Kikoo-fans de Twilight, trembleeeeeez!

Prolifique ces temps-ci l'ami David Cronenberg. Après A dangerous method sorti dans nos salles obscures en décembre 2011, Cosmopolis est sorti en France le 25 mai dernier et faisait partie de la sélection de la Croisette cette année. Ce qui avait le plus surpris lors de l'annonce du film c'était la présence en tête d'affiche de... Robert Pattinson, alias le vampire à la peau brillante et au regard trOw dark qui a fait fondre bon nombre de pucelles hystériques à travers le monde. De quoi nourrir des inquiétudes à priori mais quand on connaît la qualité du cinéaste derrière ce projet, on pouvait quand même s'attendre à un film ambitieux, voire à du très très lourd. Et la parution de la bande-annonce m'aura bien mis l'eau à la bouche mais depuis celle de The Artist l'an dernier, je me méfie désormais de toutes les bandes-annonces. Cependant vu le niveau pas très folichon des sorties de l'année 2012, ce nouveau Cronenberg suscitait en moi beaucoup d'attentes. Finalement qu'en est-il de Cosmopolis?



Une chose est certaine, la bande-annonce est plutôt mensongère. On aurait pu s'attendre à un film très violent, il n'en est rien. Cosmopolis est au contraire un film très calme. Je tiens donc tout d'abord à adresser un big up aux personnes qui ont contribué à la campagne marketing car c'est du beau boulot. Un peu comme la bande-annonce de Drive qui a (malheureusement ou heureusement?) rameuté un peu trop de fanatiques de Fast and Furious qui, savoir-vivre oblige, ont su exprimer leur mécontentement lors de la séance par des grognements excessifs.
Cosmopolis nous raconte l'histoire d'un golden boy milliardaire qui veut à tout prix traverser New York en ébullition pour aller chez le coiffeur. Oui oui, un synopsis qui ne vend pas énormément de rêve à première vue et qui semble léger pour tenir 1h50 de film. Mais bien entendu, ce film ne raconte pas que ça (sinon je vous avouerais que je serais parti en courant au bout de 20 minutes si c'était le cas).

En fait, Cosmopolis s'avère être un film délicat et très spécial dôté d'une ambiance tout aussi étrange que captivante. Le cadre du film a lieu à New York comme je l'ai dit précédemment à l'heure où le capitalisme s'écroule avec une forte chute du cours du Yuan, ce qui est sur le point de ruiner notre jeune milliardaire beau gosse.
La visite du président dans la ville, le cortège funéraire d'une star de la musique et des émeutes anti-capitalisme bloquent le trafic et Robert Pattinson dans sa limousine traverse très lentement ce paysage urbain complètement chamboulé, obsédé par sa volonté d'avoir une nouvelle coupe dans un salon de coiffure en particulier. Progressivement on glisse dans une atmosphère étrange, quasiment apocalyptique que l'on observe depuis l'intérieur de la limousine de Pattinson de laquelle on entendra que des tumultes etouffés et dans laquelle on baigne dans un calme relatif, un calme de façade.

La majorité de l'action se déroulera d'ailleurs dans cette limousine, faisant de Cosmopolis un film qui flirte avec le huis-clos sans pour autant délaisser les scènes extérieures. Le scénario se déroule sur un rythme pourtant très posé. La limousine avance et au fur et à mesure de son avancée, de nouveaux personnages apparaissent le temps d'une scène pour s'éclipser ensuite.
Le film comporte un très grand nombre de dialogues tantôt plutôt philosophiques tantôt complètement décalés. En fait je dirais que tout ce qui est dit dans le film n'est pas forcément à prendre en sérieux, Cosmopolis tend davantage vers une forme d'absurde que de réalisme bien que le livre dont le film a été adapté semble visionnaire (l'ouvrage a été publié avant l'éclosion de la crise actuelle). Le film est presque un délire limite, le protagoniste principal perd des millions durant chaque minute qui s'écoule et ne reste obsédé que par une chose: sa future coupe de cheveux. C'est un personnage complètement détaché de la réalité de ce monde qui semble perdre tout ses repères et tout son sens.



Le film, bien qu'absurde dans son déroulement, ne semble tout de même pas entièrement gratuit, il y a une critique de fond attaquant le capitalisme dont le personnage de Pattinson semble être ici une sorte de personnification. Il n'assiste pas seulement à sa perte, il en est surtout le propre acteur. Et sans trop en dévoiler sur le film, on voit qu'à un moment donné il bascule tout autant que l'économie. Il y a matière à interpréter dans un film qui me semble très dense, un peu trop peut-être.
Je reproche au film d'être vraiment trop bavard, surtout au niveau de la séquence finale qui fait retomber l'intensité bien que la toute fin soit très réussie et prenante. J'ai ressenti quelques moments de flottement qui m'ont peut-être fait sortir du film à de rares reprises, je n'ai pas été envoûté du début à la fin mais dans sa globalité, Cosmopolis a su me captiver.

Surtout que Cronenberg sait rendre ses films captivants. Outre son découpage minutieux, il sait instaurer cette forme de chaos grâce à sa mise en scène très réfléchie en plus d'être de toute beauté. Quelques plans magnifiques, de beaux mouvements de caméra qui scrutent les décors et personnages en plus d'une photographie bien léchée, il n'y a pas à dire, visuellement ce film déboîte! Cosmopolis bénéficie d'une esthétique d'un très grand niveau.
Et le casting n'est pas en reste. Robert Pattinson montre qu'il sait interpréter autre chose que le beau gosse mono-expressif au regard trOw dark qui éveille les hormones de Cindy, 12 ans, fière collégienne arborant fièrement 9 posters de Twilight sur les murs de sa chambre et espèrant secrètement perdre sa virginité dans un bunga bunga avec le beau Robert, Taylor Lautner et Orlando Bloom en guest-star dans un monde rempli de poneys et de licornes.
On notera la petite french touch du film avec les apparitions de Juliette Binoche et de Mathieu Amalric le temps de deux séquences marquantes. Kévin Durand et Paul Giamatti rendent également de bonnes copies, sans oublier Sarah Gadon qui interprète l'épouse de Pattinson et qui est juste magni... Wait for it... fique!

En conclusion nous tenons là une oeuvre atypique avec quelques défauts notamment concernant de rares parties dialoguées ayant quelques problèmes de rythme mais dans sa globalité c'est un film de qualité. Intriguant, tout à fait captivant et très beau visuellement, le dernier Cronenberg fait preuve d'ambition et se révèle assez marquant.
Par contre il est vrai que Cosmopolis n'est pas très accessible et j'aurais payé cher pour voir la tête des pucelles hystériques mentionnées dans l'introduction venues exprès pour Pattinson lors des projections du film. Cronenberg aura fait mieux à mon sens mais ce film mérite tout de même le coup d'oeil. En attendant un nouveau film plus viscéral comme il nous en aura fait dans le passé, l'ami canadien a plutôt réussi son coup. Et espérons que Pattinson poursuive dans cette voie, il a du talent à revendre quand il est bien entouré.
Moorhuhn
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le 13 juil. 2012

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Moorhuhn

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