D'American Sniper découle irrémédiablement des thématiques patriotiques pour lesquelles je ressens d'instinct une certaine méfiance. Le film dresse en effet le portrait d'un héros national Américain, avec tout ce que cela implique de fierté, de courage, de valeurs, de discours sur la nécessité de servir son pays comme sur la lâcheté de ne pas le servir, d'hommages aux USA, "meilleur pays au monde" selon Chris Kyle. Le souci est que Clint Eastwood n'essaie à aucun moment d'opposer la figure patriotique que représente Chris Kyle à autre chose que des terroristes/rebelles Afghans, en résulte une cristallisation de ses valeurs, montrées ainsi comme vérité.


Car il ne s'agit pas tant de l'histoire d'un type qui vise bien, mais bien de celle d'une personne qui a radicalisé son sens du devoir au point de trouver en l'armée un point d'ancrage dans lequel il se réfugie et se retrouve pleinement en tant qu'individu, plus que dans sa propre famille. Or, si le faible désespoir de sa femme (Dont la seule fonction semble être de se plaindre de l'absence de son mari; original) évoque vaguement l'abus et la folie dont fait preuve Chris Kyle, ces idées demeurent sous traitées et ne représentent pas un réel enjeu pour le scénario. Dommage.


A cette vision respecteuse des combattants du SEAL et des Marines s’ajoute l’ambiance de vestiaire virile et mysogyne, là encore, pas spécialement remise en question et donc à priori assumée, qui semble unir les troupes.




  • Votre tête est mise à prix à 10 000 dollars

  • Ne le dite pas à ma femme, elle prendrait la recompense” ololol



Et au delà d’une mise en scène peu inspirée, des mouvements de camera inappropriés ou une romance assez mal écrite, c’est ce respect qui finit par vraiment me gonfler; sans jouer la carte du pamphlet anti-terroriste, ce que Clint Eastwood désire réellement filmer, c’est un hommage à cet homme et, de manière plus générale à l’armée Américaine. Je vois en American Sniper une tentative de racolage pour appeler au patriotisme.


Autre point fâcheux, cette pseudo concurrence avec Mustafar; je trouve en effet incohérente, bien qu’originale, l’idée de faire cohabiter une vision documentée de la vie d’une personne, et en meme temps, d’y inclure un personnage semblant sortir tout droit d’une fiction. Du groupe resistant Afghan uni et nébuleux ressort cette individualité, sorte de sniper surentrainé, figure probablement réelle mais visiblement romancé puisque la focalisation du récit se permet de s’intéresser à son cas d’assez près. L’histoire nous offre ainsi une confrontation superficielle qui aurait pu être réjouissante dans une oeuvre de fiction, mais qui ici officie plus comme une sous intrigue maladroite.


Enfin, pour finir sur une note plus positive, il y a ces fameuses scènes (Deux me semble-t-il) d’opération ou Chris Kyle se trouve face a un ultimatum plutôt important puisqu’il est question de tuer de probables innocents. L’une de ces scènes a été mise en avant pour le trailer, à juste titre puisqu’elles représentent les passages les plus réussis du film, mettant en scène une maitrise totale et jouissive de la tension.

Poulika
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le 14 janv. 2016

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