Delivery Run, le degré zéro du thriller d'action

Ces dernières années, de par le manque d'inventivité des studios américains, le monde des cinéphiles s'est vu dans l'obligation de se tourner vers des productions exotiques pour redécouvrir ce qui fait le sel du septième art. Corée du Sud, Brésil, Europe de l'Est... Le passionné de cinéma voyage ainsi aujourd'hui à travers le prisme de ces nouveaux réalisateurs venant de lieux dépaysants. Delivery Run, objet de cette critique, aurait pu se nicher dans cette nouvelle logique cinématographique en ce que son réalisateur d'origine finnoise, Joey Palmroos, semblait en capacité de proposer un renouvellement du thriller d'action.

Pourtant, en apparence, tout commençait pour le mieux. La lecture du scénario était simple, sans fioritures. Un chauffeur de livraison de nourriture criblé de dettes et accro aux jeux d'argent est pris en chasse, dans une course poursuite sanguinaire, par un conducteur de chasse-neige aux motivations inconnues, au milieu des paysages glacés du Minnesota. On retrouve ici un classique du cinéma d'action. Duel de Steven Spielberg ou, plus récemment, Enragé de Derrick Borte avaient su, à travers un synopsis semblable, créer des films intéressants à regarder. Delivery Run, de par le choix artistique de son réalisateur d'articuler ses scènes autour de lieux enneigés, pouvait alors réutiliser ses classiques en apportant sa touche personnelle et innovante, propre à son cinéma. Les promesses semblaient on ne peut plus attirantes.

Cependant, au fil des minutes, ces dernières s'érodent à vitesse grand V. Les personnages sont caricaturaux à l'extrême, voire même ridicules en ce qui concerne le "héros" du film. Manquant de charisme et plombé par sa qualité de jeu, l'acteur principal semble particulièrement en souffrance du début à la fin sans parvenir à proposer un semblant de contenu qualitatif. Concernant les autres protagonistes, il n'y a absolument rien à retenir tant les prestations proposées sont dignes d'un spectacle étudiant de fin d'année. Reste alors l'antagoniste du film, le fameux conducteur de chasse-neige qui brille par son absence et par le manque criant de développement de son personnage. Ses motivations n'étant pas du tout développées, on peine à s'intéresser à la dualité créée entre ce dernier et le sois-disant héros du film.

En ce qui concerne la musique et le développement du scénario, il n'y a également, de ce côté là, aucun élément concret à retenir. La bande son semble toute droit sortie d'un navet des années 70-80 et frise à plusieurs moments le ridicule. L'écriture du film souffre des mêmes lacunes, tant et si bien que l'on ne compte plus les scènes illogiques et répétitives, déjà vu des centaines de fois au sein d’œuvres aux propositions similaires.

Reste alors les décors, l'un des seuls points positifs de Delivery Run. Sensé se situer au fin fond du Minnesota mais filmé en pleine Laponie finnoise, les paysages sont merveilleux et forment à eux-seuls le réel protagoniste principal du film. Entre les montagnes enneigées, les routes perdues dans un blizzard épais, les virages dressés au-dessus du vide et les sentiers créés par des mètres de glaces gelées, le spectateur se ravit de voir que le réel thriller s'articule autour de ces paysages hostiles et dangereux. On se prend presque à craindre davantage les conditions de route déplorables vécues par le chauffeur de livraison de nourriture plutôt que le supposé danger créé par l'antagoniste principal et son chasse-neige.

Partant, nonobstant la beauté des décors et l'idée novatrice d'articuler un thriller d'action de course-poursuite autour de lieux effrayants de par leur topographie, Delivery Run demeure un nouveau navet au scénario pauvre et éculé dont le public pourra se passer. Ce film semble alors à l'image de l'année 2025 au cinéma. Des promesses réelles, un rendu indigeste et une sensation finale de perte de temps qui reste dans l'esprit du spectateur. Bref, à fuir !