Attention aux spoilers, notamment dans le dernier paragraphe.
Peu de films ont su me choquer réellement. Peu de métrages se sont révélés être pour moi de pures claques dans la tronche. Jamais encore je n'avais été autant retourné par un simple film. A Serbian Film est un chef d'oeuvre en puissance, un électrochoc, un véritable coup de pied dans les parties qui ne laisse personne indemne, qui retourne les estomacs et laisse les spectateurs pantelants devant une telle débauche de violence et de scènes malsaines. Certains vont le comparer à Hostel ou aux Saw, mais il faut savoir que la pépite de Srdjan Spasojevic n'a pas grand chose à voir avec ces métrages. Avec un budget bien moins conséquent, Spasojevic propose une vision unique de la pornographie, des liens du sang et de la violence, bien loin des torture porns qui pullulent sur nos écrans depuis quelques années. Bien qu'il soit d'une noirceur et d'une brutalité jamais vues, le film ne se montre jamais gratuit et n'oublie pas de raconter une histoire. Incroyable, je sais, mais pourtant vrai. Le calvaire de Milos se suit avec un intérêt qui va croissant, un ascension qui se fait également dans la violence puisque le climax est un déchaînement de sauvagerie jamais atteint.
Les thèmes abordés rebuteront de prime abord les plus sensibles. Car se côtoient dans A Serbian Film pédophilie, inceste, nécrophilie, et viols des plus barbares. Une des pires scènes reste sans doute celle de l'accouchement suivi du viol infantile. Le scénario ne nous épargne rien, se montrant même assez malin sur la fin, les pièces du puzzle s'emboîtant parfaitement pour mieux nous choquer (l'identité du violeur). Tous les petits détails en début de métrage trouvent leur explication dans une scène de sexe traumatisante qui finit en un carnage sans nom (l'énucléation avec le pénis). Il ne faut toutefois pas s'arrêter à cela, puisque le film n'est pas qu'ultra-violence et sexe. Le couple de Milos et Marija apporte également une émotion poignante au récit, tout comme la relation que l'acteur entretient avec son fils, un jeune garçon en pleine découverte de son corps. Une attitude qui laisse l'ex-acteur pornographique perplexe, et qui donne de très belles séquences, comme celle du parc. Un amour qui va se trouver brisé à jamais par la décision de Milos, qui la prend pourtant pour aider sa famille et les mettre à l'abri du besoin, un comble.
Cet ironie se retrouve également dans l'épilogue, une dernière scène faisant preuve de la pire noirceur mais également d'une rare virtuosité, ce qui prouve que le réalisateur ne visait pas à filmer un simple étalage de chair complaisant, mais surtout à offrir un film d'une puissance évocatrice jamais atteinte. Explication. Juste avant un coup de feu libérateur, le couple disloqué forme un cocon protecteur autour de leur enfant traumatisé, trouvant également le courage de se regarder dans les yeux une dernière fois. Pourtant, ils savent que leur vie ne peut continuer. L'horreur qu'ils ont vécu, les actes horribles qu'ils ont commis les pèseront à jamais. Impossible de revivre ces instants au quotidien, de côtoyer celui qui a violé votre propre fils, ou celle qui a égorgé votre frère. Le pistolet retentit, mais on ne verra rien de la mort de nos héros, la caméra se trouvant hors de la chambre à ce moment précis. Les personnages ont donc enfin obtenu l'intimité et la paix qui leur ont été refusées tout au long du film. Et là, le réalisateur nous assène un ultime coup de burin en plein coeur.
Un dernier plan et une réplique finale qui laissent le spectateur sur le carreau, totalement désarçonné par ce qu'il vient de vivre. A Serbian Film est bien plus qu'un film violent. C'est une expérience à vivre au moins une fois si vous vous en sentez capable. Car le film risque d'en traumatiser plus d'un. Et il est tout à fait évident qu'il ne plaira pas à tout le monde. Certains crieront au scandale, d'autres feront tout pour enterrer un métrage qu'ils n'auront pas compris. Mais une chose est sûre : ils ne resteront pas indifférents. L'objectif du réalisateur sera donc atteint, et c'est tout ce qui compte.