Un Shinkansen un peu bancal

J’ai eu l’occasion de prendre le Shinkansen lors d’un voyage au Japon et je confirme ce que le film laisse entrevoir : le train est très confortable, le bruit et les vibrations sont réduites au minimum et le personnel disponible. Coutume bien présente, le chef de train et ses adjoints saluent les voyageurs par une courbette à chaque sortie de wagon tout comme les chefs de quai s’inclinent au départ de la locomotive. Il y d’autres surprises pour un usager de la SNCF comme moi (la ligne Limoges-Paris pour l’essentiel) : les trains japonais sont d’une ponctualité désarmante à la minute prêt, extrêmement propres et s’arrêtent pile poil devant les portillons disposés sur le quai. Derrière les futurs passagers attendent sagement sans bousculades ni mauvaise humeur.

D’accord, tout cela est connu me direz-vous mais alors, le film ? Ah oui, le film … Et bien annoncé comme un remake haletant du film de 1975 "Shinkansen Daibakuha", soit en anglais The Bullet Train ou Super Express 109 il constitue surtout une ode à l’efficacité japonaise et au personnel de la compagnie ferroviaire East Japan Railway Co. Ses agents font preuve d’un dévouement professionnel sans faille pour préserver les voyageurs tout en permettant qu’au sein du train, les vertus de l’entraide s’épanouissent. Les politiques et les influenceurs sont un peu malmenés mais rien de vraiment définitif.

Bon mais, vous insistez, les bombes, les scènes d’action, le suspens, ça donne quoi ? Eh bien, à mon avis, ce n’est pas de ce côté-là qu’il faut aller chercher l’originalité du film. En clair ne vous attendez pas à revivre, en version japonaise, un Speed, film américain sorti en 1994 où un bus piégé ne doit pas ralentir. L’histoire propose des scènes d’action (l’amarrage par exemple de deux trains), des rebondissements, quelques explosions et une course contre la montre mais sur un mode apaisé. Il ne s’agit pas ici de prendre le spectateur à la gorge dans une noria effrénée mais de rester sur un terrain plus réaliste et pour ainsi dire technique. On est sans doute plus proche de ce qui se passerait réellement face à un attentat terroriste que dans un scénario hollywoodien. En d’autres termes le chef de train, Kazuya Takaichi, interprété par l'acteur Tsuyoshi Kusanagi incarne un héros humble et sobre. Il dégage une forme de mélancolie plutôt qu’une poussée de testostérone.

Et la fin, ça vaut le coup d’attendre plus de deux heures pour comprendre les buts du terroriste ? Je répondrais oui et non. Oui parce que les scènes finales, avant l’arrivée à Tokyo, sont bien filmées et prenantes. Non parce que le film aurait gagné à être un peu plus court, plus condensé et que les motivations du « méchant » sont vraiment tirées par les cheveux. On les découvre d’ailleurs bien avant la fin sans forcément les trouver "raccord" avec les moyens mis en œuvre.

D’ailleurs Le terroriste n’a finalement qu’une importance secondaire. Le film se concentre sur les relations humaines, les comportements collectifs, l’honneur individuel. Il reste plaisant à regarder ne serait-ce que par qu’il nous propulse dans une autre culture et une autre manière de vivre en société.