Bound commence en mosaïque improbable, d'image et d'échos d'intrigues dont on ne sait pas si elles sont passées ou présentes. Il y a des noeuds, des objets presque vivant, bouffés par le noir ou les lumières trop fortes. On finit par décoder un morceau de peau, des tatouages, des liens, des baillons, des blessures.

Et très vite, lorsqu'on entre dans l'histoire, on pense parvenir à scénariser soi-même, à lier les premières images avec la situation actuelle. Nous sommes dans un film de manipulation, et donc d'angoisse, et ce serait dommage de le faire passer pour autre chose.

Tout ce qui est "fatal" s'y retrouve, la mafia italienne, les belles brunes sulfureuses,voix nasillardes et robes noires, et puis Gina Gershon, sa veste en cuir, ses airs bravaches, les doigts qui se frôlent, les doigts qu'on coupe, les doigts qui caressent.

J'ai aimé tous ces jeux avec les objets, les corps les sons qui transitent par les toilettes, le sang et les éclaboussures de peinture, le rouge à lèvre très rouge, les contre-jour et les bières au goulot. C'est une histoire un peu hantée de spectres de prison, de tatouages : l'ambiance y est très vite, et la pression grimpe rapidement, dans ce huis-clos aux parois trop fines: la tapisserie à fleurs cache mal les coups, les blessures, le glauque, le sulfureux.

L'intrigue se tisse tout doucement, avec ces accessoires, et d'un seul coup, tous les fils se tendent en même temps. Tous les personnages se retrouvent ligotés, dans une toile dont ils ignorent l'origine, ligotés à leurs désirs, à leurs amants, à leur argent, à leurs passés, à leur Buisness, à leurs confiances. L'angoisse, la pression que chacun peut ressentir à son échelle est extrêmement sensible. Le personnage de César m'a joyeusement fasciné, dans sa capacité à sombrer et à se débattre, coûte que coûte, la prestation de l'acteur est très juste, très forte.

En bref, de beaux rebonds, pour ce jeu basé sur les trahisons, et l'espoir qu'on place dans les êtres, avec des personnages souvent imprévisibles, à force de se demander sans cesses entre quelles mains ils feraient bien de placer leurs vies, sinon les leurs? Puisque dans ce film, toutes les mains sont sales, sans exceptions. La tension ne se relâche pas, qu'à la toute fin, quand il ne reste qu'un seul lien. Et j'ai aimé la fin.
Minuitetdemi
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le 14 juin 2013

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