Beowulf ou l'art délicat de profaner une légende

Il fallait oser. Transposer l’épopée fondatrice de la littérature anglo-saxonne dans un univers de série Z fardé de cuir, de fumée et de ralentis grotesques. Graham Baker, en 1999, relève le défi — mais plutôt que d’élever Beowulf au rang de mythe cinématographique, il le précipite dans les tréfonds d’un nanar cyber-fantastique, aussi absurde que prétentieux. On assiste, médusé, à un carnaval de mauvais goût où l’esthétique évoque davantage une publicité pour gel capillaire que les brumes sacrées du nord médiéval.


Christopher Lambert, visiblement égaré entre deux rires sardoniques, campe un Beowulf stoïque par nécessité : toute tentative d’expression aurait sans doute trahi le vide abyssal du scénario. Les dialogues, d’une platitude presque philosophique, oscillent entre aphorismes creux et menaces de bac à sable. Quant aux combats, ils tiennent davantage du clip MTV que de l’épopée homérique.


Le film semble croire qu’un montage convulsif, une bande-son tonitruante et quelques décors lugubres suffisent à masquer son indigence narrative. Il n’en est rien. L’ennui est total, et l’on se prend à plaindre la créature elle-même, contrainte d’exister dans un monde aussi tristement ridicule. À trop vouloir moderniser la légende, Baker l’a tout simplement crucifiée sur l’autel du kitsch.

Kelemvor

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