Alors que Ghost Dog déambulait au rythme vrombissant des beats hip hop de RZA, Will Blake divague dans la forêt aride, marchant dans le tempo de la bande son rocailleuse de Neil Young. Ici, on y suit le périple initiatique d’un homme poursuivi par des chasseurs de primes alors qu’il venait de tuer le fils d’un homme important. Comme souvent chez Jim Jarmusch, la mise en scène est simple, avec cette couleur de noir et blanc, tout en épure, et est d’une classe foudroyante dans la construction de ses plans. Les décors, l’environnement entourant les personnages ont encore une importance primordiale.


Alors que dans Mystery Train, le couple nippon avançait dans les ruelles vides de Memphis, ici, Will Blake parcourt avec son ami indien Personne des contrées désertiques magnifiées par l’esthétique toute en sobriété de Jim Jarmusch. Dans Dead Man, il n’est aucunement question de voir un western partant dans les tous les sens, allant à cent à l’heure. Au lieu de bêtement rendre hommage à un genre particulier, Jim Jarmusch préfère s’approprier les codes du western pour mieux se les emparer. La rugosité des armes, la nervosité des êtres, tout est intériorisé. Le réalisateur préférant laisser place au contemplatif, à l’introspection. Tout est fait dans le film pour embarquer le spectateur vers une ambiance vaporeuse à la fois mélancolique et dangereuse.


Dead Man, western léthargique, horrifie par la sécheresse de ses coups de feu et par cette ribambelle de personnages hantés et malades à l’image de ce cannibale fou prêt à tout pour rattraper Will Blake. Le film use aussi avec drôlerie et finesse, d’une poésie hypnotique et symbolique nous enfonçant dans des divagations mystiques durant les dialogues entre Will Blake et son ami l’indien. Lent, prenant le temps d’avancer à son propre rythme, Dead Man est une œuvre captivante, dû à une intrigue simple mais profonde prenant de plus en plus d’ampleur au fil des minutes et du à un Johnny Depp brillant de charisme dans ce rôle parfait d’antihéros au genre qu’est le Western. Jim Jarmusch fait de son film une ballade funèbre, à la beauté plastique somptueuse, et à la fatalité crépusculaire.

Velvetman
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le 29 janv. 2015

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