Le Transporteur.

Une nuit qui commençait comme les autres...

C'était sans compter cette rencontre fortuite, cet évènement insignifiant qui n'est passé qu'à peu de chose de ne pas se produire.

Mais Vincent va rencontrer Max et plus rien ne sera désormais pareil.

D'aucun trouveront cette histoire niaise ou avec un arrière goût un peu trop classique.
Je ne suis pas de ceux-là.

Au contraire, il s'agit pour moi d'un face à face d'anthologie qui a largement su s'émanciper de ses pères.
Deux personnages antagonistes qui s'affrontent tout en étant forcés de collaborer. D'un côté un tueur à gage soigné et cynique, sans exubérances, ni un Tyler Durden ni un Franck Martin (Le Transporteur) mais un peu des deux, extrêmement bien campé par un Tom Cruise au mieux de sa forme (sans être particulièrement fan, on est bien forcé d'avouer que quand il s'en donne la peine et qu'il est bien dirigé, ce type est bon. Très bon.) et qui, considérant que le monde est une jungle, agit comme un loup pour ne pas subir le système.
De l'autre côté, Max, un petit bonhomme sans histoire qui lui s'y perd, dans cette jungle. Bercé d'ambitions illusoires, il fait taxi juste "en attendant" pour gagner des sous et pouvoir partir un jour vivre sous les cocotiers. D'ailleurs, comme une preuve de son avenir fantasmé, il garde toujours dans sa voiture une image des Maldives. Cette vie banale d'un mec banal pour être celle de n'importe qui, ce qui nous ramène à la sempiternelle question : et vous qu'auriez-vous fait à sa place ?
Quand un type que vous ne connaissez pas mais qui a tout l'air de quelqu'un de "bien comme il faut" liquide un autre type que vous ne connaissez pas non plus et vous force à le conduire là où il pourra tuer d'autres types que vous ne connaîtrez pas mieux ?
Ce duel-collaboration est mis en profondeur par le combat intérieur que se livre Max pour savoir que faire et par les deux facettes de Vincent : homme calme, doux et presque attentionné mais qui tue car c'est ce qu'il est : un tueur.

Par cette situation absurde, insensée, par le changement qu'elle opère chez Max (plus qu'une évolution, cela apparaît comme un réveil de quelque chose qu'il avait en lui), par le bombardement de questionnement et d'interrogations qu'elle engendre, donne à ce face à face entre deux personnages absolument pas stéréotypés, une dimension tragique quasi universelle.
Et encore une fois, Michael Mann sais nous plonger dans un monde onirique, nocturne, avec une caméra toujours bien placée et intelligemment maniée, une bande-son venu d'un univers urbano-fantastique qui n'appartient qu'à lui, des dialogues dont on ne peut pas imaginer qu'ils aient pu être différents et un casting de premier choix.

Bref, Collatéral est une oeuvre profonde, ingénieuse, que l'on prend plaisir à regarder, qui n'est pas avare en action mais qui nous interroge sur le rôle du destin et sur notre rôle à nous, dans notre monde et dans notre propre vie.

Un film comme on aimerais en voir plus à l'heure actuelle.