Il est des personnalités historiques que l’on aimerait connaître, du moins le côté humain plutôt que l’image que l’on voit d’elle sans arrêt. C’est le cas d’Ernesto « Che » Guevara, révolutionnaire argentin ayant combattu pour la révolution cubaine dans les années 50. Figure emblématique des mouvements révolutionnaires du monde entier, encore connu de nos jours pour sa célèbre photo. Il s’agit bien d’un personnage dont ont aimerait beaucoup découvrir l’humain qui se cache derrière cette icône. Et ces entre les mains que le réalisateur Steven Soderbergh (Ocean’s Eleven, Traffic, Erin Brockovich…) que ce projet de 4h15 divisé en deux parties (pour ne pas faire au public) a atterri. Que vaut donc cette première partie ?


Cuba, 1952. Un jeune avocat, Fidel Castro, candidat du Parti du Peuple, veut stopper le général Fulgencio Batista qui prépare un putsch. Mais l'opération échoue malgré l'aide de jeunes soldats et Castro est condamné à 2 ans de prison. Amnistié, il s'exile à Mexico en 1955. À ce moment, un certain Ernesto Guevara, jeune Argentin idéaliste, débute sa carrière politique au Guatemala. Après un complot militaire soutenu par la CIA, Guevara est obligé de se réfugier lui aussi au Mexique. Il rejoint un groupe de révolutionnaires cubains. Le 13 juillet 1955 dans un petit appartement de Mexico, Raúl Castro le présente à son frère ainé, Fidel.
Ce qui est très difficile avec le biopic, c’est d’apporter de l’intérêt à l’œuvre, de savoir raconter quelque chose que l’on ignore sur la personne que l’on ignore. Si cette première partie de Che nous fait découvrir le visage du révolutionnaire telle une personne encore bien vivante, le film n’en fait qu’un portrait quelconque. Il nous le montre comme l’internationaliste qu’il a toujours été, sans jamais vraiment creuser au plus profond de sa personne et nous faire découvrir qui était-il réellement. En somme, on ne fait qu’assister à ces décisions et actions sans jamais être étonné. Et le pire, c’est que tout cela nous est montré dans un enchaînement de séquences qui ne semblent avoir aucun lien entre elles, le tout marqué par des ellipses aussi grosses que les ambitions de cet homme. Ce qui met aussitôt le spectateur dans l’embarras, ne savant plus quoi penser de cette histoire qui, finalement, ne parait plus qu’un simple foutoir composé de scènes choisies à la va-vite pour faire un film. Sans oublier que ce dernier jongle entre la révolution menée par Castro et des périodes plus récentes du Che, assistant à des soirées américaines et autres, faisant perdre littéralement toute logique au scénario et de l’intérêt au projet. On n’y comprend plus rien, on a bien du mal à s’y retrouver et on lâche l’affaire bien trop rapidement (soit au bout d’une dizaine de minutes).

Une déception de très grosse envergure, qui se rattrape fort heureusement par quelques points. A commencer par la réalisation et la photographie de Steven Soderbergh (se faisant appelé Peter Andrews pour la photographie), qui, même si elle ne se montre pas spectaculaire et énergique, augmentant le pouvoir soporifique du scénario, n’est pas à jeter. Elle est même un exemple, surtout dans son utilisation du CinemaScope, offrant aux séquences dans la jungle cubaine toutes ces couleurs vives (vert, jaune lumineux…) pour bien insister sur l’enfer que vive ces révolutionnaires, ainsi qu’un réalisme documentaire assez bluffant. Et malgré ce montage anarchique (qui ne suit aucunement un ordre chronologique), le passage des couleurs aux images en noir et blanc se fait sans problèmes, ces dernières se montrant de toute beauté, avec l’ajout d’un filtre vieillissant pour donner un air d’images d’archives. Sans oublier l’efficacité avec laquelle le réalisateur est arrivé à mettre sur pied l’assaut final, seul moment du film qui arrive à nous réveiller, nous tenir quelques temps en haleine.

Autre point sur lequel le film peut compter : Benicio Del Toro ! L’acteur portoricain qui avait déjà été dirigé par le réalisateur dans Traffic, avec l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle à la clé, est sans conteste la personne idéale pour interpréter le Che. Déjà du point de vue physique, le comédien ayant une ressemblance assez confondante avec le véritable Guevara. Mais aussi, Del Toro possède un talent indiscutable à s’insurger dans la peau de ses personnages. Il n’y a rien d’autre à dire que Del Toro est Che Guevara, ça crève l’écran ! Effaçant de l’image chaque interprète pourtant présent dans le film, méritant sans l’ombre d’un doute son Prix d’interprétation masculine lors du 61e festival de Cannes.

Malheureusement, le constat reste assez décevant pour cette première partie. Car si la mise en scène est bonne et l’interprète excellent, Che – 1ère Partie : l’Argentin n’en reste pas moins un puissant somnifère qui n’apporte rien à la grande figure révolutionnaire argentine/cubaine, à cause d’un scénario et montage brouillons au possible, un manque de musiques qui titillent nos sens, d’intérêt et de punch flagrant ! Vu comment est lancée cette histoire, il ne faut pas attendre grand chose de la seconde partie, à moins d’un miracle.

Créée

le 21 déc. 2012

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