Linklater m'avait déjà conquis avec Dazed and Confused et Everybody Wants Some ! qui avaient tous deux fait frissonner mon petit cœur de nostalgie en me faisant me souvenir d'à quel point on était de jeunes cons sympathiques lorsque nous sortions du lycée (oui j'ai déjà la nostalgie d'une époque terminée depuis seulement 6 ans, laissez moi tranquille svp). Mais s'il est bien deux genres qui me touchent à coup sûr, ce sont ceux des teenages movies et le genre choral : autant dire que ces deux-là m'avaient déjà dans la poche avant même de commencer.


Alors pour savoir si Linklater était vraiment un réal qui pourrait rentrer dans le panthéon de mes icônes, il me fallait tester autre chose : une trilogie de comédie romantique grand public ? Là ok, le genre ne m'a pas dans la poche dès le début. Impressionne moi, Rick.


Et Rick m'a impressionné. Alors certes, le contexte de visionnage joue énormément, et Before Sunrise m'a happé immédiatement parce que j'ai plus ou moins l'âge des protagonistes et qu'il m'a été très facile de m'identifier à ces personnages capables de tomber amoureux en une nuit, et qui m'ont rappelé que ce genre de choses peut arriver et qu'une rencontre, c'est avant tout une affaire de chance. Mais au-delà de ça, j'ai été saisi par la justesse incroyable des dialogues : 1h40 de discussion ininterrompue, une caméra qui ne fait rien de plus que filmer avec la plus grande sobriété deux personnes en train de marcher, assises, allongées qui causent... Et pas une seconde d'ennui. On parle, on parle, la discussion est fluide et les sujets se succèdent dans le plus grand naturel. Et on apprend à connaître nos protagonistes, si bien que nous aussi on passe la nuit avec eux. Des personnages superbement écrit, qui possèdent ces 90 % de banalité qu'on retrouve chez chaque M. ou Mme tout-le-monde et ces 10 ¨% d'originalité qui font la vraie complexité des gens.


Puis dans Before Sunset ce sont les retrouvailles. Même recette, qui m'aura un peu moins parlé pour la simple et bonne raison que ces personnages sont à une étape de vie que je connais bien moins que celle du précédent volet. Mais toujours la même richesse d'écriture, toujours aucune pointe d'ennui à l'horizon. Et la première réflexion que je me suis faite en le terminant était qu'il allait falloir que je le revoie lorsque j'aurais 10 ans de plus dans les pattes.


Enfin, dans Before Sunrise, c'est le bilan de la vie de couple. A nouveau cette justesse dans les dialogues, à nouveau cette complexité de nos personnages. On aura plus de mal cette fois-ci à leur accorder toute notre empathie parce qu'ils se connaissent désormais très bien, trop bien, et que nous avons sous les yeux le résultat de plusieurs années où se sont accumulés réalisations de rêves et épanouissements ; mais aussi rancœurs et déceptions. Nos personnages sont maintenant plus tristes parce qu'ils n'ont plus la naïveté de leurs 20 ans, parce que la beauté du souvenir de leur rencontre qu'ils avaient encore à 30 ans s'est érodée... Pour autant, ce sont toujours bien les mêmes personnages que nous avons rencontré dans ce train, deux décennies auparavant. Non, ils n'ont pas tant changé, à ceci près qu'ils ont perdus leur naïveté, et désormais ils se connaissent trop bien pour se montrer tout sucre et tout miel ; et nous aussi nous les connaissons à présent trop bien pour ne pas voir leurs nombreux défauts humains. Des personnages plus sordides donc, mais pas moins bien écrits, pas moins touchants.
Et cette ambiance donnera d'ailleurs lieu à ce qui est à mes yeux l'une des scènes de dispute de couple les plus marquantes du cinéma contemporain (et qui en termes de virtuosité m'a rappelé Marriage Story de Noah Baumbach), véritable leçon de dramaturgie.


Bref, bravo Richard. T'as bien gagné ta place dans mon panthéon personnel.

Créée

le 6 juil. 2020

Critique lue 133 fois

3 j'aime

Heobar

Écrit par

Critique lue 133 fois

3

D'autres avis sur Before Midnight

Before Midnight
Gand-Alf
7

A l'heure du bilan.

Nous avions quitté Céline et Jesse il y a grosso modo huit ans, à Paris, dans ce qui semblait être une seconde tentative pour cette fois concrétiser leur embryon d'idylle, ne plus laisser la vie les...

le 18 juin 2014

41 j'aime

4

Before Midnight
Fatpooper
10

La dispute

J'aime bien cette trilogie de l'amour. J'aime bien les films de Linklater en général, car même s'il se plante, ça reste un bel exercice de style (comme "A scanner darkly"). Ce troisième opus, est...

le 28 juil. 2013

24 j'aime

7

Before Midnight
amarie
9

P..... je le savais !!

Voici donc le 3ème et dernier volet de cette trilogie, Voici donc celui que je craignais le plus. Si je devais qualifier chacun d'entre eux avec un seul mot je dirais : - le 1er : Magie - le 2ème :...

le 27 nov. 2014

13 j'aime

4

Du même critique

Virus
Heobar
9

Critique de Virus par Heobar

Je me trouve très intrigué que ce film soit aujourd'hui tombé dans l'oubli. Pour moi, le véritable chef d'oeuvre de Fukasaku, ce ne sont pas ses films de yakuzas des années 70, ni même le cultissime...

le 5 mars 2019

9 j'aime

6

Night on Earth
Heobar
9

Critique de Night on Earth par Heobar

Qui mieux que Jarmusch pour réaliser un tel film ? Cinéaste de l'errance par excellence, il réalise ici un film qui ne cherche pas à délivrer de grand message sur la vie, mais qui cherche...

le 7 avr. 2020

7 j'aime

Drive My Car
Heobar
10

Drive My Car est un film interminable

Non pas que l'on attende avec impatience qu'il se termine, car au contraire ses 3h enveloppent le spectateur dans un songe mélancolique bouleversant dont l'on rêverait qu'il puisse s'étendre encore...

le 6 oct. 2021

6 j'aime

7