Parfaitement terrible. En résulte - au sortir de la projection - comme un goût de mort aux rats dans notre bouche asséchée... Nadine Labaki nous plonge dans la déveine et la débrouille quotidiennes de Zain, jeune garçon de petit chemin nous étant d'emblée présenté comme un criminel par la réalisatrice ; Capharnaüm dévoilera ensuite sa narration à rebours, gigantesque et suffocant flash-back tentant d'ausculter, par l'entremise d'une caméra à l'épaule purement naturaliste, les raisons d'une telle accusation.
D'un bout à l'autre Capharnaüm suit à la trace le jeune et acrimonieux Zain, pré-adolescent en totale opposition avec ses parents : enfant perdu parmi ses nombreux frères et soeurs Zain subit et assume misère, inconfort, violences, rixes, trafic de médicaments ou encore charge d'un petit garçon immigré... La réussite première du film réside dans la complexité morale des agissements du protagoniste, Nadine Labaki ne cherchant jamais à le rendre sympathique tout en essayant de comprendre ses blessures et, de fait, ses actes.
En revanche le film trouve ses limites dans un pathétisme particulièrement plombant, très efficace certes mais sans réel contrepoint. On sort du film de Nadine Labaki littéralement bouleversé, amer et heurté par une telle retranscription d'une réalité sociale que l'Occident préférerait certainement voiler par excès de bonne conscience. Voici donc un film dur, âpre et délibérément misérabiliste, interminable cri de colère contenu par un marmot duquel les parents se seraient, selon lui, simplement donné la peine d'enfanter, et rien de plus.