"On ne ment pas, mais on ne tombe pas dans la vérité"

Tellement d’écho pour un rond-point dans une tête, une phrase typiquement Algérienne, d’un film qui s’annonce Algérien, avec une mentalité d’ALGERIEN.
C’est bien l’annonce faite pour ce film qui traite d’un certain malaise sociale, le public est là, la salle est archi-complète, l’excitation est à son comble, que de bons mots de la part de ses partisans, de belles louanges, que du positif, et c’est ce qui m’a et nous a poussé à venir voir le film pour ceux qui comme ne le connaissent pas.
Donc, comme prévu, il ne m’a pas fallu longtemps pour remarquer l’originalité et non pas « la » mais « les » particularités du film, à la fois tragique, humoristique, documentariste, social, politique, psychologique, philosophique et religieux.
Un film riche en messages et en idées, il nous rapporte la détresse de la jeunesse Algérienne, la misère psychologique de l’Algérien lambda, la folie dans sa sagesse, la sagesse dans sa folie, je vais me concentrer dans cette critique sur les points suivants :
1) Le côté esthétique :
Le film utilise une certaine formation de saturation de couleur, à travers des séquences on peut constater un surplus de rouge, de violet, de bleu, ce qui donne au film un côté artistique très raffiné, mêlant le rôle psychologique que peut avoir une couleur sur l’appréciation d’une œuvre, et l’accentuation du message à travers la couleur, comme on peut le constater avec le rouge tout à travers du film.
2) La présence de la femme dans son absence :
Ce qui est très intriguant avec le film, et assez intéressant aussi, c’est la souffrance corporelle et sexuelle des jeunes ou des moins jeunes dans un abattoir, un lieu qui manque cruellement de femmes, et pourtant, on entend parler d’elle, que ce soit à travers le téléphone, ou les discussions perverses ou romantiques des jeunes sur la femme et l’amour et le mariage ; ELLE est là, à croire qu’elle occupe et préoccupe principalement toute la gente masculine.
3) Le courage de la réalisation et le dialogue des acteurs :
Alors, nous sommes nombreux à croire qu’il n’y a pas de liberté en Algérie, qu’elle soit artistique ou politique, mais le fait est que non, il y’a une liberté, il y’a un engagement profond de la part de certains artistes, ce qu’il manque c’est le COURAGE !!!
C’est ce dont monsieur Hassan Ferhani nous a démontré dans son film, beaucoup de courage en rapportant le dialogue cru et courageux de jeunes qui critiquent ouvertement l’état, sa politique, sa gestion, ses institutions, un appel même à la révolte a été lancé de la part du « Kabyle » (On ne sait pas si c’est parce qu’il est Kabyle que dans le film il encouragé la révolte ou bien que ce soit une coïncidence ; Comme je l’ai rapporté en haut, il y’a énormément de messages cachés et minutieusement dissimulé)
4) La vulgarité dans le dialogue :
Nous avons été nombreux à être momentanément choqué par la crudité et la vulgarité présente dans les dialogues, mais le choc est devenue bien vite : Des félicitations.
EN effet, aujourd’hui, la question sur l’authenticité des dialogues dans une œuvre littéraire ou cinématographique fait polémique, tandis que les éditeurs et producteurs censurent le dialogue purement « Algérien » ces jeunes réalisateurs et écrivains militent pour pouvoir écrire dans un livre ou dans un scénario un dialogue 100% Algérien, loin de l’arabe classique ou de la francophonie hégémonique et perverse. Fi Rassi rond-point est un appel, et un des premiers pas vers des œuvres 100% Algériennes
Et puis, évidemment, on ne peut pas outrepasser la vulgarité du dialogue Algérien, c’est une vérité, il ne faut pas se la cacher, nos dialogues sont vulgaires, crus, ce n’est pas forcément une « mauvaise éducation » que de parler vulgairement, bien au contraire, tous les Algériens sont vulgaires dans leurs discussions entre amis, c’est une vérité, et qu’on puisse dire que c’est l’éducation, la morale et l’éthique qui sont en détresse et que ça se détériore, je ne le pense pas, la vulgarité n’est pas un facteur d’éducation, de morale ou d’éthique.
5) Le documentaire sur l’abattoir :
Que le film soit engagé, philosophique dans ses parties, dramatique dans d’autres, cela ne nous désorientera pas d’un autre côté du film, l’abattoir, avec sa gestion salle, la saleté de ses employés, le manque cruel d’hygiène, à croire que ce que l’on mange n’est pas du tout sain, ce qui devrait relancer le dialogue de santé et d’hygiène en Algérie.
6) La détresse d’une jeunesse perdue :
Je résumerai cette partie en quelques point, du moins les quelques phrases dites par l’un des protagonistes du film : « En Algérie il n’y a que trois solutions : Le suicide, la dépression ou l’immigration clandestine (El Harga) »
7) Le mariage entre drame et humour :
L’une de ses particularités est justement le fait de mêler le drame avec de l’humour, ça nous fait rire, nous les Algériens, parce que nous comprenons la profondeur du dialogue, chose que ne comprendra aucun étranger.
Ecouter ces jeunes parler de sujets délicats ou banals, que ce soit l’amour ou la politique, ou bien voir le vieux monsieur arranger la paraoble, cela nous fait rire, parce que nous rions de nous-même, nous vivons cette misère psychologique et sociale, et cela produit en nous une vive émotion qui se traduit par le rire.


J’ai résumé en quelques points certaines particularités du film, dans ma conception du film, et pour finaliser cette critique je dis : MERCI et BRAVO au réalisateur pour le film, l’engagement et le courage, mais aussi félicitation pour le pari artistique réussi !


Je donnerai un 10/10 au film, il le mérite amplement, c’est mon coup de cœur du FICA et du mois, que je recommande vraiment aux cinéphiles.

Créée

le 16 déc. 2015

Critique lue 636 fois

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Zakaria Brahami

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