Le grand mérite de "Colors" repose sur sa date de sortie, qui en fait un jalon historique dans la représentation du ghetto de Los Angeles. Le propos du réalisateur Dennis Hopper apparaît d'autant plus pertinent que son film est antérieur aux fameuses émeutes survenues en 1992.
Avant "Do the right thing", "Boy'z in the hood" et la vague de hood movies qui déferla au début des années 90, "Colors" posait un diagnostic perspicace sur la situation des banlieues défavorisées de LA, minées par le chômage et la misère, mais aussi par le trafic de drogue et les gangs.


Ces bandes organisées de jeunes délinquants, partageant la même culture et les mêmes couleurs (d'où le titre du film), s'affrontent violemment au beau milieu du ghetto ("bloods" contre "crips"), provoquant régulièrement la mort d'honnêtes citoyens victimes de balles perdues.
"Colors" montre bien la diversité des points de vue, donnant la parole à chacun, à l'image de ce conseil de quartier qui dégénère sous le regard amusé des flics.


Sous ses apparences de buddy movie, construit autour d'un duo de flics antagonistes (le vieux sage et le jeune loup), "Colors" n'est pas un polar d'action traditionnel, jouant plutôt la carte de la chronique sociale, notamment dans sa première heure.
Le film se révèle toutefois assez inégal, Dennis Hooper s'efforçant de combiner les deux approches, parfois maladroitement.


On constate en outre des disparités formelles d'une scène à l'autre, parfois au sein de la même séquence : par exemple, dans l'avant-dernière scène, un plan peu inspiré sur notre héros allongé avec une tache de "confiture" sur le poitrail, est immédiatement suivi d'un superbe mouvement de caméra portée, nous dévoilant la situation d'ensemble en vue aérienne.
Au rayon des défauts, signalons encore une représentation un brin folklorique des jeunes gangsters, accentuée par un ou deux seconds rôles peu crédibles (cf le rouquin).


Quoi qu'il en soit, Dennis Hopper réussit son retour à Hollywood après une période de vaches maigres, avec ce polar urbain parvenant à mixer violence sèche et regard social pertinent, et proposant des personnages complexes souvent éloignés des clichés (cf le petit rôle remarquable de Maria Conchita Alonso).

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le 12 déc. 2020

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Val_Cancun

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