Derrière la tension vicieuse qui règne durant sa première partie, l'oeuvre de Bier se révèle être un drame poignant qui abolit tout système de classes en regard d'un trauma commun : la mort imminente. Si ces jeunes indiens démunis luttent quotidiennement et humblement pour y échapper, elle est une épreuve bien plus fragilisante dans les hautes strates des sociétés blanches ("je ne veux pas mourir !!!") : tel le tremblement de terre au Népal, la mort du père, imprévisible et dissimulée, ébranle toutes les structures alentour et les marque à jamais, la fille étant promise à la dépression maniaque (rencontre du géniteur génétique, adultère du frais mari et décès du géniteur adoptif) et la femme étant secouée par des révélations auxquelles elle ne pouvait pas s'attendre.
Jacob se rend compte de sa position de berger et doit choisir entre un troupeau de brebis galeuses (les indiens, que l'on désire séparer de leur bienfaiteur contre une somme non-négligeable) et un autre de brebis égarées (selon Jorgen, Jacob ne saurait pas accorder la même compassion au mourant sous prétexte qu'il est aisé) ; tel est donc le dilemme, devoir s'affranchir de ses limites éthiques intrinsèques et devenir le jaugeur de son propre degré de compassion, afin de trouver un juste équilibre, un nénuphar de fortune qui flotte avec peine, et d'où il peut contempler un océan tumultueux de souffrances, que sa responsabilité est d'apaiser.
La finesse du propos (dialogues tranchés entre les affectés et le Jacob, ferme, neutre et frustré par son rôle), les transitions des scènes (ressenti des douleurs suivi par le report factuel et docile de la scène précédente), les gros plans sur les visages synonymes de désespoir et de résignation, sont autant de caractéristiques qui définissent la spiritualité presque religieuse de ce After the Wedding.