Blade Runner 2049 : La réplique parfaite de la SF existentialiste

Les androïdes rêvent-ils toujours de moutons électriques ? Les puristes l’attendaient avec impatience, il sort enfin au cinéma : Blade Runner 2049. Trente après la fin des aventures de Rick Deckard, Ryan Gosling fait son entrée pour le retrouver, s’approchant d’une vérité qui le dépasse. Pari réussi? Aura-t-on enfin une réponse à la question qui nous brule les lèvres depuis Blade Runner à savoir : Deckard, réplicant ou non ?


Quelques recommandations avant de voir le film


• Voir ce film c’est dès le départ, accepter de voir une œuvre anticonformiste, non formatée, loin des films que l’on voit depuis des années. En sommes, aller voir Blade Runner 2049, c’est plonger dans une œuvre différente des blockbusters habituels.
• Harrison Ford a beau figurer aux cotés de Ryan Gosling sur l’affiche, armez vous de patience. Le personnage de Deckard a beau jouer un rôle primordial dans l’histoire, c’est K le protagoniste principal.
• Si vous voulez voir cette suite, il faut avoir vu au préalable le premier opus sous peine d’être complètement largué.
• L’ambiance, l’atmosphère et la réalisation sont très spéciales. Ne soyez pas surpris de la lenteur de l’histoire, de ne voir que peu d’explosions, fusillades, punchlines, humour, et autres bombardements d’effets spéciaux. Ce n’est pas du Dc, ni du Marvel, encore moins du Jason Statham. On ne met pas son cerveau sur « off ». D’où le fait qu’il n’était pas surprenant voir de nombreuses personnes quittées le film pendant sa projection.


Fidèle à l’œuvre initiale


Une nouvelle œuvre culte des eighties fait son grand retour en cette année 2017 : Blade Runner 2049, suite de Blade Runner. Exit Ridley Scott qui officialise en tant que producteur, c’est Denis Villeuve qui aura la lourde charge de prendre le relais. Denis Villeneuve, on l’attendait vraiment au tournant. Quelle surprise, le réalisateur a tenu sa promesse de ne surtout pas dénaturer l’œuvre culte de Ridley Scott sortie en 1982 !


Avec son Blade Runner 2049, Villeneuve vous propose de vivre une nouvelle expérience cinématographique immersive aux cotés de Ryan Gosling. Créer des ponts entre Blade Runner et Blade Runner 2049, apporter des réponses à nos questions (ou tout du moins une ébauche), arriver à développer un nouveau personnage central et son histoire, tout en nous fournissant une nouvelle enquête palpitante, la tâche n’était pas aisée, mais Denis Villeneuve l’a fait.


Blade Runner 2049 a beau prendre son temps, opter pour un rythme plutôt lent et électrique, les 2h43 passent à une vitesse folle. Les musiques, la narration, le jeu des acteurs, tout est tellement si intense, qu’on est happé dans l’histoire du début jusqu’à la fin. Tout comme Blade Runner, cette suite garde approximativement le même schéma narratif que son prédécesseur notamment le bref résumé des évènements précédents, présentation de l’intrigue, du personnage principal, début d’enquête, etc.


Alors voila, dès le départ, à mesure où l’enquête prend de l’ampleur et que la première apparition d’Harrison Ford commence à peser certains fans impatients, on a cette sorte de poussée de confiance, se doutant d’emblée de l’issue de toute cette histoire. Aie, ça fait mal, où sera donc l’effet de surprise ? Avouez que ça serait trop facile ? Si vous pensez être dans cette catégorie de spectateurs ayant vus tellement de films dans leurs vies qu’ils devinent dès le départ ce qu’il se passera, attendez la suite. On croit connaitre la fin et au final, on se trompe lourdement et ce, grâces aux nombreuses fausses pistes parsemées pendant l’enquête. N’oubliez pas que Denis Villeneuve a réalisé un certain « Prisoners ».


Le troisième jour, Denis Villeneuve réinventa le thriller crépusculaire


Naviguant entre des lieux futuristes et des lieux post-apocalyptiques, cette idée nous permet de changer d’éclairage et de couleurs. Ambiance oppressante, longs moments de silence, brume, pluie, ruines, eau, sable, poussière, neige, grisaille, teintes bleutés, exploitations et paysages s’étendant à pertes de vue comme pour le film Oblivion, Blade Runner 2049 étant son univers, tout en le faisant évoluer (je rappelle que l’intrigue se situe 30 ans plus tard).


L’approche y sera toujours réaliste (bien que l’on change l’ambiance glauque et froide du premier), les véhicules volants, le mix culture Japonaise/américaine toujours d’actualité, une évolution technologique avec de nouveaux accessoires et autres gadgets High Tech, gigantesques panneaux publicitaires aux néons, hologrammes, tout fan des Retour vers le Futur 2, Minority report, Total Recall, sera aux anges . Hypnotique, métaphorique, hallucinant, d'une lenteur magnifique, on a beau se sentir perdu, on ne veut pas sortir de cette splendeur sans fin.



« Vous avez jamais assisté à un miracle ? »



Plus humain que les humains


Denis Villeneuve a su capter tout ce qui faisait le charme et l’enchantement de Blade Runner. Son aura, l’atmosphère et la philosophie cartésienne laissées par Ridley Scott et surtout Philip K.Dick. Ici, le réalisateur nous emmène dans un pur film de science fiction s’attardant sur des thématiques et autres sujets demandant aux spectateurs à s’y intéresser de très très près. Jamais Blade Runner n’avait été si philosophique et réfléchi. Tout comme le premier opus, Blade Runner 2049 aborde des thèmes existentiels, tout en nous projetant dans le futur, envisageant une technologie qui n'est pour le moment pas à notre portée.


Le transhumanisme, l’impact écologique à cause de la surpopulation, le poids de la solitude, l’importance des souvenirs (même soi-disant « fictifs »), la discrimination (les nouveaux réplicants étant injustement maltraités par les humains), la filiation, les classes sociales, les sacrifices, la création, l’amour, critique de la déshumanisation de l’être humain, la quête d’identité, tant de thèmes revenants souvent au cinéma. Voir ce film, c’est remettre tout en question. De notre comportement vis-à-vis de la nature (le film critiquant cela en nous montrant les futurs désastres à venir), notre humanité, notre style de vie, nos jugements.


Parlons musiques, l’un des points forts de cette suite. Hans Zimmer agissant dans l’ombre, certains sceptiques pensent que les mélodies et sonorités de ce film seront similaires à ce que l’on connait du compositeur. Attendez-vous à des surprises.


Comment passer après Vangelis ? Et si je vous disais que, même si le compositeur cède sa place à Benjamin Wallfisch et Hans Zimmer, même si ces derniers s’éloignent un brin du travail de Vangelis, à la sortie de la projection, vos oreilles vont vous remercier du cadeau. Mélodies mêlant curiosité, sérénité, agressivité, vertige, aspirations. Tout comme pour Prometheus qui, lors de sa sortie au cinéma, avait carrément fait bobo aux amplis de certains cinémas, Blade Runner 2049 prend le relais. Pas de plantage à prévoir mais des secousses dans la salle. Ce n’est pas un fait exprès, ca n’en demeure pas moins encore plus immersif et jouissif, décuplant les sensations que tout le reste du film nous procure déjà. La chance qu’on a !


Quand Ryan Gosling rencontrait Harrison Ford


Ryan Gosling a la lourde tache de prendre le relais laissé par Harrison Ford. Autant dire que ça va être dur de passer après la star Hollywoodienne. Ryan Gosling, on aime, on n’aime pas, on jalouse devant son corps parfait, on s’indigne parce que pour certains, il a le charisme d’une huitre. Drive avait calmé quelques détracteurs, attendez de voir ce qu’il va vous montrer dans Blade Runner 2049. Rick Deckard restera dans notre cœur, mais il y a de la place pour deux et K mérite lui aussi sa place. Son jeu peu expressif sert à son personnage censé être un réplicant obéissant, ne sachant pas ressentir d’émotions. Quel charisme, quel jeu de regard. Autant il peut faire froid dans le dos, autant il peut parvenir à nous faire verser une larmichette. Gloire à toi « bad ass » Ryan Gosling !


Quant à Harrison Ford dans tout ça, jamais il n’avait tant brillé et émeut dans un film. Encore plus fatigué que dans le premier opus, Rick Deckard montre une autre facette de sa personnalité, faisant tomber le masque, brisant sa carapace. Tout comme son personnage, Harrison Ford donne cette sensation de se livrer intimement à travers le film. Comme si le poids lourd de la célébrité, comme si cette souffrance accumulée depuis tant d’années sortait enfin. L’acteur aura beau se montrer que lors du troisième acte (soit au bout de deux heures), il reste un élément majeur de notre histoire. C’est LUI le véritable héros, LUI le personnage au centre de tout le film.


Ana de Armas. Autant elle agaçait dans Knock Knock, autant dans Blade Runner 2049, elle apporte cette petite touche d’authenticité, ce petit truc qui permet au film d'avoir une âme, de l’émotion ; tout comme l’avait apporté le personnage de Rachel dans Blade Runner 1. Jared Leto en milliardaire aveugle pervers fabricant des réplicants plus perfectionnés, obéissants, pouvant vivre indéfiniment, Robin Wright en chef de bureau capricieuse, autoritaire et sadique, Sylvia Hoeks en assistante androïde aussi superbe que violente proche du caractère de Pris (le T1000 n'a qu'à bien se tenir), en termes de casting, Blade Runner 2049 frappe un grand coup. Une suite parfaite reprenant là où l’on c’était arrêté.


Au final, coup de cœur 2017. Denis Villeneuve livre un chef d’œuvre. Blade Runner 2049 : une œuvre fascinante, hypnotique, d'une richesse et d’une puissance se faisant rare depuis ses années. Une œuvre difficile d’accès certes, mais demandant à être découverte ne serait-ce que pour sa narration, sa beauté visuelle et auditive sidérante, son mode de fonctionnement énigmatique, sa tension à son maximum, ses scènes d’action percutantes et violentes, ses mouvements majestueux de la caméra, son jeu d’acteur, ses nombreux détails, ses réflexions, son émotion. Pour ma part, c’est déjà culte.

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le 6 oct. 2017

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Jay77

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