[Insérer ici titre d'un téléfilm érotique vu sur M6]

Mention : Long et mou

L'ahurissante couverture médiatique n'a pas été sans faire le lit du succès promis, en cours et à venir, de cet écueil. Le film est allé cueillir dans les champs fleurissants d'un roman de gare qui a fait sensation. Pas besoin de terminer la lecture de "50 nuances de Grey" pour constater qu'il ne s'agit que d'un pittoresque journal intime gonflé de niaiserie. Le récit est au départ une fanfiction basée sur l'univers de Twilight. Ce qui n'est pas surprenant.

L'adaptation ciné est d'une puérilité assommante, comme le livre. C'est en quelque sorte le propre de la comédie-romantique que d'être insignifiant. De ce point de vu le film est un maitre dans le genre. Romance à l'eau de rose autour de personnages pas mal clichés et carrément embarqués dans une histoire faussement particulière. Sous des airs libertins, "50 nuances de Grey" part d'un sujet inaccoutumé pour tenter d'insuffler une once d'originalité, loupé.

La question du sadomasochisme n'est jamais réellement traitée, ce n'est qu'un prétexte vain. Si le sujet est épineux, le propos ne l'est jamais. Ce qui n'est pas forcement un mauvais point. Pas de jugement de valeur sur la pratique sexuelle, ni même de déviance misogyne dans le propos. Les deux protagonistes sont pas très éloquents mais ils ne tombent pas complètement dans des stéréotypes.

Dire que le fameux Grey manque de charisme est bien en dessous de la réalité, c'en est affligeant. Ce n'est jamais crédible ou cohérent avec ce que ça raconte. Cela va sans dire que les nuances sont toujours attendues. Christian Grey se fait passer pour un loup, mais n'est en réalité qu'une parodie de chevalier romanesque. La contradiction énorme de ce personnage volage, et d'une bêtise absolue, plonge tout de suite la romance dans des eaux troubles. Jamie Dornan est nul, au sens le plus littéral du terme. Cependant, il n'y peut pas tout, c'est déjà un personnage inintéressant dans le bouquin.
En contraste, Anastasia est un peu plus charnue et beaucoup plus charnelle. Son répondant est plutôt charmant et probant. On croirait presque a un paradoxe voulu, qui serait de montrer un soumis qui joue les dominants et une meneuse qui se laisse asservir. Dakota Johnson est un choix très adapté (même si ça aide d'être la fille de Don Johnson). Sa prestation n'est pas remarquable, mais pas honteuse non plus. On voit en elle des airs d'Anne Hathaway. Quoiqu'il en soit elle correspond à l'image qu'on pouvait se faire d'une jeune femme mal dans sa peau et pourtant séduisante. L'actrice est d'une beauté envoutante et se met finement à nue.

Il y a pas mal de réserves positives sur ce piètre film, rajoutez-en une, l'érotisme. Ce n'est jamais vulgaire et la sensualité existe, grâce au corps sublime de Dakota Johnson. Loin d'être racoleur, "50 nuances de Grey" prend le temps d'installer la tension érotique. Au détriment de la seule scène du livre ne laissant pas insensible (le bain). Le cadrage et la lumière donnent dans le suggestif, esthétiquement c'est réussi.

Cette belle photographie est vraie pour tout le reste du film (plus que majoritaire). Le traitement de l'image du son rend une ambiance assez entrainante. On aperçoit l'inspiration venant de De Palma ou Verhoeven. Mais cela, et tout le reste, est bien loin d'être suffisant pour en faire un film passable.

La vacuité du récit nous plonge dans un ennui très profond. La première heure est déjà lourde, la seconde est un calvaire. Le faux-rythme peut vraiment être une bonne chose, quand ça sert le contenu. Ce n'est évidemment pas le cas, puis ce qu'il n'y en a aucun.

Pour donner un ordre d'idée à ceux qui ne veulent pas le voir, mais veulent s'en faire une idée...
Prenez les plus mauvaises comédies-romantiques auxquelles vous pensiez, rajoutez une bonne pincée de prétention et un peu de poudres aux yeux, retirez l'inévitable happy-end, vous y êtes.

Note : 7 / 20
adamkesher01
3
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Voilà pourquoi pirater c'est mal ! (ou pas), 2015 : Top 60 spéculatif et Carnet de bord 2015

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le 17 févr. 2015

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Adam Kesher

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