Un butin à la valeur inimaginable, un établissement à la sécurité réputée inviolable, un collectif de malfaiteurs au fonctions individuelles bien définies et prêts à tout pour commettre leur forfait, des obstacles toujours plus difficiles à surmonter, des coups fourrés, des solutions miraculeuses, des volte-face inattendues, des arroseurs arrosés sur fond de twists improbables... N'en jetez plus, "Way Down" est la définition même du film de casse, une sorte d'élève modèle qui en reprend absolument tous les codes établis comme s'il était lui-même un pionnier en la matière !
Sur le papier, une telle application à remplir le cahier des charges fait cependant courir un gros risque au film, celui d'offrir une variation du genre beaucoup trop familière pour un spectateur qui y est un minimum habitué, jusqu'à peut-être même évacuer le moindre effet de surprise. "Way Down" n'échappe d'ailleurs pas à la règle : en matière de rebondissements majeurs, du déroulement de ses diverses péripéties ou du rôle de chacun de ses personnages dans l'intrigue, le film ne fait pour ainsi dire que revisiter des ressorts maintes fois utilisés, qui aujourd'hui n'étonneront sans doute plus que les plus néophytes aux braquages fictifs.


Pourtant, malgré ce défaut majeur qui a priori pourrait sembler fatal au long-métrage, le condamnant presque de facto au statut de vaine redite , "Way Down" va fonctionner. Et même fonctionner admirablement bien en grande partie à la passion d'un seul homme, son chef d'orchestre, Jaume Balagueró.
Alors qu'il commençait sérieusement à tourner en rond dans le cinéma d'épouvante ("Rec 4" et "Muse" sont là pour en témoigner), le réalisateur espagnol choisit de s'en évader et va ici retrouver un second souffle inattendu, comme si la perspective de conquérir un tout nouveau genre lui faisait pousser des ailes et lui donnait une nouvelle vivacité derrière la caméra ! Finalement, ce jeune héros incarné par Freddie Highmore, surdoué en plein doute et se retrouvant contaminé par le goût du danger d'une expérience inédite, c'est aussi son metteur en scène ! La fougue du cinéaste sur ce nouveau terrain de chasse va même faire du film un hymne direct au côté passionné de ses personnages : le désir d'autre chose de son héros quant à son avenir, un magot mystérieux devenu l'objectif d'une vie de ces braqueurs improvisés (et qui parlera en plus à tous les amateurs de la saga de jeux vidéos "Uncharted"), la ferveur populaire d'une Coupe du Monde, le caractère déterminé d'un chef de la sécurité patibulaire... La soif d'aventure passionné de Balagueró déteint ainsi sur l'enchevêtrement des composantes du film et devient un moteur qui dépasse, voire transcende, tous les autres enjeux pour offrir un spectacle diablement bien rythmé, solide et divertissant.
En gros, la formule proposée n'a beau reposer que sur des ingrédients connus, elle est délivrée avec un tel enthousiasme que l'on ne peut qu'y succomber une nouvelle fois ! Et, pour la servir, si le casting n'est bien sûr pas aussi prestigieux qu'un "Ocean's Eleven" auquel le film fait un clin d'oeil ironique en ce sens, il est suffisamment malin pour se composer d'interprètes qui connaissent leurs rôles sur le bout des doigts (Freddie Highmore en jeune génie pas si naïf, la trop rare Àstrid Bergès-Frisbey en recruteuse insaisissable ou Liam Cunningham, parfait en chef/figure paternelle) pour asseoir instantanément le rôle de chacun au sein de ce gang.


Quelques grosses facilités reprendront parfois le dessus sur le caractère emballant de l'entreprise (notamment dans le dernier acte) mais elles ne parviendront jamais à gommer l'énergie enjouée qui émane de "Way Down", celle insufflée par un réalisateur manifestement heureux d'élargir son cinéma à d'autres horizons et qui s'est donné pour belle mission de nous le faire ressentir dans un divertissement de très bonne tenue. À vrai dire, on aimerait même déjà retrouver toute cette petite bande dans une potentielle suite, la preuve indéniable que cette mission est accomplie.

RedArrow
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le 31 mars 2021

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RedArrow

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