Que reste-t-il à jouer à un acteur passé 70 ans ? Les grands-pères, les pères ou les beaux-pères impossibles : Robert de Niro (Mon Beau-père et moi), Thierry Lhermitte (Ma famille t’adore déjà), Bideau, Pisier (Il reste du jambon), Balasko et Bourdon (Beaux-parents)… et…. Jane Fonda (Sa mère ou moi) ou Catherine Deneuve (Belle-Maman)… La liste est longue de ceux frappés cinématographiquement d’Alzheimer. Encore récemment Nick Nolte (Du miel plein la tête), Thierry Lhermitte (La Finale), Jean Rochefort (Floride), André Dussolier (l’excellent Cortex de Nicolas Boukhrief)… et encore Catherine Deneuve (La dernière folie de Claire Darling). Certains ne sont pas si mauvais. On ne compte non plus les acteurs frappés d’amnésies (L'Homme sans passé de Murakani,) ou les ermites, ceux qui cherchent à se faire oublier et qui finissent par oublier pourquoi (dans ce genre, le très étrange film : La Nouvelle Vie de Paul Sneijder avec Thierry Lhermitte ou La mémoire dans la peau pour rester en compagnie de ceux qui ont quelque chose à cacher). Et puis, il y a ceux qui font comme si ; ceux qui ne tendent pas l’autre joue au temps et à ses injures, les roquentins écrirait Barbey d’Aurevilly. Hasard et nécessité (plus nécessité que hasard nous susurre la rumeur), deux films, deux acteurs d’âges identiques persistent à me faire rajeunir à chacune de leur apparition. J’avais la trentaine lors de la sortie de Léon (Luc Besson, 1994), la vingtaine lors de celle de Rambo (Ted Kotcheff, 1982).


Cette histoire de tueur à gage goûtant, entre deux contrats, une retraite solitaire au bord d’un lac isolé dans le grand Nord-Américain et qu’un petit grain de sable va définitivement mettre en pétard, en rappelle d’autres. Encore récemment, Lian Neeson (67 ans et pétant le feu), dans un film intitulé (comme c’est original) : Sang Froid, nous initiait aux joies entremêlées de la neige et du deuxième amendement. Dans cold blood legacy - La mémoire du sang, Jean Reno campe son habituel personnage : hiératique, taiseux, un brin psychopathe mais bon garçon. Mi Masferrer hugolien pour la misanthropie, mi Chaykh al-Jabal pour le contact vengeur avec les hommes. L’humour de Besson en moins, un Léon vieilli mais encore alerte exécutant de main de Maître un contrat entre deux séances de pêches blanches (pêche dans la glace). Le scénario ménage Jean Reno et il ne faudra pas attendre des scènes d’action époustouflantes. Sun Tzu ne conseillait-il pas : Sois subtil jusqu’à l’invisible; sois mystérieux jusqu’à l’inaudible; alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires. Et puis, l’autre avantage de la neige, c’est que même les gamins y courent moins vite.


Du cinéaste Frédéric Petitjean, on apprend avec surprise qu’il est scénariste et écrivain notamment d’une saga de magiciens écolos ayant pour titre Les Dolces. Il a également participé au scénario du film de Christophe Offenstein : En solitaire. Son scénario particulièrement compliqué (mais c’est la loi du genre), suit les trajectoires d’une jeune femme accidentée et pas réellement perdue, deux flics opiniâtres, un tueur lancé à la poursuite de la jeune femme et un loup. Tous les personnages et le loup vont se retrouver dans le jardin de l’irascible solitaire. Où faut-il donc se planquer pour avoir la paix. Je lis çà et là que Cold Blood Legacy est un nanar. Sans doute mais Reno en a tourné d’autres. Adoucissons la sentence et plaidons pour un honnête film de genre, un polar de série B. J’ai eu du plaisir à retrouver un vieil ami en espérant qu’il ne me laissera pas sans nouvelle trop longtemps et que je ne devrai pas rester sur cette impression de film sans surprise. La même histroire servie par un acteur inconnu aurait sans doute fait l'objet d'une simple sortie Internet. Malgré cela, j’attends avec impatiente la visite de John Rambo. A nos âges, les visites sont si rares.

Lissagaray
8
Écrit par

Créée

le 27 sept. 2019

Critique lue 1.8K fois

2 j'aime

2 commentaires

Lissagaray

Écrit par

Critique lue 1.8K fois

2
2

D'autres avis sur Cold Blood Legacy - La mémoire du sang

Cold Blood Legacy - La mémoire du sang
RAF43
2

"Après le ''Grand bleu'' voici le ''Grand vide'' !''

Comme un prolongement de “Léon”, Jean Reno est Henry, un as de la gâchette vieillissant, un tueur à gages en bout de course (l’acteur aussi d’ailleurs), venu se mettre au vert, enfin plutôt au blanc...

le 25 sept. 2019

8 j'aime

Cold Blood Legacy - La mémoire du sang
pierrick_D_
4

Critique de Cold Blood Legacy - La mémoire du sang par pierrick_D_

Une fille se viande en motoneige dans les montagnes désertiques de l'état de Washington.Gravement blessée,elle est recueillie par un ermite pas commode habitant une bicoque isolée de la région.En...

le 2 mars 2022

6 j'aime

6

Du même critique

All Is True
Lissagaray
8

Shakespeare, le retour !

Ainsi, adieu même au peu de bien que vous me voulez ! Adieu, un long adieu à toutes mes grandeurs ! Voilà la destinée de l’homme : aujourd’hui, il déploie les tendres feuilles de l’espérance ;...

le 1 sept. 2019

7 j'aime

3

Le Daim
Lissagaray
8

Non mais franges(ment), ils exagèrent !

Georges, la quarantaine, plaque tout du jour au lendemain pour s'acheter la veste à franges 100% daim de ses rêves : Lui dirait blouson. L’achat lui coûte toutes les économies du couple. Une...

le 5 juil. 2019

4 j'aime

3

Rain Dogs
Lissagaray
10

Everywhere nowhere

Dans la veine inspirée de Blue Valentine (1978) et de sa vision hypnotique de Somewhere ( en lieu et place du sucrissime tube de Leonard Bernstein / Stephen Sondheim) et à la suite de la légendaire...

le 27 févr. 2019

3 j'aime