Tout commence sur une scène aux allures monty-pythonesques dans laquelle 3 écuyers découvrent le vieux chevalier qu'ils servaient raid mort au pied d'un arbre, son armure souillée de ses ultimes excréments.
Autant dire que cela ne présage pas vraiment ce qui va suivre dans les 2 heures que dure le film, même si cet aspect décalé, cette 'légèreté' si j'ose dire, refait surface assez régulièrement.
En réalité, "Chevalier" consiste en un mélange des genres assez surprenant, et pas toujours bien maîtrisé, la parodie y côtoie le romanesque et le rock'n'roll flirte avec les habituels violons.
La mise en scène a cette même incohérence d'ensemble, nous servant d'une part tout un tas de scènes de joute d'autant moins crédibles qu'elles sont souvent tournées au ralenti, et d'autre part un certain nombre de séquences mieux senties comme celle du bac sur la tamise.
Impossible de nier l'évidence, le film est loin d'être un chef d'oeuvre, et les erreurs sont légion pour nous le rappeler.
'Euhh, mec, t'as mis 7 !' entends-je dans le fond.
Certes. Et je m'en explique.
"Chevalier" fait partie de ces œuvres dont l'énergie positive et la valeur incontestable de certains aspects rattrape une grande partie des manques et des dérapages.
Le casting avant tout, est une réjouissance quasi-permanente.
Heath Ledger, 23 ans à l'époque, a déjà ce truc en plus, ce don de capter la caméra dans toutes les situations et cette gueule faite pour le cinéma. Cette folle intelligence de jeu aussi, qui fait qu'on y croit quelque soit la situation et quelque soit le texte.
Autour de lui, du 'so british' (Ok. Alan Tudyk est américain mais vous avez vu sa tronche !?) comme on l'aime (comme je l'aime en tout cas !). Ils jouent juste, ils sont drôles, et ils ont ce relâchement unique qui fait qu'on a la banane quand on les voit faire.
En face, Rufus Sewell (actuellement brillant dans 'The Man in the High Castle'), toujours aussi méchant et toujours aussi convaincant avec son regard vert et ses mâchoires ciselées.
Et pour finir une jeune fille noble, pétillante et irrévérencieuse qu'on voudrait croquer dedans sur chaque plan...
Toute la bande enchaîne les réjouissances et on ne tombe jamais dans la sinistrose souvent de rigueur aux deux tiers de ce genre de film, afin que le spectateur puisse être soulagé à la fin..
Toutefois, sur ce point (le casting) aussi on notera un faux pas : j'ai nommé Bérénice Béjo, toujours aussi peu investie et dramatiquement à côté de la plaque. Si discrète soit son intervention, elle arrive à faire tâche sur le rendu général. Une performance en soi..
En clair, "Chevalier" a quelque chose de brouillon mais il vaut bien plus par sa générosité qu'un bon paquet de réalisations plus 'propres'. La fraîcheur y est de mise, et l'anachronisme bien qu'assez mal manié sur la forme, est omniprésent sur le fond, dans le jeu des acteurs et dans l'ambiance qui règne tout au long du métrage.
L'ennui n'a pas sa place dans ces deux heures passées au Moyen-Âge, et au contraire, on a plaisir à voir cet univers traité autrement que via le prisme de la violence et de l'obscurantisme.
Un film de cape et d'épée, le mauvais goût en moins et la légèreté en plus.
Et la sensation salvatrice d'avoir à faire à du cinéma qui a eu la bonne idée d'oublier de se prendre au sérieux. Bingo !