Leçon d'anatomie

Essayons de rendre justice à ce bon film qui mérite les hommages qui lui ont été faits. J'applaudirais donc avec la meute.

D'abord le montage est remarquable. On ne voit pas les coutures et il y a une certaine intelligence tant dans le choix des procédés esthétiques que dans la création de la durée propre au théâtre de la justice.

Mention spéciale au fil rouge sonore de l'affaire : l'image-son y est omniprésente et bien exploitée.

Le changement de grain de caméra : casse gueule et procédé cliché ? Justifié et elle s'en sort avec finesse.

Encore des bourgeois du bas de la classe supérieure qui ont des emmerdes de couple ? Ça passe.Elle s'en sort. Limite mais elle s'en sort.

Des scènes fortes plutôt bien pensées (comme le début du film) qui sont à double tranchant tant elles auraient pu éclipser le reste avec l'effet « you talking to me » ? La encore elles s'en sortent (mention spéciale à l'actrice principale).

Elle aurait pu tomber dans un tas de pièges comme la théâtralisation de son affaire mais elle s'en sort encore et toujours.

Et cette vérité ? Comment se manifeste t elle ? Principalement par l'ensemble des choix cinématographiques.

Le défaut du film est aussi une de ses qualités : le nombre de sujets abordés voire effleurés ( la question de la séparation artiste auteur , la question esthétique, le passage à l'age adulte etc.) rends le tout très dense mais c'est ce liant qui est propre au déroulé d'un procès qui porte cette œuvre au delà d'un simple enchaînement et permet de ressentir le temps propre à la justice.

C’est aussi grâce à sa protagoniste principale qui se frotte à une différence de langage, qui ne parlera jamais dans sa langue maternelle, et qui essaie en permanence d'expliquer que c’est « plus compliqué que ca » que passe cette idée que nos perceptions et nos positions sont et seront toujours partiellement entendues. Cette densité de questions mal posées aux réponses incomplètes, inadéquates sera ce dont on devra se satisfaire. La forme « mensonge » du cinéma ne peut et ne doit pas rendre compte de la situation.

Peut être aurais je aimé moins de questions ? et moins de réponses bateau ? Surement . En tous cas celles que l'on tient dans l'image déformée d'un procès d'assises même très bien mis en scène ne feront pas la loi dans mon esprit.

Son propos est qu'on décide de croire ou non pour de bonnes ou mauvaises raisons ; dès qu'on œuvre à la « manifestation de la vérité » on est vite confronté à la balkanisation de cette dernière. Et de l'éclatement en débris de cette dernière, en traces, en pourquoi et en pourquoi pas; il ne reste alors que ce que l'on décide ou pas de croire.

Ce film est un corps. Nous assistons à sa naissance et à sa mort mais le plus important c'est bien la question de savoir que peut ce corps ?