Il y a des films qui vous tiennent par la force de leur récit, d’autres par la force de leurs images, d’autres, par la force des personnages.
César et Rosalie par aucun des trois, mais c’est bien la justesse d’une peinture de la vie ; peinture c’est peut être déjà trop travestir, il faudrait parler de photographie.
L’amour libertaire est quelque chose que nous avons du mal à concevoir. Derrière l’amour se trouve l’égoïsme, la fierté. Ce n’est pas par son histoire que César et Rosalie donne à voir cette photographie mais bien par le liant qui agglomère les personnages.
J’ai affirmé que la force des personnages n’était pas au centre du film, ce n’est pas tout à fait vrai. La caricature par définition grossit les traits, mais ne nous attachons pas nous mêmes à ce que nous définissions comme notre caractère ?
Comment s’accrocher à une fresque à partir de rien ? C’est impossible, alors le point d’appui se trouve, en premier lieu, être Yves Montand. Il est amusant de voir ce personnage si sûr, si « à l’aise » se retrouver être prisonnier d’une relation. Non pas que cela apparaisse comme problématique dans le film, qui peut prétendre tout contrôler de sa vie ? Si les autres personnages sont plus faibles dans leurs caractérisations. Ce sont eux les forts qui tiennent le protagoniste dans leur poing et c’est assez plaisant à voir. L’évolution qui s’en suit s’en trouve être délectable, j’ai aimé cette incertitude, cette absence de permanence qui ne fait que décrire ce que nous vivons tous. À travers cette peinture c’est toute l’instabilité qui est représentée et la prouesse de Sautet est de nous faire rester comme les deux autres restent auprès de César (parce qu’ils l’aiment). Mais nous l’aimons aussi, d’ailleurs Rosalie nous le signifie bien quand même évoque l’amour que lui porte David. Toute la force qu’il représente n’est rien sans un cadre nécessaire qu’il trouve dans Rosalie puis David.
Il est compliqué de définir clairement ce qui nous fais rester, car l’histoire est invraisemblable, les personnages caricaturaux. Mais au-delà de tous ces faux semblants, Sautet arrive à capturer ce qui caractérise la vie même (je pense) : son instabilité, son absence de permanence qui ne tient uniquement grâce au cadre que nous nous fixons nous meme. Alors j’ai pris beaucoup de plaisir à contempler le “cadre” de César, sa tentative d’échapper au caractère éphémère et désordonné de la vie.
La place du spectateur nous donne à voir toute l’agitation du monde et je trouve que Claude Sautet nous la montre avec une justesse impressionnante.