Yipikahewagouwagoudateudateu !
Ok, le titre de ma critique n'est pas des plus évocateurs, c'est plutôt un bordel de références à vrai dire, et pas toutes cinématographiques. Détrompez-vous, ce qui se passe dans "Action Mutante", premier film d'Alex de la Iglesia, est bien pire. Ou bien mieux ? Allons partir à la découverte de la génèse de ce réalisateur espagnol, pour en comprendre tous les aspects et se familiariser avec un style cinématographique absolument grandiloquent.
Bon, tout d'abord, il convient de préciser que si vous voulez découvrir ce film, il va falloir quelque peu négliger tous les canons du cinéma habituels, car vous prendrez le film comme un des nanards des plus accomplis, alors qu'on peut sans doute le qualifier comme un chef d'oeuvre du cinéma de l'absurde. C'est un fait, le scénario ne justifie en rien le film, ne lui fait d'ailleurs aucune pub, c'est une histoire de gangsters et d’enlèvement emprunté de science fiction. Ce qui marque, c'est tout d'abord l'univers dans lequel nous sommes transportés : aucune référence à la Terre, chaque lieux visités ressemble à un dépotoir d’immondices et de personnages des moins affables. Cela est avant-tout dû à des costumes tout simplement géniaux, caricaturaux, dans la lignée de ceux du Cinquième Élément (alors que le film est sorti un an avant) mais en plus crades, dégoulinant d'horreur. Ajoutez à cela des personnages quasiment tous extrêmement laids, excepté la figure féminine, largement ridiculisée. Car le ridicule rend plus fort dans ce film. Les décors sont sombres, peu accueillants, et remplis d'objets inappropriés. Cela renforce le côté absurde du film des plus assumés, sans concession, la fin (si cela en est une) est dans cette lignée, du fait qu'Alex sait très bien la réaction que le spectateur va avoir devant son film. Plus astucieux, il en joue, laissant parfois les acteurs directement regarder la caméra comme pour nous parler et nous faire nous gratter la tête. Ainsi, nous ne savons jamais si l'on s'adresse à nous ou s'il s'agit d'un discours abracadabrant sur la vie en guise de message.
Transition parfaite pour s'attacher désormais au fond du film plutôt qu'à sa forme. Car tout le génie d'Alex de la Iglesia, c'est de renverser le côté absurde de son film et de ses personnages par un vrai dessein : ce sont des personnes qui essayent de s'intégrer au monde, un monde dont ils sont naturellement exclus de part leurs physiques non-voulus. Il s ne rentrent pas dans la logique d'une société qui privilégie l'esthétisme et l'apparence, à en devenir des plus ridicules (les costumes lors de la nuit de mariage ne sont le reflet que de personnes narcissiques essayant de se montrer par tous les moyens). Et c'est l'un de mes points préférés du film : ce contrebalancement du ridicule entre l'apparent et subjectif ridicule physique (les membres d'Action Mutante) et les autres, ridicules moralement et intellectuellement (le fiancé, le père de la mariée, tous les personnages du mariage), qui est selon moi un des maux contemporain ; cela montré par le biais des journalistes et par la tirade finale du père qui semble devenir fou. De ce point de vue, le personnage le plus censé du film semble être Ramon, qui provoque l'espoir d'une vie meilleure pour ses reclus de la société en leur faisant croire qu'ils sont des beautés de la nature, des "mutants" capable de tout, plutôt que des attardés, comme la présentation des personnages au début du film par le journaliste semblerait le laisser penser. C'est d'ailleurs en cela que j'explique le renversement de la situation de la mariée, quI s'attache à la sensualité invisible des membres d'Action Mutante.
Alors certes, ils ne sont pas très malins, mais d'un côté, comment pourraient-ils l'être ? Surtout que derrière le thème du film que je viens d'édicter, se cache une comédie des plus loufoques, qui m'a fait beaucoup rire par ses côtés tantôt badass (le grand sourd et muet est épique), tantôt excentriques, tantôt juste drôles, avec un net sentiment qu'une fois le film fini, il s'est passé 50 millions de choses, alors qu'il ne s'agit tout simplement qu'une histoire banale d'enlèvement. Cela est avant tout dû à l'étonnement du spectateur, toujours troublé par ce qui se passe à l'écran et à l'oeil toujours attiré vers quelque chose qui n'est pas à sa place ou vers une partie gore du film. En cela, le film n'est jamais long car également ponctué d'un rythme plutôt soutenu. Franchement je dis bravo.
L'illogisme du film propre à l'absurde devient ainsi logique par le fait que des opprimés ne possédant rien deviennent les maîtres du monde (Patricia représentant cette maîtrise du monde, rien qu'à voir la tête des personnages dans l'entrée du bar des mines (un truc dans le genre)). En tout cas, je souhaite dire bravo à Pedro Almodovar d'avoir su repérer un tel talent, alors certes peut-être me suis-je trop émerveillé devant ce film, mais il est d'une rareté tellement belle que ça aurait été dommage de s'en priver. Si les autres films de la filmographie de Alex de la Iglesia sont teinté d'un côté aussi délirant, je pense qu'ils n'atteindront un tel degré. Bravo monsieur de l'Eglise !
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