Ce que le jour doit à la nuit

(critique avec SPOILS)
Il est dommage de découvrir un film comme Dark City sur le tard. Un univers, une esthétique qui nous attirent et nous capt(iv)e, de bons concepts de SF… ce film a beaucoup, même tout pour (me) plaire.
Oui mais voilà, depuis on a vu le Metropolis de Fritz Lang, on a vu Blade Runner, on sait ce que ce que chacun doit au premier, on a vu d’autres films utilisant, surutilisant et épuisant les concepts de SF et pour tout dire, la passion s’est malheureusement muée en quelque chose de plus rationnel.
Si je l’avais découvert avant vingt ans je suis presque persuadé que ce film aurait été pour moi quasiment « fondateur », bien plus qu’un StarWars ou un Encounters of the Third Kind…

Le pitch de Dark City n’est pas forcément très original : un homme se réveille amnésique et découvre une femme tuée à ses côtés. Bientôt, des extraterrestres qui semblent maîtriser la ville aux dépends des humains (là c’est plus intéressant, on reconnaît un thème repris par Matrix) vont se lancer à sa poursuite.
Ruelles sombres, éclairages nocturnes, buildings écrasants : on retrouve les codes esthétiques cyberpunk, eux-mêmes hérités de ceux du film noir. Proyas se donne à cœur joie de l’utiliser à plein lors des scènes de reconstruction de la ville pendant le « tuning » : les buildings se font et se défont, se tordent et s’encastrent les uns dans les autres...
On pourrait dire que le film vaut le coup d’œil rien que pour ça et je crois que ce ne serait pas faux.
Il faut dire que tous concepts de SF mis à part, Dark City ne brille (Dark… briller… humour toussa) pas par la complexité du scénario : les enjeux se comprennent assez rapidement et le déroulement est relativement linéaire. Et puis malheureusement, la parenté sur la forme avec Blade Runner dessert paradoxalement plus le film qu’elle ne le sert, car sur le fond il y a clairement un gap entre les deux.
Le thème des vies humaines manipulées s’abandonnant dans un train-train est certes très bon, mais c’est ce que je disais au début : c’est un peu plus difficile à apprécier aujourd’hui.

SPOILERSSSS…
Sinon, Dark City est un film à twist. Là encore c’est bête, je l’ai vu venir celui-là (en partie à cause de SC aussi...). C’est pourtant un twist qui a de la gueule, rien à voir avec du Shyamalan. D’ailleurs je lisais les nouvelles de Richard Matheson récemment, et dans une il y a quasiment le même. Bon cela dit, Proyas aurait aussi pu le trouver indépendamment, je n’en sais rien et ce n’est pas un problème.

Après quelques séquences d’action qui partent un peu en cacahuètes (c'est moi où les Wachowski ont pompé jusqu'à ça?), on appréciera un final sur un ton légèrement doux-amer malgré le renversement des strangers. Un bon point du film.

A part ça, j’ai été agréablement surpris du jeu d’acteur. Sewell-Sutherland-Connelly-Hurt, sur le papier, ça claque moins que Rutger Hauer-Harrison Ford si vous voyez ce que je veux dire, mais finalement ils s’en sortent bien. Car si Jennifer Connelly n’a qu’un rôle d’épouse éplorée (mais qu'elle joue bien), Sutherland est étonnant en psychiatre psychiatré.

Enfin bref, même si je l’ai sans doute vu trop tard, je suis content de l’avoir vu. Je ne lui mets « que » 7 mais pour le coup c’est un 7 réfléchi et pas un « 7 c’était sympa » comme j’en mets 99 fois sur 100.