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Parce que le propre des goûts est qu'ils évoluent, j'ai drastiquement changé d'avis sur le fameux BvS de Zack Snyder après une troisième vision (2e en version longue) motivée par la découverte du Snyder Cut. Bien que je ne sois plus du tout en accord avec ma critique écrite à l'époque sur Cultiz, je la laisse au-dessous de mon avis actuel en sa vertu de témoignage.


Pas aidé par une version cinéma bordélique, BvS est resté pour beaucoup comme l’un des plus gros échecs récents du blockbuster, une espèce de monstre informe perdu entre ses ambitions et son statut de produit de consommation. La vision de l’Ultimate Edition m’avait aidé à relativiser certains des défauts du film, comme son rythme et sa cohérence narrative qui bénéficiaient énormément de ces 30 minutes supplémentaires, même si je n’étais toujours pas fan de l’approche globale.


Mais depuis lors je crois que mes goûts ont évolué et que j’ai acquis une certaine sympathie pour ces réalisateurs-lourdauds qui s’intègrent pleinement à la machine hollywoodienne tout en s’y distinguant (je pense à Michael Bay que j’ai redécouvert récemment). Du coup le style de Snyder ne me pose plus vraiment problème, certes c’est aux antipodes de la finesse mais en même temps son traitement de la figure super-héroïque comme une divinité appelle inévitablement une certaine emphase. Et pour le coup c’est peut-être le seul réalisateur qui a assumé jusqu’au bout ce traitement divin, surhumain, en rendant ses personnages si lourds et imposants à l’écran.


Et je me disais que c’est peut-être finalement le Snyder le plus “sobre” dans son style. Alors oui la sobriété est un grand mot, disons qu’on n’est pas dans du 300/Sucker Punch (ou même Justice League) où on a l’impression que tout le film est en slomo. Et on n’a pas non plus la caméra portée et les zooms de Man of Steel. Ici, j’ai davantage l’impression qu’il se met au service de son sujet et distille ses effets quand c’est nécessaire. D’ailleurs le film me fait pas mal penser à The Dark Knight dans le fait qu’il est en majeure partie construit comme un thriller avec finalement assez peu de scènes d’action, qu’on est pris dans une espèce de flot ininterrompu porté par les dialogues, le montage et l’élégance de la mise en scène. Bon et les scènes d’action baboulent quand même, que ce soit la course-poursuite, le duel du titre ou le Batman Brawl dans l’entrepôt, c’est brutal et maîtrisé comme Snyder sait le faire. Même le combat contre Doomsday, bon c’est un peu de la bouillie numérique sur fond gris/noir mais il y a malgré tout cette science de l’impact, de la puissance, qui est totalement absente de n’importe quel Marvel.


En parlant de TDK, je pense que le film marche aussi parce qu’il se construit avant tout sur un niveau symbolique plutôt qu’humain, avec trois personnages qui représentent trois pôles (Batman/Joker/Dent et ici Batman/Superman/Luthor). Et en ça je trouve que le perso de Batman fonctionne assez bien, l’introduction rappelle tout aussi bien son traumatisme que son désir narcissique de s’élever au-delà de l’humain - tandis que Superman, être divin, cherche lui à (re)trouver son humanité. Et du coup je trouve que Wayne fonctionne bien comme une représentation d’une humanité désabusée, qui a perdu la foi et chez qui le désir de justice laisse place à la vengeance. Luthor fonctionne presque comme un miroir déformant du personnage, l’homme qui veut tuer dieu voire devenir dieu lui-même - c’est assez parlant je pense que l’essentiel du film soit consacré à cet ado attardé qui joue avec des êtres divins comme si c’étaient des figurines. Et je dois dire que tout ce traitement thématique associé au côté plus politisant hérité de Watchmen (certes avec une conclusion complètement opposée) ont fonctionné sur moi.


Donc voilà j’ai toujours des reproches à faire au film, principalement tout ce qui jure avec ces intentions thématiques pour verser du côté du pur produit - l’introduction forcée de Wonder Woman et tout ce qui sert de teasing à la Justice League, surtout quand on voit ce qui en est fait après :hap: . Mais là où je le percevais avant tout comme une œuvre malade, je le vois désormais comme l’un des rares blockbusters “à licence” de la décennie écoulée (avec The Last Jedi, fight me) portés par de vraies intentions et une ambition louable.




Critique originale publiée le 30 mars 2016 :


L’évènement est exceptionnel, cela ne fait aucun doute. Batman V Superman, c’est non seulement le retour de deux icônes parmi les super-héros mais également leur première rencontre sur grand écran. Avec les forces en présence, on imaginait mal comment le film pouvait décevoir. Pourtant, le film connaît actuellement un lynchage critique presque sans pareil, descendu par une vaste majorité de la presse multimédia. On a souvent tendance à se méfier de ces vastes tendances à descendre en trombe une œuvre filmique, après tout peut-être est-elle juste incomprise, trop différente de ce qu’on attendait d’elle, proposant des choses que le grand public n’est pas prêt à recevoir. Mais les critiques n’ont pas toujours tort, semblerait-il.


A lire sur Cultiz


Batman V Superman sort dans un contexte particulier. Il y a quelques années, Marvel Studios introduisait une nouvelle politique amenée à faire date dans l’histoire du film de super-héros : celle de l’univers partagé. Les pérégrinations d’Iron Man, Thor ou Captain America s’inscrivaient désormais toutes dans un seul et même univers filmique et les différents héros étaient même amenés à se rencontrer, à collaborer (les deux Avengers) voire à s’affronter (le futur Captain America : Civil War prévu pour fin avril). Le “Marvel Cinematic Universe” s’est déjà avéré très lucratif, au point d’altérer les pratiques d’autres studios. C’est le cas de la Warner, propriétaire de l’ensemble du catalogue DC Comics et dont l’histoire récente au sein du genre super-héroïque alterne entre succès planétaires (la trilogie The Dark Knight de Christopher Nolan) et échecs plus ou moins flagrants (Superman Returns, Green Lantern, Watchmen…).


Le studio avait tenté, il y a près de 3 ans, de relancer la carrière de l’iconique Superman avec Man of Steel en s’inscrivant dans l’approche plus sérieuse et cérémonieuse des Batman de Nolan. La réception fut tiède mais le succès suffisant pour que la Warner décide de faire de son dernier né la base de son propre univers partagé. Furent dès lors annoncés une série de projets plus ou moins lointains : Wonder Woman, Aquaman et bien entendu Justice League, la réponse définitive de DC et Warner aux Avengers. Et le véritable point de départ de ce projet ambitieux n’est autre que Batman V Superman : L’Aube de la Justice, film colossal dans son intention de réunir à l’écran deux des super-héros les plus emblématiques. À la barre du projet : Zack Snyder, déjà responsable de Man of Steel et spécialisé dans l’adaptation de comics depuis 300 et surtout Watchmen. Malgré des prémisses prometteuses, on ne pouvait s’empêcher de sentir, derrière le poids des noms impliqués, un parfum d’opportunisme de la part d’un studio jaloux du succès de son rival et tentant précipitamment de le rattraper sur son propre terrain. Au risque d’un résultat final bâclé ? Le lynchage critique subit par le film depuis sa sortie est-il mérité ? Inutile de faire durer le suspense : il l’est, oh oui il l’est.


Les intentions étaient pourtant alléchantes : 18 mois après les évènements de Man of Steel, la légitimité de Superman est remise en cause. Certains jugent ses pouvoirs trop dangereux, trop destructeurs pour être portés par un seul homme, d’autres questionnent le statut de dieu vivant que semble s’être octroyé le nouveau protecteur de la Terre. Parmi les opposants du fils de Krypton se trouve un autre super-héros, vêtu de noir et semant la terreur parmi les malfrats de Gotham City. Batman, alias Bruce Wayne, a assisté en direct à la destruction engendrée par Superman dans la ville de Metropolis lors de son affrontement contre Zod et est désormais persuadé qu’il est le seul à pouvoir arrêter le justicier à la cape rouge. Quoi de plus prometteur en effet qu’un affrontement entre un Superman dénigré par la population et un Batman vieillissant, plus radical et violent que jamais ?


Malheureusement, ce n’était visiblement pas assez pour les scénaristes qui décident de balancer dans le film tout ce qu’ils ont pu trouver en terme de sous-intrigues : une machination mise en place par Lex Luthor (incarné par Jesse Eisenberg, nous y reviendrons), des complots impliquant du trafic d’arme en Moyen-Orient, les passionnantes (hum) pérégrinations de Lois Lane en enquêteuse tout-terrain, l’introduction de Wonder Woman et un teasing sur les prochains personnages destinés à intégrer la Ligue des Justiciers. En résulte une trame complètement informe, incapable de se concentrer et d’aborder son sujet en profondeur. Le film est long, laborieux, ne va nulle part et se paie le luxe de quelques séquences improbables, comme un rêve futuriste de Batman sorti de nulle part ou la totalité des scènes mettant en scène Lex Luthor.


Les problèmes d’écriture du film seraient sans doute aisément plus digestibles si l’ensemble ne prenait pas un ton si tristement sérieux. Le film de Snyder calque son canon d’écriture sur celui de Nolan avec des dialogues très pompeux, souvent construits en forme de discours idéologique et une quasi-absence d’humour, volontaire du moins. Si la formule fonctionnait pour The Dark Knight, c’est parce que le réalisateur savait habiller ses thématiques et ses personnages avec suffisamment de substance pour que l’ensemble prenne forme. Ici, on nous bassine à coup de grands discours sur la démocratie et la justice, sans grande conviction et surtout sans vrai traitement des idées pensé sur l’ensemble du long-métrage. De l’esbroufe sans substance, en somme.


Dès lors, il devient encore plus compliqué de passer outre les énormes failles scénaristiques de Batman V Superman tant le film semble se targuer d’une prétention auteurisante injustifiée. On se rappelle des déclarations de Zack Snyder, aux environs de la sortie de Man of Steel, qui prétendait que « Marvel fait des films rigolos tandis que DC fait des films importants ». Une affirmation en disant long sur les intentions défendues par le réalisateur, à mettre en rapport, non sans une pointe d’ironie délicieuse, avec l’immense capharnaüm qu’est sa dernière “œuvre”. Rappelons qu’un film de super-héros ne doit pas forcément arborer une image grisaillante et des dialogues boursouflés mais surtout offrir de la consistance pour pouvoir prétendre être “important”. Les Spider-Man de Sam Raimi par exemple, derrière leur apparence de cartoons bariolés, offraient un vrai développement de leur personnage principal et des thématiques liées au fait d’être un héros masqué.


Et qu’en est-il justement du traitement des deux héros ? Snyder continue de nous enfoncer dans le crâne que “Superman = Jésus“ avec la subtilité qu’on lui connaît, c’est-à-dire à coup de bons gros ralentis voyant notre héros incarné par Henry Cavill survolant une masse implorante ou baignant au milieu d’une foule reconnaissante, le visage tourné vers les cieux. Le rapport christique au personnage de Superman pourrait être intéressant s’il n’était pas si lourdaud, vulgaire et unilatéral. Quant à Batman, le fait de voir une version plus noire et violente que jamais du personnage incarnée par un Ben Affleck parfait pour le rôle avait de quoi mettre l’eau à la bouche. Malheureusement, si l’acteur convient plutôt bien à l’homme chauve-souris, le traitement du personnage est quant à lui aux abonnés absents. Batman semble survoler le film (sans mauvais jeu de mots), ses motivations sont troubles, ses psychoses non développées, ses apparitions dans le fameux costume peu nombreuses et pas assez emblématiques. Le film semble partir du principe que tout le monde connaît le personnage, glissant même quelques références à la mythologie du héros, pourquoi donc se borner à montrer une énième fois le meurtre des parents de Bruce Wayne ? Les origines du héros ayant déjà été racontées de bien meilleure façon successivement par Tim Burton et Christopher Nolan, difficile de voir une quelconque légitimité dans l’approche putassière et laide de Snyder.


En grand méchant donc, les scénaristes ont opté pour Lex Luthor, peut-être le vilain le plus connu de l’univers de Superman et déjà interprété à l’écran par Gene Hackman et Kevin Spacey, excusez du peu. L’approche est ici radicalement différente et a de quoi laisser perplexe. Le personnage semble écrit comme une version maladroite du Joker de Nolan, à savoir un méchant psychopathe, imprévisible et nourrissant un goût non dissimulé pour le chaos. Et parler d’une prestation en roue libre serait un euphémisme tant le jeu de Jesse Eisenberg atteint des sommets de grotesque. Complètement hystérique, l’acteur semble s’être enfilé un rail de cocaïne avant chaque prise, crie, bouge dans tous les sens de manière inconfortable, livre des lignes de dialogue étranges de manière encore plus étrange et serait sans doute nettement plus à l’aise au sein du casting du Loup de Wall Street que dans la peau d’un vilain de film de super-héros.


Difficile d’avoir un ressenti clair : la performance d’Eisenberg est catastrophique mais a le mérite de jurer au milieu d’un casting triste où tout le monde fronce constamment les sourcis d’un air sérieux, et surtout d’apporter une pointe de rire et de divertissement au sein d’un film morne et peu réjouissant. Ne nous attardons pas sur le reste des acteurs : Gal Gadot se révèle complètement transparente dans un rôle de Wonder Woman maladroitement greffé au reste, Jeremy Irons, avec toute l’admiration que l’on peut avoir pour l’acteur, ne colle absolument pas au personnage du vénérable majordome Alfred, Amy Adams est tout simplement inutile et son alchimie avec Henry Cavill frôle le zéro.


L’amateur du genre superhéroïque, perplexe devant une écriture simiesque, pourra-t-il au moins satisfaire ses rétines en profitant d’un spectacle crétinisant mais jouissif à base de joyeuse bastonnade ? Malheureusement, le film déçoit également sur cet aspect. Les scènes d’action, trop rares sur les éprouvantes deux heures et demi du film, pâtissent d’une mise en scène brouillonne et d’un montage désastreux. Difficile d’éprouver de l’intérêt pour des joutes dont on peine à distinguer les tenants et aboutissants, et ce malgré des chorégraphies plutôt sympathiques. Qu’est-il donc arrivé à Zack Snyder, dont les scènes d’action avaient autrefois le mérite d’être lisibles malgré leur esthétique tape-à-l’œil ? Même Man of Steel, qui souffrait de défauts formels semblables, avait le mérite de rendre à l’écran la brutalité des coups et le gigantisme des affrontements. Point de cela ici, même le combat final s’avère bien mollasson malgré la puissance des forces en présence. Seule consolation pour le spectateur : voir Batman malmener Superman et sa gueule d’ange, ne serait-ce que quelques brefs instants.


Inutile de s’attarder davantage sur l’esthétique globale du film, Zack Snyder semble ici tenter un compromis entre le style numérique sur-esthétisé de 300 et Watchmen et la caméra portée “Malick pour les nuls” de Man of Steel. Sans vraie personnalité visuelle mais irrémédiablement moche, le film semble consacrer l’absence de vrai talent de son auteur qui n’a semble-t-il de talent que pour calquer telles quelles des planches de comics sur écran. Inutile également de mentionner la mélasse sonore informe faisant office de bande originale, concoctée par Hans Zimmer et Junkie XL (qui aurait bien besoin de retourner bosser pour George Miller).


L’échec est donc confirmé. Maladroit, informe, déchiré entre les visions prétentieuses d’un cinéaste incompétent et les charges imposantes d’un studio avide, Batman V Superman ne remplit aucun de ses objectifs et ne parvient pas à concrétiser ses ambitions affichées. Le film essaie des choses, en cela est-il peut-être plus méritant que la moyenne des productions Marvel, mais échoue sur absolument tous les fronts et ne parvient même pas à maquiller ses visées opportunistes. Il s’agit à la fois de l’un des pires films de super-héros de ces dernières années mais également du plus mauvais Batman depuis Batman & Robin. À vous de voir si vous préférez au nanar délirant de Joel Schumacher l’imbuvable étron de Zack Snyder qui, en lieu de latex et de couleurs bariolées, n’a que de la tristesse à offrir.

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le 18 avr. 2016

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Yayap

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