Avec Affreux, sales et méchants, Ettore Scola plonge sa caméra au cœur d’un bidonville romain du début des années 1970 et signe un film virulent, cru et paradoxalement, drôle.


Il y décrit la vie d’une famille grouillante, hurlante, où tout tourne autour d’un patriarche borgne, cupide et tyrannique. Scola observe ces personnages sans jamais les juger, avec une distance quasi documentaire : il pose sa caméra et laisse vivre ce petit théâtre misérable, fait de jalousies, de combines et d’instincts primaires. C’est laid, vulgaire, excessif, mais terriblement vivant.


Tout dans le film justifie son titre : c’est une fresque de la laideur humaine, de la misère sociale et morale. Scola n’embellit rien, ne moralise jamais. Il montre simplement la pauvreté dans ce qu’elle a de plus cru, avec un humour noir décapant et une ironie constante. Le grotesque devient ici une arme politique : il rit du désespoir sans jamais l’effacer.


La mise en scène, d’une précision redoutable, évite la lourdeur du pathos. Chaque plan, chaque cri, chaque détail semble pensé pour donner chair à ce microcosme absurde où chacun cherche à survivre, ou à voler le voisin. Le film atteint parfois des sommets de férocité burlesque, notamment dans ses scènes d’humour noir, qui en disent long sur la condition humaine.


Récompensé du Prix de la mise en scène à Cannes, Affreux, sales et méchants est une tragédie déguisée en farce, une satire sociale impitoyable, d’une lucidité rare. Scola y regarde la misère en face, et nous force à faire de même, sans détours, sans larmes, mais avec un rire amer.

Docteur_Jivago
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le 15 avr. 2015

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