Première réaction: heyy mais c'est Deuniii! Quest-ce qu'on lui a fait la pauvre, quelle est donc cette poitrine déguisée en fille?!!

Deuxième réaction: le film devrait remplacer la bande d'annonce, vraiment! Après lecture, c'est beaucoup mieux que ce à quoi je m'attendais. Certes j'étais amoureux de l'ancienne version, mais finalement on s'habitue, et puis au final même le visage colle peut-être plus avec ce qui est dit du personnage dans l’œuvre originale. Ce détail réglé, venons en à l'histoire. Appleseed Alpha est dans la veine des précédents; ça parle d'espoir, de futur, dans un décor post-guerre mondiale. Rien d'extraordinaire, ce film est presque un action live, mais même avec sa simplicité il a réussit à me surprendre. Aramaki prolonge la mise en place du contexte d'Appleseed en racontant les heures suivant un conflit mondial. Des soldats se battent encore, certains ne savent même pas que la guerre est finie. Dans le désordre, des tyrans locaux solidifient leur place, accumulant de l'argent et du pouvoir. Au milieu du chaos, il reste un vague espoir, la légende ou plutôt la rumeur d'une cité pacifique qui tente de rassembler les résidus d'humanité éparpillés sur le globe par ce conflit mondial, pour redémarrer et si possible sur la bonne voie. Le coté libertaire voir communiste libertaire assez prégnant dans la culture populaire japonaise (surtout l'animation) est difficilement contournable, mais la cité de l'espoir n'est pas sans État, on se rapproche des Cités État de l'antiquité grecque (civilisation grecque dont la symbolique est omniprésente dans l’œuvre de Masamune Shirow). Ce n'est pas non plus le fantasme d'une di-société capitaliste "libertarienne" que certains prétendent voir à chaque fois que sort une œuvre flirtant avec le genre cyberpunk ou bien figurant des rebelles face à un terrible régime dictatorial. Quel plaisir de voir les grands adversaires de nos deux personnages principaux se poser en prêcheurs de la parole de Nietzsche (un adorateur de la culture aristocratique antique grecque), prêts à maintenir le monde dans la guerre pour le prétendu salut d'une espèce vouée à créer des héros et "se dépasser", des positions militaristes qui engendrent une prétendue "gloire" au prix de vies humaines. Loin d'être si caricaturaux, ils justifient la naturalité de la guerre par l'ennui et l'affaiblissement que produirait selon eux les aspirations pacifistes, la fin des "héros" de guerre sensés servir de modèle. Mais ne faut-il pourtant pas une base solide émancipatrice à toute société si l'on veut la voir prospérer dans son intégralité et non pas lui donner des apparences de grandeur par son auto-destruction permanente?
La Cité d'Olympus est cette Cité qui tente de répondre aux injustices et à la misère produite dans un monde déchiré et corrompu. De ce fait, elle ressemble dans l'intention à ce qu'ont essayé de produire toute une génération post-guerre mondiale sur fond de "plus jamais ça!"
Deunan et Briareos, les deux personnages principaux, sont un peu les spectateurs, pris dans le contexte (dette, conflits persistants, des drones incontrôlables; j'aime aussi ces petites références à l'actualité). Avec l'occasion de protéger deux citoyens d'une cité tournée vers le futur et la paix, ils se trouvent alors une nouvelle cause, et renoncent à leur pessimisme. L'espoir et la paix à travers l'exemple concret d'une Cité cosmopolite dont il faudra protéger deux représentants mis en difficulté par les circonstances, tel sera l'objet désormais des actions de nos deux héros: Deunan (la jeune guerrière entraînée à survivre) et Briaréos (le cyborg, qui doit recharger ses batteries car, comme tout être, il doit s'alimenter; chacun sa misère).
Ce choix contre le pessimisme aussi me plaît, avec tout ce qu'il y a de spinozien dans Appleseed, car je crois que le fait que la société n'évolue pas rapidement est aussi dû à une certaine tristesse momentanée de la part de beaucoup de gens, qui les empêche de penser au futur et chercher à le réaliser, préservant par défaut les circonstances qu'ils déplorent, paradoxalement. Appleseed pointe cette contradiction et la nécessité du choix.

Pour le reste, la science fiction frôle les œuvres d'Asimov; la société d'Olympus sera une cité dans laquelle les passions tristes des humains seront équilibrées par la présence et l'accompagnement d'êtres hybrides, les "bioroïdes", produits à partir de gène humain à cet effet. Un ordinateur central, en discussion permanente avec un Conseil représentant les humains, gouverne la cité. Les humains quant à eux, se voient attribués la protection du lieu, l'armée, la police. C'est par ce fragile mais prometteur équilibre que la cité d'Olympus compte amener l'Humanité à évoluer. Cyborgs, bioroïds, et humains constituent la diversité du lieu.
Personnage du duo principal, Deunan est elle même, d'une certaine façon, un de ces êtres hybride, de par la culture variée qu'elle représente. Dans les œuvres originales elle est décrite comme ayant des origines scandinaves, françaises, et soudanaises, tandis que son prénom vient d’Écosse.

Reste sur le plan visuel, un beau spectacle, (bien meilleur que ce à quoi la bande d'annonce nous fait nous attendre). Quelques allusions à l'actualité se sont glissées dans le film: des dettes qui pleuvent bien-sûr, emprisonnant des éventuels survivants dans leur cercle vicieux, des drones qui tirent sur tout ce qui bouge (voir contexte en Irak récemment, avec les drones américains), attentat sur une Tower, des messages de propagande vantant une prétendue "victoire" (mais qui gagne une guerre?).
James Cameron, le réalisateur de Avatar et de Titanic, semble suivre le travail de Aramaki depuis quelques temps; il a tenu en personne à soutenir le projet.

APPLESEED ALPHA: Je mets deux étoiles pour le rendu visuel très agréable, quatre étoiles, exceptionnellement, pour l'optimisme prudent parce que par les temps qui courent ça manque vraiment dans les œuvres de SF, une étoile pour le scénario somme toute très classique, et une étoile enfin pour le duo Deunan/Briareos avec des humeurs un peu atténuées par rapport aux précédentes versions. Ça nous fait 8/10 mais sans l'exception que j'ai bien voulu attribué ça ferait 6/10 !
Greenbat85
8
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le 16 déc. 2014

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Greenbat85

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