour fêter le centenaire de l’indépendance, avec, à la clé, une Winchester 73 dite « une sur mille », qualifiée ainsi car d’une qualité exceptionnelle, et fabriquée en toutes petites quantités. Et cet objet de toutes les convoitises va connaître une histoire particulière et mouvementée.


Tout au long de l’intrigue, l’arme va passer de mains en mains, et se retrouver mêlée à diverses péripéties. Tout d’abord, pour le spectateur d’aujourd’hui, le choix d’une arme comme « protagoniste » du film, avec la politique de désarmement du shérif Earp, semble faire écho aux problématiques liées au permis de port d’armes, qui fait toujours débat aux Etats-Unis aujourd’hui. C’est, en quelque sorte, le symbole de la puissance, de la supériorité vis-à-vis des autres, notamment dans un pays où la société se construit encore, et où les lois sont loin d’avoir cours partout. Winchester 73 expose, comme beaucoup de westerns, un monde encore en transition, où la violence peut surgir à tout instant et, surtout, il explore tout une mythologie du far west à travers ses personnages et ses péripéties.


En effet, Winchester 73 semble opérer une sorte de prise de recul vis-à-vis du genre du western, pour se matérialiser sous la forme d’une sorte de conte de l’Ouest, convoquant toutes ses figures. On retrouve, déjà, le shérif Wyatt Earp, véritable personnalité historique marquante de l’époque, incarnée au cinéma à plusieurs reprises par de grands acteurs, comme Henry Fonda dans La Poursuite infernale et Burt Lancaster dans Règlement de comptes à OK Corral. Il y a le tireur énigmatique en la personne de Lin McAdam, les bandits notoires représentés par Dutch Henry Brown et Waco Johnny Dean, le chef de tribu Sioux et les attaques d’indiens, des soldats démobilisés suite à la guerre de Sécession… Tous se retrouvent liés par la Winchester 73, convoquant tous les personnages récurrents dans les films du genre. Presque comme un objet sacré, c’est elle qui provoque les destins et qui les scelle.


A hauteur d’hommes, la réalisation d’Anthony Mann ne manque pas de prendre de l’ampleur quand il faut, notamment lors des impressionnantes attaques d’indiens. Au cœur de ce tableau, James Stewart incarne à merveille un personnage torturé et ténébreux, chez qui on sent toujours une pointe de colère latente, qui n’attend que de s’exprimer. L’histoire devint une légende, la légende devint un mythe. Toute la mythologie du western se retrouve concentrée dans Winchester 73, véritable conte tout droit venu du far west, témoin de temps lointains.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29
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le 11 déc. 2020

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