Si Cruising a été si mal reçu à sa sortie c’est évidemment à cause de sa violence physique, mais c’est surtout à cause de sa violence morale, mentale même. Les corps sont mis à rude épreuve dans Cruising, pourtant ce n’est rien à coté l’indécision qui parcoure le film, jamais Friedkin ne lève le mystère, ça pourrait paraitre gênant dans un thriller de ne jamais savoir réellement ce qui se passe, c’est tout l’inverse qui se produit. On n’a aucun renseignement de temporalité, les ellipses sont incertaines, on nous cache parfois même le développement de l’intrigue, finalement le seul curseur c’est Pacino, il faut le voir se décomposer, voir les deux forces qui le tire et l’éloigne du milieu dans lequel il vit depuis un moment. On sent que ce jeux de dupes le détruit, il ne peut plus toucher sa copine, peut être même est attiré par l’autre bord, il y a cette sensation étrange de le voir perdre pied et nous avec. Mais attention malgré cela Friedkin est un homme attaché au genre, il n’oublie donc pas de nous faire en premier lieu un thriller passionnant, terrible et inédit, cette plongée dans le milieu SM gay étant évidemment une première qui lui vaudra les foudres de la communauté en question. Un thriller donc, qui dès sa première séquence tendu et angoissante prend à la gorge pour ne plus nous lâcher, chaque fois que Pacino descend les marches du club, c’est en apnée que l’on suit son enquête, lui qui souhaite obtenir une promotion à l’issu de cette dernière. Pourtant il demandera à son supérieur d’arrêter, il ne peut plus, il ne se sent pas de taille a résister à un univers qui n’est pas le sien, un univers qu’il n’imaginait même pas. Et même quand il rentre chez lui après que l’enquête soit peut être résolut, il ôte ses vêtements de cuir, ses lunettes noires, se rase comme s’il voulait repartir de zéro, faire peau neuve, se laver de ce qu’il avait vécu, mais son regard dans la glace qu’il nous renvoi ne le trompe même pas lui-même, quelque chose s’est perdue.
La violence la plus terrible hantera cet homme pour toujours.
Biniou

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