BORN TO BE BLUE (13,2) (Robert Budreau, USA, 2016, 97min) :


Ce Biopic atypique retrace une partie infime du « James Dean » du jazz, le célèbre trompettiste Chet Baker des années 60 jusqu’à sa chute. Pour son premier long métrage visible sur nos écrans, le prolifique réalisateur canadien passionné du joueur de trompette et chanteur de jazz, après de multiples court-métrages s’attaque enfin à son mythe. D’entrée le cinéaste nous présente de façon non traditionnelle l’artiste mal en point, recroquevillé au sol d’une cellule italienne en 1964, avec un le producteur Dino De Laurentiis venant le récupérer afin de faire tourner Chet Baker dans une fiction autobiographique retraçant la vie du musicien. Le récit opte pour diverses temporalités et divers chromatiques suivant les années (noir et blanc nostalgique pour le film de fiction et couleur des années 50 aux teintes plus classiques. L’intrigue propose dans un premier temps une mise en abyme judicieuse par le biais de ce tournage fictif (puisqu’il n’a jamais eu lieu) et de flashback reflétant un personnage psychologiquement fragile atteint de dichotomie et d’une addiction certaine aux drogues. Malheureusement cette prise de liberté avec la réalité, et l’aspect improvisé qui sied si bien à l’esprit du jazz va vite rentrer dans le rang pour narrer dans les deux derniers tiers du film de façon plus chronologique le destin chaotique de Chet Baker. La mise en scène malgré une certaine élégance devient alors assez académique et relate linéairement les faits. Comme ce jour de 1966 où Chet Baker est violemment agressé en pleine rue à San Francisco par des dealers dont il leur est redevable d’une certaine somme d’argent. Le résultat de la rixe : dents cassées, mâchoires fracturées et multiples contusions au visage, imposant une impossibilité de jouer à nouveau de son instrument. Le cinéaste s’attache à montrer la longue traversée du désert et profite de cet accident pour dresser le portrait d’un homme qui se bat contre ses démons et lui-même malgré l’amour (inventé) que lui porte Jane une actrice en attente d’un premier grand rôle. Le long métrage mélange introspections, affres de la création et démontre tous les sacrifices que le musicien est prêt à faire pour revenir au premier plan, d’un douloureux et long réapprentissage de sa trompette jusqu'au retour aux enregistrements de disques, accompagné par une photographie aux allures de roman feuilleton. L’art au-dessus de tout, belle idée, mais l’ambition et l’audace de l’œuvre se situent trop souvent en dessous des intentions espérées. Néanmoins l’histoire de ce « prince du cool » seul blanc célèbre dans le domaine du jazz de l’époque s’appuie sur une véritable incarnation du personnage par un subtil Ethan Hawke absolument habité (chantant même deux titres avec l’émotion requise) et une partition musicale faisant résonner la particularité sonore légendaire de Baker de façon magistrale. Venez découvrir ou redécouvrir modestement l’aura de celui qui Born to be blue. Honnête, fragmenté et attachant.

seb2046
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le 11 janv. 2017

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