I'm afraid you're gonna have to start getting scared... immediately!

Dernier Tarantino qu’il me restait à voir, Boulevard de la mort n’est clairement pas mon préféré de son auteur. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir pas mal de bonnes idées et l’histoire est pas mal du tout. Notamment, la structure qui se veut proche du slasher, mais surtout cet effet miroir entre les deux moitiés de films, que ce soit dans le ton mais aussi la conclusion. Au point de donner l’impression d’avoir deux films d’une même saga, avec l’antagoniste en personnage principal. L’ensemble se balance très bien, chacune des parties apportant quelque chose de différent mais qui s’articule bien pour donner un tout cohérent. Et au sein de cette dualité, on retrouve deux groups d’amies qui se font un peu écho, mais qui seront les porteuses de l’intrigue.


Alors certes, il y a beaucoup de dialogues et plusieurs peuvent paraître redondants ou peu pertinent au sein de l’intrigue principale, mais ça recoupe plutôt bien l’univers de Tarantino. Certains s’étendent un peu trop, mais ils permettent justement de créer une forme de malaise pour faire avancer l’intrigue ; ou alors donnent des éléments important pour la suite. Ça crée aussi un faux rythme qui se démarque du genre du slasher, parce que du coup oui, si on peut y retrouver une certaine structure narrative, Tarantino a bien pris soin de ne pas y inscrire son intrigue. D’ailleurs, il en joue même avec les codes à l’aide de son découpage binaire. Le résultat donne une histoire intéressante, mais qui aurait certes pu être écourtée.


En revanche, ce que j’ai beaucoup moins apprécié dans le film, c’est son aspect forcé. Dans le sens où oui, Tarantino a voulu faire un hommage aux films d’exploitation d’une certaine époque, que ce soit autant dans la forme que dans le fond. Mais son principal problème, c’est qu’à trop vouloir rendre hommage/copier ; il s’est confronté à un problème majeur avec lequel il n’a pas réussi à jouer : lui-même. Dans le sens où oui, on retrouve certains effets de styles qui rappellent le grindhouse, mais le film reste pétri de la patte de Tarantino, qui est beaucoup trop obsessionnel avec le cinéma pour ne pas s’en affranchir.


Ce que j’entends par là, c’est qu’autant la narration est beaucoup trop tarantinesque pour s’en démarquer et vraiment relever du film d’exploitation ; il en est de même avec le film en général, et notamment sa photographie et sa mise en scène. Le passage au noir et blanc n’est pas anodin, de même que les défauts de pellicule ou de montage. Et à cela s’ajoute des plans et de scènes qui sont beaucoup trop bien conçus et recherchés dans la mise en scène pour s’inscrire dans un film d’exploitation. Quand ce n’est pas l’image qui est beaucoup trop nette et lisible, l’action trop fluide.


Du coup, ça crée un décalage qui fait sortir du film, parce qu’il y a un paradoxe dans la construction visuelle du récit, mais aussi un côté forcé, peu naturel, dans l’effet de style recherché ; là où c’était à l’origine purement accidentel (dans le sens où les réalisateurs ne recherchaient pas cet effet spécifiquement, c’était un aléas lié aux moyens). Ça rend le film peu organique, en décalage avec lui-même, ce que je trouve bien dommage. Car à côté, on se retrouve en effet avec des scènes d’action et des cascades haletantes et spectaculaires, comme au bon vieux temps.


Le casting est intéressant, parce qu’on ressent un peu la même chose, à savoir différentes grilles de lectures, avec des personnages stéréotypées dans la vaste variété de films d’exploitation, et d’autres qui sont plus dans une composition à part (Kurt Russel notamment, mais aussi Zoë Bell). Du coup, on se retrouve là aussi avec cette double approche, et un effet miroir entre les personnages, mais je trouve que pour le coup, ça fonctionne un peu mieux à ce niveau-là. La bande son est plutôt sympa, à l’image de ce que Tarantino fait d’habitude. Comme je le disais, les cascades sont époustouflantes, et pas aussi gores que ce qu’on a pu voir dans d’autres films du bonhomme. Les décors sont chouettes aussi.


Bref, pas vraiment convaincu sur ce film, car j’ai l’impression que Tarantino a voulu trop rendre hommage sans pour autant se démarquer de sa vision de la mise en scène, du coup je pense que ça nuit un peu à l’ensemble. Toutefois, l’action est efficace, et la structure narrative et sa conclusion sont plus que jouissives.

vive_le_ciné
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de Quentin Tarantino et Au sommaire de ce cru 2021...

Créée

le 10 oct. 2021

Critique lue 29 fois

vive_le_ciné

Écrit par

Critique lue 29 fois

D'autres avis sur Boulevard de la mort

Boulevard de la mort
Arlaim
10

Le Plan Q

"Faire plaisir au public, c'est comme faire jouir une fille. Et je sais comment m'y prendre !" Oh que oui, il sait parfaitement s'y prendre l’acrobate... Ce bijou controversé, ce soit disant raté est...

le 27 août 2013

128 j'aime

42

Boulevard de la mort
Sergent_Pepper
7

Asphalt rumble

Bien entendu, on peut considérer Death Proof comme une parenthèse dans la filmographie de Tarantino, et ne pas trop chercher, fort de notre très française politique des auteurs, à déceler puissance...

le 18 mars 2016

105 j'aime

5

Boulevard de la mort
Vnr-Herzog
4

Tarantino more

Au fil des années Tarantino est devenu un label façon A.O.C., ce n'est plus un cinéaste il est passé bien au delà de ça, il est une référence, un passage incontournable du cinéma actuel. Fort de ce...

le 24 mai 2010

96 j'aime

11

Du même critique

Sale temps à l'hôtel El Royale
vive_le_ciné
8

I’m guessing church pays as much as a keno lounge?

Je me suis régalé pendant ce film. Typiquement un thriller à énigme basée sur une ambiance comme je les aimes. Suivant plusieurs fils rouges dans un huit clos mené de main de maître, mais se...

le 23 oct. 2018

10 j'aime

2

Independence Day : Resurgence
vive_le_ciné
3

Time to kick some serious Emmerich ass

Il y a 20 ans, sortait sur nos écran un film intitulé Independence Day. Film très moyen mais extrêmement divertissant et assumant son côté pro-américain jusqu’au bout de la pellicule, il fera marque...

le 3 juil. 2016

8 j'aime

2

La Ligue des Justiciers : Dieux & Monstres
vive_le_ciné
7

Do you want save the world or do you want to rule it?

Une étonnante bonne surprise. Je m’attendais à voir quelque chose dans le genre de l’arc L’autre Terre ou en relation avec Earth-3 ; mais au final non, on a droit à une histoire complètement...

le 19 oct. 2015

8 j'aime

1