Il n’existe pas que Keoma comme western tardif de qualité en Italie. Ce California est aussi un titre très solide qui propose une relecture du thème éculé de la vengeance. Alors que les derniers westerns européens avaient la fâcheuse tendance à ressasser les mêmes thèmes sur un mode, en outre, plutôt parodique, Michele Lupo s’empare d’un sujet pas des plus drôles. Au retour de la guerre de Sécession, le nommé California, qui semble vouloir tourner le dos à une jeunesse tumultueuse, est pourchassé par la poisse. Après avoir sympathisé avec un jeune combattant rentrant lui aussi chez lui, il doit annoncer sa mort à sa famille survenue suite à un guet-apens. Bien accueilli, il tombe amoureux de la fille mais celle-ci est kidnappée par une bande de chasseurs de primes. Pour California, c’en est trop : il ressort les pistolets pour retrouver sa belle. Raconté ainsi, le récit est terriblement classique. Il cache cependant une véritable profondeur avec des personnages plus subtiles que la normale, en témoigne le rôle tout en retenu interprété par William Berger qu’on a connu bien plus fantasque.
L’ensemble marque par son atmosphère. Comme beaucoup de westerns italiens, l’histoire se déroule principalement dans la boue, le brouillard et le froid. Une atmosphère particulièrement envahissante même si résultat n’est pas d’une totale noirceur. Bien moins nihiliste que bon nombre de westerns plus anciens, California suit la trajectoire de son personnage principal faite de bonds en avant et de retours en arrière. On apprécie, autour de lui, des personnages plutôt travaillés et une bande de sales types qui font avancer de façon significative le récit. Porté par une musique très seventies (parfois en décalage) mais dont plusieurs thèmes se révèlent d’excellente facture, le film trouve le juste équilibre entre la violence attendue et un personnage principal tout en paradoxes. Dans le rôle de ce dernier, Giuliano Gemma est moins le héros bondissant qu’il fut dix ans plus tôt mais son jeu a très clairement gagné en profondeur, ce qui est un atout évident.
On ne renoue certes pas avec les grands westerns des années 1960 mais cette proposition retrouve un certain classicisme plutôt bienvenu. Si la réalisation manque, peut-être, d’éclairs esthétiques et si le scénario souffre, dans sa dernière ligne droite, de rebondissements tirés par les cheveux, le résultat est franchement très appréciable et s’inscrit donc dans les dernières réussites d’un genre moribond à sa sortie.
6,5