Babel est le 3ème film que je voie du cinéaste mexicain Inarritu. J'avais commencé avec 21 Grammes, lors de sa sortie en salles, et le film m'avait suffisamment refroidi pour que je n'aille pas voir plus loin. Puis, en ce début d'année, Birdman fut une très bonne surprise. Du coup, je me devais de voir un troisième film, pour savoir quoi penser sur ce cinéaste.
La première chose qui me vienne à l'esprit, c'est qu'il y a des constantes qui reviennent dans ces trois films :
_ une certaine volonté de compliquer les choses. Le scénario est parfois inutile complexe, surtout pour affirmer des choses parfois simples.
_ une longueur excessive.


Venons-en au cas de Babel.
Babel est ce qu'il convient d'appeler un film choral.
C'est bien le minimum qu'on puisse attendre avec un tel titre : de multiples personnages, parlant des langues différentes (cinq langues en tout, si l'on inclue la langue des signes).
D'un côté, nous avons un berger marocain qui entre en possession d'un fusil avec ses cartouches.
Puis, un couple d'Etatsuniens (couple plus ou moins solide, plutôt moins que plus) en vacances organisée dans ce même Maroc.
On continue avec une nounou mexicaine qui garde les enfants de ce couple qui essaie de recoller les morceaux du côté de Ouarzazate.
Vous suivez, jusque là ?
Bien.
Continuons.
Evidemment, on le sent venir, les trois histoires vont se mêler. La madame étatsunienne va se prendre une bastos marocaine en plein buffet, les gamins de dix ans vont être poursuivis pour terrorisme, et la nounou mexicaine, ne voulant pas rater le mariage de son fils, va traverser la frontière avec les gosses de la victime, en toute illégalité, bien entendu.
Oh ! ne nous inquiétons pas trop : traverser la frontière pour aller au Mexique, ça ne pose aucun problème. Quand un Etatsunien va au Mexique, on ne parle pas d'immigration clandestine, la notion ferait même sourire.
Et nous voilà du coup au coeur même de ce qui m'a paru le plus intéressant dans ce film. Au-delà du jeu scénaristique très artificiel, au-delà d'une réalisation qui confond un peu trop facilement immersion et émotion, il y a une critique fort bien vue. Celle d'un monde où tous ne sont pas égaux.
Celle d'un monde où une vie étatsunienne n'a pas la même valeur qu'une vie marocaine.
Celle d'un monde où les pays riches ont certains droits et considèrent les autres comme inférieurs.
On sent bien le cinéaste mexicain impliqué dans ce constat.
Ce qui arrive à la nounou mexicaine est sûrement le passage le plus passionnant du film. Le plus émouvant.


Alors, faisons le bilan : Maroc, USA, Mexique...
... et Japon.
Car il y a une autre partie du film qui se déroule au Japon. On y suit une adolescente sourde-muette dotée de la faculté de se foutre à poil pour un rien.
Alors, certes, je vous vois venir, voir une mignonne petite asiatique à poil, ce n'est pas moi que ça dérangerait.
Je vous le concède.
Mais, au-delà de mes hormones, un doute me turlupine. Je dirais même mieux, un doute m'habite.
Cette partie nippone est rattachée au reste du film par un lien si ténu que ça en devient ridicule. Et, en gros, quand j'ai fini ce film, je me suis demandé si cette partie était vraiment nécessaire. Elle rallonge l'ensemble, coupe des scènes inutilement et n'a pas un rapport direct avec le sujet principal.
Bien entendu, il y est question de langage et de communication (ou d'absence de communication, plutôt). Mais ça ne suffit pas à faire une unité de cet ensemble trop disparate.

SanFelice
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le 7 avr. 2015

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SanFelice

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