Les adeptes du cinéma de Kiyoshi se demanderont comment classer CREEPY. Il faut dire que le réalisateur a abandonné le thriller depuis belle lurette, et fait du film de fantôme son dada depuis quelques temps déjà. Ainsi le récent LA CHAMBRE NOIRE avait quelque chose d'étrange comparé au reste de sa filmo et paraissait être un film à la volonté de s'encré dans le cinéma d'auteur français, et au classissisme sans vraiment y parvenir. A ce titre, CREEPY est tout autant étrange, car, il y a toujours une atmosphère très proche de celle développées dans ses films de fantômes excepté qu'ici, il n'y a aucun fantômes si ce n'est, les démons intérieurs des personnages. Plus étrange encore, le film explore la piste de la paranoïa, en mode mon voisin le tueur, mais casse finalement cette piste en cours de route pour transformer un film d'ambiance et de peur en film de tueur en série et d'affrontement plutôt classique de flic et de tueur. Mais cette hybridation ou batardise, comme on préféra l'appeler est en fait une sorte de mariage étrange entre le cinéma d'angoisse Hitchcockien, classique, et le film de tueur en série coréen. Un mariage qui paraît couler de source au vu de sa filmo récente, et qui de plus est plutôt réussit contre toute attente.
Parce que quoi qu'on en dise, Kiyoshi est un bon réalisateur, maîtrisant sa mise en scène et surtout soignant ses ambiances, c'est un réalisateur qui s'attache aux abîmes de l'âme humaine, et à ses troubles psychiques. Ici il délaisse les fantômes pour s'attaquer aux démons intérieurs. Notre ancien policier est obsédé par l'affaire ayant mis fin à sa carrière au point de délaisser sa femme et son foyer afin de reconquérir son honneur perdu, un honneur professionnel mais qui semble évident quand on sait à quel point le réalisateur est attaché à la société dont il est issu et à ses codes (comme le démontre KAÏRO). Face à lui s'oppose un tueur qui tient plus du manipulateur que du tueur en série classique. Afin de l'affronter, notre héros devra descendre aux enfers et se confronter à ses propres erreurs. Finalement, cela classe le film dans une piste sombre et sanglante proche de celle du SILENCE DES AGNEAUX auquel on pourrait y trouver quelques références à commencer par la trappe menant à une fosse aisément accessible. Tout dans le film est sujet à caution et trompeur, des pistes lancées à celles pourchassées, on ne sait jamais si cela est réel ou dans la tête du héros, ainsi c'est une construction très identique à celle de ROSEMARY'S BABY, encore un film d'horreur classique. Ainsi, on comprend que le cinéaste cherche à s'inscrire dans un cinéma classique tout en y apportant sa touche. Les longueurs qui permettent de donner une pesanteur, et d'installer son atmosphère mais aussi de donner vie aux personnages et de les laisser s'exprimer dans ces longueurs et donne tout son génie à son cinéma.