Chronos
7.3
Chronos

film de Ron Fricke (1985)

Ron Fricke, c'est un peu l'exemple typique du cinéaste dont on connaît tous l’œuvre sans connaître le bonhomme lui-même, sa réputation le précède pourtant, car il n'est rien de moins que le chef op. de plusieurs films de Godfrey Reggio, dont le célébrissime Koyaanisqatsi, il est tout naturel de s'attendre à un film très similaire ici, eh bien c'est le cas en quelque sorte, à quelques détails près.


Pour commencer, que dire de ce film? Visuellement on est bien sûr au-dessus de la moyenne, c'est ce qui frappe toujours en premier, comme lorsqu'on voit Koyaanisqatsi pour la première fois, le soin apporté au cadrage, au jeu de lumières, à la qualité de la photo, on est face à un film de 1985, mais on se dit qu'il pourrait très bien avoir été tourné en 2016, ce qui constitue la marque des grandes œuvres, elles ne sont pas altérées par le temps, il s'agit bien évidemment d'un film à voir dans de bonnes conditions, si possible avec une toile, un projecteur HD et un bon système sono, pour apprécier pleinement le spectacle.


Car oui, on est dans une expérience visuelle, mais aussi auditive, comme chez Reggio, la bande-son est un outil d'une importance capitale pour accompagner le ballet incessant des images, pour illustrer la montée en crescendo tout au long du récit, un point sur lequel nous reviendrons plus tard.


Sur le plan thématique et narratif, on peut toutefois se demander ce que ce film nous apporte de plus que la trilogie Qatsi ou Baraka, du même réalisateur. Eh bien, pas grand-chose à vrai dire, mais l'intérêt n'est pas de faire une comparaison avec des œuvres qui sont de toute manières géniales, ce film n'est pas tout à fait produit dans le même ordre d'idée, notamment du fait de sa durée, plutôt courte, de 45 minutes, ici, on est vraiment dans une logique de mouvement, d'accélération, c'est un résumé court de l'histoire des peuples, comme si on suivait une ligne qui ne s'arrête jamais, qui finit par devenir un tourbillon qui emporte tout sur son passage (en ce sens, le plan final est des plus évocateurs), le montage provoque chez le spectateur une sorte de perte d'orientation après les 25 premières minutes, lorsque nous sommes confrontés aux inclinaisons vers le bas à l'intérieur de la basilique Saint-Pierre de Rome, à la tension presque écrasante, puis la libération dans la séquence «Escalator», jusqu'aux derniers plans qui sont vraiment éthérés, à la limite de la saturation.


Pour accompagner tout cela, Michael Stearns a concocté une bande-son de folie, clairement l'une des plus belles compositions électroniques jamais réalisées, et l'une des plus belles compositions tout court. Etonnant d'ailleurs qu'elle soit si peu reconnue, car il s'agit vraiment d'une BO qui avait le potentiel pour devenir un classique parmi les classiques. La pureté et la sérénité de Essence And The Ancients est parfaitement équilibrée avec la fureur de Escalator; avant la beauté minimaliste de Portraits qui précède la splendeur gigantesque de The Ride, couplé aux images, l'ensemble de cette BO produit une expérience globale qui ressemble vraiment au partage de la vision intérieure d'une personne.


Il est inutile d'en dire plus, pour résumer, on tient là une œuvre qui se révèle être bien plus qu'un simple documentaire, c'est une véritable expérience qu'il faut vivre, on nous offre pendant 45 minutes la possibilité d'arrêter le temps et de contempler notre histoire, notre monde qui bouge, et c'est une expérience que tout le monde devrait tenter.

Schwitz
8
Écrit par

Créée

le 23 oct. 2016

Critique lue 607 fois

3 j'aime

Schwitz

Écrit par

Critique lue 607 fois

3

D'autres avis sur Chronos

Chronos
Schwitz
8

Critique de Chronos par Schwitz

Ron Fricke, c'est un peu l'exemple typique du cinéaste dont on connaît tous l’œuvre sans connaître le bonhomme lui-même, sa réputation le précède pourtant, car il n'est rien de moins que le chef op...

le 23 oct. 2016

3 j'aime

Chronos
stebbins
9

Avec le Temps, tout restera...

Formes massives, telluriques, comme en dehors du Temps : merveilles du Monde archaïques irradiées d'un lumière solaire, aux abords de l'Humanité... Chronos de Ron Fricke, en un peu plus de quarante...

le 16 août 2020

2 j'aime

Chronos
Sohmsok
6

La ligne du temps

Le film commence dans un désert, où les roches semblent être d'anciennes bâtisses terriblement érodées par le temps et les éléments. Ainsi débute "Chronos". Le film déroule petit à petit la ligne du...

le 18 nov. 2021

1 j'aime

Du même critique

L'Année de tous les dangers
Schwitz
8

Critique de L'Année de tous les dangers par Schwitz

L'impuissance de l'observateur passif, et de ceux qui ne possèdent pas le pouvoir, tel est le sujet cliniquement disséqué dans ce drame à la puissance évocatrice impressionnante signé Peter Weir...

le 13 mai 2017

5 j'aime

La Foire des Ténèbres
Schwitz
7

Critique de La Foire des Ténèbres par Schwitz

Something Wicked This Way Comes est un film produit durant une période bien précise dans l’histoire de Walt Disney Pictures, située entre la fin des années 70 et le début des années 80, une période...

le 13 mai 2017

5 j'aime

1

Les zombies font du ski
Schwitz
6

Critique de Les zombies font du ski par Schwitz

A travers l'histoire, le mythe du zombie fut traité de bien des manières, que ce soit dans les romans graphiques, le jeu vidéo, le cinéma, ou encore la télévision. Si la plupart des puristes amateurs...

le 16 juil. 2017

4 j'aime

2