Albert Dupontel possède un univers singulier. A l'instar de Jean-Pierre Jeunet, il s'agit d'un réalisateur qui se distingue par une patte toute particulière dans ses œuvres. C'est ainsi que ce Au revoir là-haut peut faire écho à Un long dimanche de fiançailles de son homologue cinéaste. Au-delà de l'époque, du thème, on trouve ici une photographie, un parti pris décalé qui oscille en permanence entre drame et humour.
Même s'il s'agit d'une adaptation d'un roman manifestement de haute volée, Albert Dupontel distille encore et toujours ce qui fait le sel de ses films, un mélange subtil entre ironie mordante et canaillerie enfantine. Car cet immense réalisateur a su conserver un regard émerveillé sur ces histoires qu'il nous met en scène. C'est une fois encore le cas ici, malgré la dureté du propos qu'est l'immonde boucherie de masse en cette orée du XXème siècle.


Ses personnages sont tous formidablement campés, depuis l'austère Nils Arestrup, toute en émotion retenue jusqu'à l'ordure qu'incarne avec une jubilation manifeste Laurent Lafitte. Si Albert Dupontel est égal à lui-même en personnage modeste et quelque peu simple, que dire de l'excellent Nahuel Perez Biscayart qui habite corporellement son hôte cinématographique ? Tout simplement fantastique.
C'est alors que cette jolie brochette d'acteurs (les actrices, dans leurs rôles plus modestes, ne sont pas en reste à l'instar d*'Emilie Dequenne*) se met en mouvement dans une successions de scènes dont certaines sont tout bonnement époustouflantes. Les instants dédiés à la guerre de tranchée, sans en rajouter, immergent le spectateur dans ce qui fût la fin de quatre années d'horreur. Il faut alors tourner la page et réintégrer dans la société les anciens combattants, dont certains sont devenus des gueules cassées. D'hôpital militaire en soupentes, de masques en arnaques, de déchirures en reconnaissance, voici que survient l'épilogue sans une once d'ennui.


Si les images ont été belles, les interprètes impliqués, c'est bien l'émotion qui transparaît de bout en bout de cette pellicule. Horreur, cynisme, drôlerie, tout y est jusqu'à une scène incroyable qui fera planer le spectateur et pourra le laisser pantois, comme je le fus, lorsque deux êtres séparés par un abîme se reconnaissent enfin. Quelle chute !


Albert Dupontel a, pour notre plus grand bonheur, encore bien des choses à dire...

Apostille
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Ces films qui m'ont tiré une larmichette... et Les meilleurs films de 2017

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le 28 oct. 2017

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