La surprenante vertu du revisionnage (critique sur ce qui fut pour moi un chef-d'oeuvre)

NOTES D'INTENTION : Cet écrit relève plus de mon expérience personnelle sur un revisionnage plutôt qu'une réelle critique sur le film


Birdman fut mon film préféré.
Mon film préféré parce que je trouvais le concept fou, génial, et que du bout de mes 15 ans, il était la plus belle claque de ma vie.
Il donnait au gosse de 15 ans qui se cachait sous ses draps l'envie de vivre du cinéma, l'envie de créer des films. Il était pour moi le film parfait.
Six mois plus tard, je revis encore une fois Birdman sous la même couette qui avait vu naître l'éclat de génie. Ce second visionnage confirmait alors mon amour pour ce film, et je m'étais promis de le revoir chaque année, comme un talisman. Je n'ai jamais tenu cette promesse un peu naze, mais je gardais en moi cette idée de "film fétiche", celui que j'exhiberai comme le film numéro 1, que je recommanderais à tous mes amis


Aujourd'hui, en 2019, je suis en train de réaliser mes rêves les plus fous. Je prépare des études en cinéma, et les personnes avec qui je travaille deviennent peu à peu mes meilleurs amis. Je connais mieux mes goûts, et j'ai vu beaucoup trop de films en trois ans.
Aujourd'hui, je m'étais alors décidé de revoir Birdman avec mon projecteur en solitaire, comme au bon vieux temps, d'enfin revoir ma madeleine de Proust. Revoir des films longtemps après leurs premiers visionnages fut toujours bénéfique pour moi, dans le sens où cela confirmait mon amour pour tel ou tel long-métrage. Inception, Les Fils de l'Homme, Cléo de 5 à 7, Irréversible, tous ces films qui ont grandi dans ma tête sur le long terme déployaient soudainement leurs richesses devant mes yeux lors du second visionnage.


Aujourd'hui, je revoyais Birdman.


Encéphalogramme plat. Aucun frisson. Aucune grande émotion.


Alors attention, la scène d'ouverture m'a quand même remis dans le bain, la BO reste géniale : je me souvenais de toutes les fois où je l'utilisais pour mes lectures. L'humour m'amuse toujours, et je redécouvre les détails de l'histoire que j'avais oublié ou qui m'avait jusqu'alors échappé à l'époque. La réalisation reste géniale, inventive, et la performance des acteurs est parfaite.


Mais au bout d'une demi-heure, je sent que la magie n'est plus là. Pire encore, je trouve beaucoup de moments et de scènes un peu artificiels, pas très subtils, moins riches de sens. Quand le générique de fin se déroule devant moi, je ne suis pas émerveillé, joyeux, gonflé à bloc, avec la même envie de créer qui m'habitait à 15 ans. Ce que j'avais mis sur un piédestal de perfection et d'idéal à atteindre, je le vis alors se fracturer de plus en plus, avant de finalement chuter dans mon estime.


Je suis déçu, et pris d'une grande amertume.


Le constat est là : ma connaissance du cinéma s'est étendu depuis 4 ans, j'ai découvert de nouveaux auteurs depuis qui me passionnent beaucoup plus. Birdman n'arrive plus à me faire vibrer peut-être parce que je trouve de meilleurs équivalent chez les autres. Je plaçais peut-être trop d'attentes.


Birdman restera le film déclencheur de mon envie de voir du cinéma, et je pense que j'en parlerais toujours : il reste vraiment admirable, il reste une leçon de cinéma et un grand film et j'en resterais éternellement un très grand fan.


Mais je pense que ce fut nécessaire de me rendre compte de cette vérité envers moi-même.


Je pense qu'il est temps de céder la place aux autres, maintenant.

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le 14 avr. 2019

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