« Another happy day » est apparu dans les salles obscures le premier février dernier. Il s'agit du premier film réalisé par Sam Levinson. J'ai été attiré vers ce film par son affiche qui le présentait comme un opus comportant un casting dense et équilibré. On évoquait un film bouleversant et hilarant, ce qui n'est pas la moindre des choses. La présence dans les rôles principaux d'Ezra Miller m'intriguait. En effet, il fait partie des acteurs qui montent en puissance actuellement et j'étais curieux de le voir dans un rôle annoncé important.

L'histoire est construire autour d'un événement amené à réunir une large famille. Il s'agit du mariage de Dylan. On suit l'arrivée de sa mère, Lynn, avec deux de ses autres enfants prénommés Ben et Elliot. L'un sort d'une cure de désintoxication, le second est présenté comme quasiment autiste. Personne ne semble ravi de se retrouver au beau-milieu de ses grands-parents réacs, de tantes insupportables, de cousins sans intérêt. A peine la porte franchie, les tensions apparaissent tout de suite, les paroles maladroites fusent... Et dire qu'on n'évoque pas encore les non-dits !

La narration se construit sans round d'observation. A peine entré dans la maison des grands-parents que les cris et les règlements de compte sont sur le devant de la scène. Dans ce domaine, le rythme ne réduira jamais. On n'arrive pas à croire que tout ce beau monde arrivera à un moment ou à un autre à vaguement s'entendre. Cela offre donc des dialogues assez cinglants et bien construits. Certaines phrases sont des moments intenses et nous touchent profondément. La grande quantité de personnages et de sources de conflit fait que le film ne souffre d'aucun temps mort. A aucun moment, la hache de guerre n'est enterrée ne serait-ce que provisoirement.

Contrairement à ce qu'annonçait l'affiche, je n'ai pas trouvé le film hilarant. Je trouve que la corde humoristique n'est quasiment pas utilisée par le scénario. Passé le premier quart d'heure, on comprend vite que rien n'est drôle. On se trouve devant des personnes torturées voire pathétiques sous certains aspects. On ressent de la compassion et de l'empathie pour certains, du rejet et de la colère à l'égard d'autres. Mais aucun n'est suffisamment léger pour nous faire rire. Le ton de la narration est relativement dur. Je trouve que l'ambiance est pesante. On appréhende en permanence le prochain clash, la prochaine révélation ou remarque qui mettra un des membres de la famille à terre. Je trouve que le film est assez intense sur le plan émotionnel par sa dureté dans les rapports humains.

Malgré le fait que le côté obscur de chacun d'entre eux soit loin d'être négligeable, on ressent une empathie assez immédiate pour le trio qu'on découvre dès le début du film composé de Lynn, Ben et Elliot. Chacun possède ses défauts, chacun a parfois une attitude désagréable et pourtant on a tendance à s'attacher à eux. Le côté désagréable et insupportable des autres membres de la famille rend le choix de notre camp finalement assez facile. Certains pourront trouver que le scénario charge la mule avec la dimension dramatique de tout ce beau monde. Je ne peux pas réellement contredire ce point de vue tant les personnages sont loin d'être épanouis et équilibrés. Néanmoins, la qualité d'interprétation des acteurs et l'écriture des dialogues compensent ce côté « too much ».

Le casting est de grande qualité. C'est d'ailleurs un aspect indispensable dans ce type de film choral. Ezra Miller iradie l'écran par son personnage d'adolescent tourmenté. On ressent beaucoup d'empathie à son égard. Parallèlement, il nous fait un petit peu peur et certains de ses propos nous mettent mal à l'aise. Il s'agit incontestablement d'un personnage qui ne laisse pas indifférent. J'ai également beaucoup apprécié le rôle de la mère jouée par Ellen Barkin. Elle a tout de la mauvaise mère. Tous ses enfants ont des problèmes psychologiques, elle semble dépassée par les événements. Elle apparait finalement assez immature en comparaison de ses enfants. Pourtant, j'ai beaucoup de compassion à son égard. Il faut dire que l'acharnement de ses sœurs et de ses parents à son encontre nous facilite la tâche. La force de la micro structure qu'elle forme avec ses enfants et qu'ils sont unis contre le monde extérieur. Je ne vous détaillerai pas tous les personnages du film car une partie du plaisir réside dans leur découverte au gré de ce week-end de mariage.

En conclusion, « Another happy day » est un film bien plus dramatique que son affiche ne le laisse paraître. La dimension hilarante que cette dernière annonce est pour moi inexistante. Je n'ai pas le souvenir de grands fous rires ou de moments divertissants. La majorité du temps, on est torturé par la dureté des rapports humains dans ce qui est officiellement une famille. On appréhende en permanence torturé par l'attente du prochain événement que va devoir subir cette mère. Le film ne m'a pas laissé indifférent. Je suis rentré dedans sans mal et je n'en suis sorti qu'une fois le film terminé. C'est le gage d'une certaine qualité. Je le conseille donc aux adeptes du genre. Par contre, si vous avez besoin de vous divertir après une longue journée de boulot, choisissez un autre film...
Eric17
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le 19 mars 2012

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Eric17

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