Le silence invisible

Les films albanais sur nos écrans sont presque aussi rares qu'une médaille de l'équipe française de hockey sur gazon aux Jeux Olympiques. Une tasse de café et de nouvelles chaussures aux pieds : sous ce titre énigmatique, le deuxième long-métrage de Gentian Koçi s'inspire de l'histoire réelle de deux frères belges, sourds-muets depuis leur naissance. Adapté à l'Albanie, le film évolue dans un crescendo dramatique, à mesure que ces jumeaux monozygotes perdent la vue, conséquence d'une maladie dégénérative. Le silence entre eux va devenir invisible, en dépit du dévouement de la compagne de l'un des deux frères. Ce sujet très sombre est traité de manière sobre, sans verser dans le lacrymal, grâce à une mise en scène solide et à une interprétation sensible des frères Morais, acteurs portugais, qui ont, pour l'occasion, appris la langue des signes albanaise. Le film se concentre totalement sur le duo, parfois trio, le plus souvent entre les 4 murs de leur appartement de Tirana, dans leur atelier de menuiserie, ou plus épisodiquement à la campagne ou en bord de mer. Même s'il n'adopte pas un ton mélodramatique, la vision du film ne peut être difficilement décrite autrement que comme une expérience très éprouvante.