S'il y a bien quelque chose peu importe le domaine artistique (voir au-delà avec des marques, des idées politiques etc) qui fonctionne du tonnerre à l'époque des réseaux c'est la concurrence, le clash, les clans bref les batailles rangées entre deux entités, fédérant leur lot de fidèle qui tenteront vainement de prouver que l'autre camp a raison. Il n'a jamais été question de rallier des gens à sa cause, le débat est le plus souvent sourd, mais pour autant c'est un sport toujours pratiqué avec entrain. Qui arrivera à démolir l'autre ? Quelle sera la preuve irréfutable qui fera taire toute réponse ?


Donc oui All In écrase Wrestlemania. Et rien ne servira d'arguer ou de comparer point par point ni même de faire un récapitulatif de chaque combat. De toute façon ce n'était pas l'objet de ma première critique, encore moins de celle-là. J'aurais plus prendre n'importe quel autre show, j'ai voulu prendre un autre show et me suis ravisé en me disant qu'il serait intéressant de prendre le plus gros évènement de l'année, qui loin d'être parfait catalyse le plus ce que j'aime dans la discipline et pourquoi celle-ci offre désormais deux visages bien distincts, presque irréconciliables. Deux visions d'un sport et d'une Amérique partagée entre culte de la performance et profit à outrance.


Hola non je ne me permettrais pas de dire que l'All Elite Wrestling n'est pas dans la recherche du gain. C'est une entreprise capitaliste comme les autres, qui ne va pas vendre des billets à 10 dollars, qui payent en millions ses talents et qui même si hautement financée par son gourou Tony Khan, ne peut pas se permettre toute les folies. Alors ça donne un essai dans le milieu du jeu vidéo plein de promesses mais surtout rempli d'échecs. Ça donne aussi parfois des arènes pas très remplies, des catcheurs qui payent de leur propre poche pour s'autoriser The Final Countdown en musique d'entrée, et ça autorise même de temps en temps des sponsos, pas toute subtiles. Mais voilà, ici les tables sont encore vierges de toute marques, le show se regardent presque d'une traite avec juste un spot publicitaire et même dans le cas de l'entrée Assassin's Creed de Will Ospreay il faut rappeler que le bougre est fan de la licence au point de s'être tatouée le logo (alors oui il s'est aussi tatoué l'affluence du Wembley Stadium qui avait été trafiquée par la compagnie donc pas un génie). Ça fait bien les affaires d'Ubisoft pas dans la meilleure des formes et critiquée pour le dernier opus de sa saga jugé trop woke mais au moins on peut y voir un brin de cohésion (imaginons un CM Punk qui ferait une collab Pepsi.. ah ben non il s'en fout il préfère le sang de l'Arabie Saoudite).

All In est un spectacle éminemment américain, qui en fait trop, avec des feux d'artifices pétant toute les 5 minutes, un stade beaucoup trop grand pour qu'il y ai un intérêt pour les spectateurices du fond mais on ne ressent pas à chaque seconde le besoin de nous vendre une boisson énergisante, des barres ultra sucrées ou un pays problématique.


Mais puisqu'on évoque la folie des grandeurs on doit bien parler du plus gros problème à savoir la longueur. Ce sera assez ironique pour ma part puisque je suis du genre zappeur, que j'avance souvent les matchs à leur seconde moitié et que je fais souvent quelque chose d'autre en même temps mais 6h c'est long. Il n'y a bien que le jeu vidéo qui pourrait me faire perdre totalement la notion du temps et encore, cela arrive de moins en moBALATRO BALATRO BALATRO. Six heures donc, plus un pré show (alors que certains matchs de la carte principale semblaient aussi y avoir leur place) de deux heures parce qu'il faut bien caser tout le monde pour contenter les fans et les sportif.ves qu'on payent bien trop cher. Sur place j'imagine qu'avec une ambiance électrique on doit être très content d'en avoir pour son argent (surtout avec un début en après midi pour ne pas finir en pleine nuit) mais ça reste un investissement aussi physique que mental et se posera fatalement un jour la question de diviser l’évènement en deux nuits puisque la concurrence le fait déjà si bien. On imagine que la crainte de remplir un stade rien qu'une seule nuit ne motive pas à tenter le diable et il serait difficile de râler quand on a la chance d'avoir pu regarder tout cela en streaming, à l'heure souhaitée. Je ne m'empêcherais pourtant pas de dire que certaines entrées étaient trop longues, se rapprochant du format de la WWE, parfois exprès pour le troll parfois juste pour saucer les superstars. Est-ce que rien n'aurait plus être coupé ? Est-ce que tout les angles d'après match faisaient la longueur juste ? Ce sera du cas par cas que je ne ferais pas.


Mais donc mis de côté le problème de la pub (bien plus grave que ce qu'on pense comme j'en parlais déjà à l'époque) qu'est-ce qui rend le produit d'alternative au mastodonte de Stanford si appréciable ? Car si on se concentre sur la qualité des matchs il faut bien reconnaître qu'il y a un peu de subjectivité. Pour l'AEW les matchs sont souvent plus flashy, comprenez plus rapide dans leur actions, impressionnants de par les performances athlétiques délivrées et en général moins portée sur les interventions extérieures et dramatisation à outrance (même si on est bien d'accord que l'on y tend un peu au fur et à mesure). Objectivement il faut quand même bien reconnaître que la fédération est prompt à délivrer plus de confrontations 5 étoiles, là où on parlera de très bon matchs en face mais qui ne marquent désormais plus pendant des mois voir des années. Ici ce n'est pas juste l'enjeu ou les faits hors ring qui vont décider de la mise au panthéon d'un match mais bien des séquences folles, des actions uniques et parfois un brin gore mais j'y reviendrais. Et il faut quand même bien se dire que même s'il est question de dramaturgie, cette dernière tourne autour d'un enjeu, savoir qui est le•a plus fort•e. ? C'est au cœur de tout les scénarios, c'est le principe même du sport et il est donc fou de penser que le catch peut autant parler de catch sans proposer ensuite des affrontements longs, épiques et qui challenge tout le temps les acquis. Oui c'est du "absolute cinéma" mais ce cinéma il parle de quoi précisément ? Si on va voir des films de super héros c'est quand même bien pour les voir sauver le monde, entrer dans l'action et utiliser leur super pouvoirs (quand bien même on aime les alternatives aux poncifs). Si un genre s'écarte tant de son essence même, peut-il prétendre encore y appartenir ou doit-il se définit autrement ? Partagée éternellement entre sport et spectacle, la discipline du catch doit pourtant bien offrir les deux, au risque de ne choisir qu'un seul des deux camps et de se vider de sa raison d'être.

Pourquoi diable à la WWE tout le monde veut devenir champion pour ne défendre son titre qu'une fois tout les 3 mois ? Il semble improbable dans n'importe quel autre sport que des titres ne soient pas défendus de manière régulière pour que les champion•nes en titre puissent prouver qu'iels sont les plus fort•es.


Néanmoins on pourra arguer qu'un des problèmes récurrents de la WWE commence à le devenir à l'AEW à savoir que les changements de titres (notamment principaux) surviennent uniquement lors des évènements importants. Et l'on comprend cette volonté de marquer le coup et de faire de la grande messe du catch... ben la grande messe du catch. Ce parfum d'incroyable est d'autant plus fort que l'on sait que des changements majeurs vont arriver, des carrières s'arrêter, d'autres démarrer.

Et ça dans la suspension d'incrédulité c'est quand même compliqué parce que ça rend caduque toute les mises en jeux de championnats dans les émissions hebdomadaire ou les Pay Per Views mineurs. Et quoi de mieux niveau surprise que de voir un long règne se finir un mercredi soir à la télé ? Déjà parce qu'on peut finir par se dire que tout le monde est en danger et surtout parce qu'on ne voudrait absolument pas rater le moindre programme et que ça pour les audiences, c'est bien.

Hors dorénavant les fédérations ont tendances à avoir un voir deux évènements bulldozer annuels et à créer des histoires qui s'étendent sur la durée. Et c'est super le story telling à long terme, on se sent récompensé•es pour notre assiduité et on se rapproche d'une série tv avec ses saisons. Mais du coup les histoires, il faut bien les construire.


Là encore je ne reviendrais pas sur toute les histoires qui se sont conclues ou en tout cas fortement évolués à Dallas comme je ne m'amuserais pas à critiquer toute les histoires claquées de la vévéeuh mais j'aimerais quand même me concentrer sur le championnat principal féminin, bien symptomatique de ce qui va d'un côté et cloche de l'autre.

Car encore une fois c'est non négociable mais Toni Storm est le personnage féminin le mieux écrit toute fédération ricaine confondues. Et je précise féminin mais franchement elle fait bonne figure face à la majorité des rosters masculins. Ce qui a débuté comme un simple gag de s'habiller en actrice du grand Hollywood avec un filtre noir et blanc à la caméra a été subjuguée par les talents de l'australienne qui arrive à nous faire rire autant qu'à nous passionné. En vérité je voulais faire une critique de Revolution 2025 au départ car elle était le pinacle d'une des meilleures rivalités que j'ai vu depuis que je me suis remis au catch. J'ai été hautement impliqué par une vidéo résumé qui dès son introduction nous faisait sentir tout le drame, le glam et les enjeux de la superstar face à sa protégée. Une histoire de trahison, de revanche, de dépassement. Rien d'incroyable pour le cinéma ou les séries mais dans le monde du catch, les standards étant ce qu'ils sont, on se place vite en haut du panier. Magnifié par ce retour de fausse amnésie, le personnage de TIMELESS Toni Storm arrive à conjuguer à la perfection les références au vieil Hollywood tout en se permettant d'être parfois moderne dans sa vulgarité et ses interactions avec le monde réel. Alors oui on regrettera quand même que ça finisse souvent en french kiss avec chaque adversaire parce que c'est des femmes, on a le droit mais en attendant, le personnage est fort, il a ses faiblesses, il est drôle, référencé et se renouvelle tout le temps. Et ça, je suis désolé mais déjà que je ne le retrouve pas au même niveau partout dans l'AEW c'est inexistant chez la concurrence où la plupart des femmes sont définies par le fait d'être.. des femmes ? Même une Rhea Ripley a perdu au fil du temps son aspect visuel en dehors de la norme. Les standards de beauté sont appliqués exactement à toute et on finit par ne différencier qu'une couleur de cheveux ou de bretelles de sous-vêtements.

Toni Storm a un univers et ça semble fou d'arriver à simplement se surprendre de ça. Alors certes ça centralise pas mal d'efforts d'écritures laissant parfois le reste aux oubliettes mais imaginez seulement si tout le monde avait ce niveau d'écriture et que chaque univers se mélangeait ?

C'est surtout fou car loin d'être un gimmick ça s'adapte magnifiquement à un style de combat classique mais efficace et donne donc des combats toujours agréable à voir. Même Luther, son majordome respecte tout autant le cliché qu'il en joue et surtout reste à sa place. Tout le monde n'essaye pas d'être cool de la même manière et le personnage principal de l'histoire arrive à nous faire rire au milieu de segments dramatique. Elle aurait pu être relégué à la mid card pour amuser le public (jusqu'à ce qu'on la vire et que les fans crient au scandale pour la faire revenir nous faire rire et qu'on en ait que foutre) mais non la compagnie lui a fait confiance, elle a bossé autant l'in-ring que l'acting et in finé elle est indétrônable, même face à une collectionneuse de ceintures.

Et je ne vais pas non plus applaudir aveuglement l'AEW surtout pour sa partie féminine. On a quand même seulement deux matchs féminins (et en même temps est-ce que c'est mieux que séparer ses PPV par genre pour faire du pink washing ?) et un placement dans la soirée qui laisse la part belle aux deux autres main events masculins.


Seulement voilà, dans le peu qu'elle fait différemment, l'AEW le fait plutôt bien, semblant assez sincère dans sa volonté de délivrer du beau catch et même quand elle copie un peu l'arc principal de toute une année sur un grugeur qui domine toute la discipline eh bien déjà elle fait durer cette arc une année et pas deux et surtout se permet de conclure tout ça dans un bain de sang. Alors attention, je ne suis pas un hémophile, je me suis presque caché les yeux devant certains passages et par pitié arrêtez d'amener des enfants voir ce genre de match mais la conclusion de cette soirée fait là encore une fois sens. Car les hommes, encore plus que les femmes se promettent continuellement souffrance, vengeance et presque la mort à la moindre contrariété. Seulement encore une fois, d'un point de vu pragmatique, comment de telles haines ne peuvent pas déclencher une violence sans borne. C'est une question d'ajustement, si la fédération sait qu'elle veut un public familial, ne pas avoir à faire à la censure ou tout simplement ne pas trop choquer, il faut adapter les histoires. Mais quand deux mecs se promettent des tourments éternels il faut une fourchette, des planches de fakir et des chaînes. C'est bête, régressif et probablement un peu inquiétant sur ce que ça dit de notre société mais le spectacle est vraiment total parce qu'il s'assume et rend presque ludique l'insoutenable (sérieusement la séquence des agrafes dans l'Anarchy in the Arena plus tôt dans l'année je ne pensais pas que je pourrais rire de ça) parce qu'on sait que ce sont des pros, on sait que c'est plus visuel que physique et parce que la sécurité est quand même toujours là. Le problème que je vois c'est que la surenchère implique d'avoir forcément des limites à un moment ou l'autre mais donc aussi une impression de déjà-vu voire de pas assez.


En attendant c'était top, parfois trop long, techniquement pas toujours au top (surtout le son), parfois moins exceptionnel que ce qu'on aurait aimé mais il y avait du beau sport, il y avait du cinéma et j'ai définitivement choisi mon camp.

Kaptain-Kharma
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le 16 juil. 2025

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Kaptain-Kharma

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