Difficile de proposer le développement du succès qu’est « Battle Royale ». Le défi est de taille, à la vue des sujets sensibles dont il est question. Kinji Fukasaku le sait, mais il reste toujours méthodique dans son approche, hormis cette fois-ci. Cependant, il est d’usage de rappeler le décès prématuré du réalisateur en chef, peu de temps après le début du tournage. Cela engage bien des questions, concernant l’identité de l’œuvre. Serait-ce à son fils, Kenta, passant de scénariste à poste vacant, ou bien à l’association avec l’auteur même, Koshun Takami, que l’on doit un tel désastre ? Autant le premier volet proposait une lecture fondée sur le choc des générations, où la jeunesse violente et indisciplinée faisait face à des adultes tyranniques, et la formule était vendeuse. Autant dans ce deuxième acte, le film passe à côté de tout ce qu’il a initié…


Ce que l’on prétend défendre ici, c’est n’est rien d’autre qu’une affaire de vengeance. On aborde le thème de l’antimilitarisme, tout en dénonçant le terrorisme porté par la jeunesse, de telle façon à en oublier en quoi le Battle Royale fut créé. Tout tourne autour d’incohérences incontournables. Il est juste de les filtrer pour laisser vivre la mise en scène adoptée par le réalisateur, or de si gros débordements ne laissent que dégâts et retour négatifs derrière eux, dont on ne pourrait défendre en leur faveur. Le simple fait de conserver une île comme souche scénaristique est une erreur qui fera grogner tout spectateur venu chercher des réponses. Exit la logique et à fond les clichés sur la quête de la maturité. Des adolescents se battent de nouveau pour leur survie, mais plus au nom de la vie. Les tensions se tournent vers un groupe d’insurgés au Battle Royale et aux pratiques autoritaires.


Shuya (Tatsuya Fujiwara) devient donc leader de ces « mercenaires », dont l’objectif est l’anéantissement des adultes. Pourquoi ? L’idée est de persécuter un système et non de cibler une tranche d’âge qui possèderait un bon lot d’exceptions. Cela ne colle donc pas et l’intrigue emprunte maladroitement cette direction visant à déclarer une émancipation. Et à l’image d’un discours qui ne fonctionne pas, la quasi-totalité des personnages profitent de l’excès pour faire croire à un enjeu dramatique. Ce jeu d’acteur est souvent propre aux réalisations japonaises dont les principales références sont extraites du théâtre traditionnel, où le virtuose passe par des expressions faciales et gestuelles, parfois « cartoonesques ». En revanche, on y sacrifie le charisme de Shuya, dont les motivations résonnent comme des caprices d’enfants en manque de friandise. Ce genre de conflit intérieur aurait pu de maîtriser autrement que par la force. Les personnages manquent également de profondeur et de développement afin que l’on puisse s’identifier clairement. On reste toujours du point de vue de Shuya, sans savoir si la thématique qu’il prend plaisir à camper est acceptable. On reste confus pendant une bonne partie de la narration qui ne trouvera rien d’autre que des morts gores et gratuites, qui avaient plus de sens et d’impact dans le premier opus.


Etant donné le sinistre qui s’est abattu sur une production qui avait tant à vendre, « Battle Royale II : Requiem » devrait logiquement être isolé. Pouvons-nous parler de suite après tant d’effort ? Pourquoi pas, mais tout l’intérêt sur le résultat final ne laisse qu’un goût amer sur le joyeux qui nous était donné de voir autrefois. Les bonnes idées naissent avec clairvoyance, et la transposer sur grand écran est un exercice bien complexe. En chemin, on est amené à perdre des éléments, qui auraient pu combler le manque de développement ici. La médiatisation est laissée en arrière-plan, face à une guerre politisée dont les enjeux ne prennent guère le temps d’être assimilés.


Chaotique au plus haut point, l’excuse du nanar est à écarter, sachant les choix de réalisation bien trop sérieux pour que l’on questionne avant la production elle-même avant notre conscience. Et en fin de compte, il sera difficile de trouver un aboutissement de qualité, comme le reflète cette œuvre, chargée en bonnes intentions mais dont les propos sensibles ne rencontrent pas le traitement idéal pour vraiment exister…

Cinememories
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le 27 août 2017

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