BAC Nord: Allo Alliance Police j'écoute?

111eme film de l'année et découverte de ce nouveau film français sur la banlieue qui a coup sur va faire parler.


Synopsis officiel : 2012. Les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu'au jour où le système judiciaire se retourne contre eux…


Rien qu'au synopsis officiel, il y a un problème que j'évoquerai plus tard.


Tout d'abord commençons par la première zone de lecture, soit le film en lui même.


L'histoire est prenante, sous haute tension la plupart du temps avec des moments d'accalmie pour découvrir un peu plus les personnages et spécifiquement les trois protagonistes principaux, ces derniers se rendant au fur et à mesure sympathiques auprès du public qui a l'impression de vivre avec eux leurs quotidiens.


Je pense que le film est vraiment pas mal du tout jusqu'au 2/3, c'est après que cela se gâte selon moi car il révèle possiblement sa véritable mission.


Le film est clairement en faveur de la police qui par l'intermédiaire du trio central est montrée comme des braves hommes, un peu bourru à cause de la vie dure, qui sont piégés par une direction contrôlée par la peur, l'incompétence et la vanité prête à utiliser sans vergogne la calomnie tout en envoyant au casse pipe "sa famille" **pour quelques minutes de gloire puis qui n'hésitera pas à les abandonner à la moindre incartade révélée au grand public.


Et en cela, c'est là que commence le problème.


Déjà, je tiens à préciser avant que dire que tout n'est pas rose pour les policiers et de témoigner la difficulté qu'il a au quotidien est compréhensible et appréciable, montrer une routine d'une partie partie de la France méconnue que certains connaissent est en soi louable mais ici, il y a clairement aucune mesure dans le parti pris.


En effet, l'ensemble de la population des cités est dépeinte comme un amas d'animaux dangereux qui ne te veut que du mal et ne connaissent que le rapport de force tel des bêtes qu'il faudrait dresser, montrant en image telle une démonstration visuelle ce que les polémistes et autres idéologues des chaines de Bolloré tentent inlassablement d'encrer dans la tête des personnes les plus vulnérables, l'idée de l'ensauvagement de la société et du grand remplacement.


Sachant que toute œuvre est politique et témoigne de la pensée de son auteur, il est quand même surprenant dans un métrage que tous les personnages ayant le bon rôle (ou un rôle positif pour être large) soient tenus exclusivement par des blancs- surtout à Marseille, une des villes les plus cosmopolites de France-, les non-blancs pour être grossiers, étant dans leur ensemble dépeint comme des lâches, criminels, magouilleurs ou encore comme des sauvages sans fois ni loi.


Deuxième chose qui m'a fait tiquer, c'est qu'au tout début, le réalisateur dit que c'est inspiré d'une histoire vraie mais que les faits sont fictifs pour finir par écrire à la fin du métrage, le destin des protagonistes donc recollant avec les procédés des histoires vraies/biopics ce qui poussent malicieusement à ce que le public pense que tout ce qui s'est passé dans le film est vrai.
C'est qui ne l'est pas du tout.


Y a comme un double discours là, tout est fait en sorte pour que l'on prenne parti des protagonistes peut importe ce qu'ils font et se dont ils sont coupables (minimiser l'importance des méfaits pour embellir les bienfaits).


Si les personnes dont l'histoire s'inspirent ont été condamné, c'est sensiblement plus de ce qui est montrer à l'écran, le fait de mêler le fictif et le réel pour brouiller la frontière du réel afin de provoquer une certain colère du public envers ce qu'il identifie dans ce film -mais aussi dans la vraie vie par un classique transfert émotionnel- comme une situation injuste est juste pernicieuse dans son objectif.


De plus, le fait d'avoir une police des polices contrôlant le "bon" travail des membres de la police est ici perçu comme quelque chose de honteux, répugnant et indigne de la police comme l'évoque sensiblement l'un des protagonistes.


Or là, concrètement, ce n'est pas possible d'avoir ce genre de propos. Le contrôle est sain et essentiel, ce n'est pas un truc de politicard, le but c'est de ne pas avoir une prolifération de cow-boys faisant fi des lois qu'ils sont censées être garant. Point.


Rien ne doit empêcher ce contrôle et je rajouterais même que ces derniers doivent être beaucoup plus fréquents et rigoureux afin d'éviter la prolifération des brebis galeuses faisant beaucoup de tord à la vraie police.


Prétendre autre chose est dérangeant et c'est selon moi un discours de syndicaliste policier à la Alliance Police, dont la mission est de laver plus blanc que blanc.


C'est simple, selon moi, la dernière partie, c'est un manifeste digne de ce genre de syndicat très très corporatiste pour ne pas dire plus, qui rejette la faute d'un dysfonctionnement sur un système tout en prenant le soin de dédouaner les acteurs participants à ce dysfonctionnement.


Pour revenir aux personnages, ces derniers sont brillamment interprétés par un casting de haute qualité pleinement investi tant émotionnellement que physiquement. François Civil crève l'écran encore une fois et Lellouche est encore une fois très bon dans son interprétation. Karim Leklou mais surtout Adèle Exarchopoulos et Kenza Fortas étant un peu plus en retrait mais s'en tirent très bien.


Au niveau visuel, c'est très bon avec une caméra dynamique et immersive lors des scènes d'action et plus en recherche de beaux plans dans des moments importants d'accalmie. Il y a un gros travail au niveau de la photographie que ce soit de jour ou de nuit, de la mise en lumière, de la composition des cadres,.... Il est clair que le réalisateur a cherché à montrer au plus près ce qui se rapproche le plus selon du Marseille qu'il souhaite montrer (décors urbains, périurbains, en intérieur,..).


Il a aussi un très bon travail sonore que ce soit mixage, bruitage mais surtout une BO impactante de vraiment bonne qualité.


Au final, c'est un film réussi au niveau de la forme et du fond mais dont le sous texte est vraiment dérangeant car il dépeint une situation qu'il prétend par la forme vraie qui ne l'est pas et encore moins généralisé comme indiqué dans le métrage, et qui est dans le fond d'autant plus problématique car cette histoire fictionnée ressemble juste à une défense traditionnelle des personnes les plus borderlines de la Police prêt à tout pour justifier les méfaits de ces brebis galeuses.


Clairement, c'est un bon film mais rester en éveil afin de ne pas vous faire piéger par une rhétorique qui s'installe en sous marin. Si vous pensez effectivement que ce qui se passe est la vraie vie et que vous ne voyez aucun problème dans le métrage notamment au niveau de la représentativité des faits, des forces en présence et des points vues-ici unilatéral-, c'est que quelqu'un a du bien faire son boulot^^


Je pense personnellement que le film "Les Misérables" a fait un meilleur travail au niveau des points évoqués car il s'est évertué à être le plus neutre possible (chaque camp ayant ses tords et ses bienfaits) tout en montrant sans artifice la vie quotidienne de cette partie du monde (population+ police) qui m'est que peu connue.


A découvrir avec une certaine prudence mais vous y pendrez probablement un certain plaisir

lugdunum91
6

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le 8 sept. 2021

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lugdunum91

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