La Vérité

Je boucle 2023 en beauté, avec "Anatomie d'une chute", joli succès public et triomphe critique de l'année.

Il est relativement rare de voir des films de prétoires français, et quand c'est le cas, les séquences de tribunal sont en général assez courtes. En effet, notre système judiciaire est bien moins spectaculaire que celui des USA, qui sont eux très friands du genre. Néanmoins, "Anatomie d'une chute" fait partie des quelques films qui ont osé relevé le défi, et le font avec brio.

Justine Triet prend le parti d'offrir une mise en scène très détachée, presque documentaire dans le principe, qui ne nous fait pas voir grand chose de plus que les témoins de l'affaire. Samuel a fait une chute mortelle de son chalet, et son corps a été découvert par son fils malvoyant. Accident, suicide, ou meurtre commis par sa femme, Sandra ?

Le film dissèquera ce couple très dysfonctionnel devant une cour de justice écrasante. Qui tentera de briser la suspecte, intellectuelle froide et ambigüe s'exprimant principalement en anglais (formidable Sandra Hüller). Est-elle une grand manipulatrice perverse ? Ou juste une femme déboussolée, qui a bien conscience que le moindre faux pas peut faire pencher les soupçons vers des accusations ?

Justine Triet affiche aussi une image implacable de la justice. Disposant de gros moyens et de méthodes pour démêler les faits. Mais dont les membres ne sont guère reluisants. Avocats hypocrites prompts à se lancer dans des joutes oratoires, et juges secs.

Tout ceci pour arriver à une thématique universelle, celle de la vérité. Quand ni les témoignages, ni les preuves matérielles, ne peuvent avec certitude la révéler, comment des individus ou un système peuvent y trouver leur compte ?

Un scénario haletant sur 2h20, des acteurs excellents, une mise en scène maîtrisée de bout en bout (la pression est là en permanence dans les séquences de tribunal !). Assurément, "Anatomie d'une chute" est l'un des temps forts du cinéma français de 2023.