Le chaos : effectivement, on a envie de se dire que seul lui saurait construire une telle histoire, des embrouillaminis à la fois trop faibles et trop graves pour avoir été écrits par une scénariste. Le travail de Coline Serreau est brutal et il va vite. Trop vite souvent : ce qu’elle met en œuvre, elle ne laisse aucun répit pour l’apprécier.


Mais c’est aussi un travail méthodique issu de ce genre de scripts format King James dont peu de contenu, finalement, se retrouve à l’écran, sinon un fabuleux et long flashback narré sur un passé qui reboucle avec l’introduction – on avait à peine eu le temps de s’assoir. Entretemps, on a tout le temps de faire connaissance avec des personnages qui tous, sans exceptions, font plaisir à retrouver après un temps d’absence.


On ne s’en rend pas compte, mais sous trop de promptitude à glisser de slide en slide, Serreau brosse le tableau de la famille bourgeoise, de la famille arabe, de la jeunesse, de la prostitution, de l’hôpital et de l’amour. Autant de thèmes centraux qui étaient obligés de se presser comme des sardines dans leur boîte de cent-dix minutes. Vincent Lindon du côté bourgeois, Rachida Brakni du côté arabe, et Catherine Frot dans le compromis des deux, les trois colonnes d’Hercule de cette histoire multipartite qui passe du drame qu’on connaît bien au revanchisme jouissif sans que la convalescence ne dépare au milieu – contrairement à la musique de St Germain qui est laide au mieux, déplacée au pire.


Ce côté jouissif, on le retrouve dans la saveur douce-amère de tous les personnages, une réinterprétation artistique du principe selon lequel « tout n’est jamais tout blanc ou tout noir », un aspect où une bourgeoise va trouver l’énergie d’être forte par altruisme et une prostituée de se battre pour elle-même. Cet attachement qu’on a pour des c*****ds débouche toutefois sur un traitement extrêmement moral et feelgood qui n’était pas forcément bien venu.


Quoiqu’on puisse trouver ces petits défauts à l’expérience de Chaos, c’est une merveille de casting et une histoire soignée de bout en bout sur des thèmes durs qui sonnent bien, l’épanouissement d’un talent que je n’avais pas compris dans Trois Hommes et un couffin.


Quantième Art

EowynCwper
7
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le 3 juin 2019

Critique lue 336 fois

Eowyn Cwper

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