On a encore rien trouvé de mieux que Kipling pour faire de merveilleuses histoires initiatiques pour les gosses... Je ne sais pas pour vous mais moi, être bloqué sur un bateau de pêche pour une saison coupée du monde ça réveille le gamin qui sommeille en moi plus ou moins profondément.

Harvey est un horrible petit merdouilleux fils d'un richissime homme d'affaire qui croit que tout lui est dû. Un bienheureux concours de circonstance le mettra sur le chemin d'un homme fruste au coeur d'or pour une aventure inoubliable.

Derrière le récit initiatique efficacement mené, la vie quotidienne des pêcheurs au long cours est superbement mise en scène, ça sent le poiscaille jusqu'au bout des doigts, chaque geste, chaque vêtement respire une forme de justesse assez rare dans les fictions sur le sujet.

Pour parvenir à un aussi joli résultat, Victor Fleming aura besoin d'un tournage de près d'une année, au large de la Floride ou de la Californie, une vraie vie de troupe qui se sent à l'écran avec une affection palpable entre des acteurs au diapason des personnages bourrus par les embruns.

Si on oublie vite Melvyn Douglas, le père dépassé par le petit monstre, il n'en est rien une fois à bord, avec des jolies trognes comme on les aime, un Lionel Barrymore impériale en capitaine, un John Carradine aiguisé en fil de rasoir et surtout un Spencer Tracy inimitable.

Derrière la tignasse de Harpo et l'accent de Chico se cache Manuel, marin portugais inégalable aussi à l'aise avec une ligne qu'une vieille à roue, toujours prêt à chanter pour les étoiles et à défendre l'air de rien ce petit protégé pénible qu'il a ramassé un jour entre deux poissons plus gros.
Dans le rôle, Spencer Tracy gagnera son premier oscar et surtout l'admiration de mes oreilles pour ses interprétations musicales savoureuses.

Comme trublion insupportable de petites bouclettes à la Lord Fauntleroy, Freddie Bartholomew gagna ici ses galons d'enfant-star le plus célèbre de son temps après Shirley Temple, loin devant un Mickey Rooney qui apparait ici bien transparent à côté et qu'il retrouvera comme partenaire de nombreuses fois à l'écran.
Très vite, l'envie qui semble étreindre tous les personnages que ce sale gosse va croiser de lui foutre une torgnole ou de lui défriser la tignasse devient aussi celle du spectateur qui devra hélas ne la satisfaire que par procuration. Néanmoins, parvenir à devenir au gré des deux heures du film presque supportable est une performance qu'il faut saluer ici.

De superbes scènes de pêche, du poisson à vider, à saler, à manger, le tout sur un petit voilier charmant accompagné par des chants de marins, je ne vois vraiment pas ce qu'on pourrait trouver de plus jouissif à montrer à un gosse, moi, va falloir songer à re-populariser ce film...

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le 23 juil. 2013

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Torpenn

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