L’alchimie du cinéma d’André de Toth repose principalement sur la simplicité d’un script qu’il assaisonne avec quelques ingrédients choisis. Visuel de grande qualité, que ce soit sur ces films en noir et blanc comme sur ceux en technicolor, de l’extraordinaire photographie de ses western, notamment celle de The Indian Fighter (La Rivière de nos Amours) et de l’enneigé Day Of The Outlaw (La Chevauchée des Bannis), tension permanente, les personnages sont tenus par une sorte d’épée de Damoclès qui leur pend au-dessus de la tête, et économie de moyens, pas d’excès, très peu de fusillades, absence d’esbroufe, et personnages racés, de Toth est un réalisateur qui anoblit la notion de série B.


Le schéma narratif de Crime Wave ne déroge pas à la règle, des gangsters, un flic stylé à qui un Sterling Hayden flegmatique et implacable, mâchouillant son cure-dent, prête sa carcasse massive, et un couple un rien propret qui va se retrouver pris entre le marteau et l’enclume. Rien de bien révolutionnaire côté scénario, mais dès le générique et cette voiture qui déambule dans un Los Angeles nocturne, on sent une tension qui va déboucher sur l’inévitable événement tragique, une fusillade brève et subite qui va servir de fil conducteur à l’intrigue. Et le jazz, le jazz, ritournelle incontournable du noir.


S’en suivra un coup de fil dans la nuit, un jeune couple au lit et la tension dramatique prend forme dans une sorte d’irrémédiable fatalisme qui va emmener les personnages au bout du bout. Quand le lieutenant Sims, au patronyme court et tranchant, apparaît à l’écran, on sent l’assurance et le côté implacable du flic à qui on ne la fait pas, chapeau vissé à la cool, chemise ouverte et cure-dent aux coins des lèvres du type qui essaye d’arrêter de fumer et qui ne va pas s’en laisser compter. Sterling Hayden, fut probablement avec Robert Ryan, l’un des plus dignes représentants du film-noir, charismatique et massif, il anticipe les futurs personnages de flics implacables à la Dirty Harry.


Tout ce beau monde ayant été définit en à peine dix petites minutes, ne reste plus qu’à le faire danser avec la grande sobriété affiliée au genre, noblesse de l’art de l’artisanat du film de gangsters américains, stylé et racé , qui inspirera les plus grands réalisateurs, de Melville dont Crimewave était l’un des films de chevets à l’incontournable Martin Scorsese qui le cite fréquemment.


Stylisation, schéma narratif simple, économie de moyen, personnages forts et tension permanente, tels sont les ingrédients d’un bon film de série B comme Best…, à la André de Toth, l’un maîtres incontestés du grand cinéma d’exploitation de studio Hollywoodien. Et Crimewave en est l’un des plus dignes exemples.

Créée

le 23 mars 2019

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