Véritable peinture de son époque, Danish Girl entend mettre en scène un sujet toujours autant d'actualité de nos jours mais bien rarement abordé. Le défi étant de représenter l'histoire de la toute première personne transsexuelle dans un cadre des années 30.


On rejoint Einer et Gerda, couple de peintres, le premier au succès modéré ne dépassant pas les frontières du Danemark, la seconde en quête d'inspiration et cherchant sa place dans le monde machiste des artistes. Ils forment un couple heureux et complice. Tellement complice qu' Einer accepte de se travestir pour la première fois afin de servir de modèle à son épouse qui cherche à s'extirper du manque d'inspiration dont elle souffre. Cet évènement va complètement bouleverser la dynamique du couple et sera la première pierre posée concernant la quête identitaire non seulement d'Einer mais aussi de son épouse.


Le travestissement dépasse alors peu à peu les limites de l'atelier, poussé dans un esprit de "jeu" par Gerda, Einer se voit contraint d'endosser le rôle de "Lili" lors d'une soirée mondaine. Il se plait alors a jouer les dames du monde, d'abord dans la timidité du débutant puis fini par exceller "comme une grande" de par la gestuelle, la voix... Einer n'est plus, Lili est née et prend définitivement possession des lieux et du corps du mari de Gerda.


Le film trouve sa justesse en la performance inoubliable d'Eddie Redmayne, bluffant et criant de vérité, ce visage androgyne charme sous tous les angles, Lili est d'ailleurs au final plus convaincante que le banal Einer. Le film souhaite surfer sur un sujet sulfureux à une époque ou il est inexistant et tout simplement tabou. C'est un challenge de taille, qui malheureusement ne tient pas ses promesses. La place du sujet est souvent traité de manière trop lisse, l'entourage tout entier (sous couvert de faire partie d'un univers d'artistes) accepte sans trop sourciller la transformation d'Einer, rendant ainsi les personnages secondaires anecdotiques.


Le thème du rejet et du regard de la société est vaguement exprimé par l'intervention de nombreux psychiatres traitant le sujet tel une déviance ou par une agression homophobe un peu facile (il fallait bien caler cette scène). Lili en devient alors presque fade et inutile à la cause LGBT. De fait, la lumière se tourne pleinement vers Gerda.
En effet le film se centre au final bien plus sur sa manière à elle de gérer la crise identitaire de son mari. A de nombreuses reprises elle endosse le rôle à la fois d'époux et d'épouse en portant la culotte et de par son tempérament de feu (au final Einer n'est peut être pas le seul à se travestir métaphoriquement parlant?) et accompagne son cher et tendre devenu peu à peu "sa meilleure amie"?


Finalement la "danish girl" c'est bien elle, et l'actrice prenant alors les plein pouvoirs excelle. A tel point que le véritable sujet, qui aurait pu/du être une espèce d'étendard LGBT, s'éclipse peu à peu pour sombrer parfois vers des longueurs inutiles et des scènes dignes de romans pour jeunes filles (dédicace pour le personnage d'Hans, incarnation du gentleman "viril" tel qu'il doit être perçu pour l'époque... et encore de nos jours ?).


Le spectateur se détache donc lentement de Lili, sans arriver à créer de lien tenace, a tel point que jusqu'au dénouement final l'émotion flotte sans jamais nous atteindre.


On retiendra pour finir une photographie magnifique, fleurtant souvent avec la beauté d'une toile de peinture sans jamais pour autant arriver à faire du film un "chef d'oeuvre".

FlorentGlémet
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le 27 janv. 2016

Critique lue 335 fois

Florent Glémet

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