Que c'est beau la technologie ! Que c'est beau le progrès social ! C'est ça le futur ?
Un extrême en appelle souvent un autre et Demolition Man en montre un exemple certes caricatural mais assez démonstratif.
Tout commence à la fin du 20ème siècle, dans une ville où le chaos règne, avec une séquence d'une intervention musclée de notre Sylvester dans le rôle de John Spartan pour sauver des otages séquestrés par le pire criminel que le flic déterminé ait eu à affronter, le nommé Simon Phoenix interprété par l'acteur cabotin Wesley Snipes. Évidemment, comme il fallait s'y attendre, on a droit à du spectacle violent de destruction et de pyrotechnie avec les dommages collatéraux qui en résultent.
Condamnés pour crime venant de l'un et pour bavure venant de l'autre, les deux proches ennemis passent plusieurs décennies en congélation dans une même cryo-prison, le temps que le générique passe et sont réveillés dans le 21ème siècle dans une société transformée et lavée de toute violence et criminalité.
Le choc est grand pour le policier John Spartan à son réveil. Réveil anticipé à l'initiative de Lénina Huxley (Sandra Bullock), naïve flic passionnée par le siècle qui a précédé, afin d'aller contrer Simon Phoenix qui a été libéré accidentellement de la prison par un vice de procédure dans sa rééducation programmée.
Le choc est grand mais drôle pour le spectateur qui peut se régaler du décalage culturel et temporel du héros déchu dans une mégapole devenue propre, trop propre à son goût. Les répliques percutent, tâchent parfois comme des glaviots gras lancés comme des skuds dans une cristallerie de luxe.
John Spartan est à l'image d'un grizzly mal luné devant se plier dans une société aseptisée où vivent des bisounours, habillés en robes de chambre et conditionnés par le docteur Raymond Cocteau (Nigel Hawthorne), un gouverneur trop bienfaiteur pour être honnête avec son regard qui trahit une ambition. Une ambition plus grande révélée qui fera hérisser la pilosité d'un criminel comme Phoenix qui, lui, avant tout, (re)prend un plaisir jouissif - pour lui autant que pour nous dans les contextes présentés - de saccager tout ce qui lui passe sous les mains, que cela soit des personnes ou des structures. Il éclate et ça l'éclate !
Nous pouvons rire et à la fois nous inquiéter car, de cet éventuel futur annoncé avec la technologie utilisée pour un contrôle omniprésent, omniscient sur les sujets avec des puces bio-électroniques greffées dans la main, ce qui est montré dans le film, nous nous en approchons. À la différence que ce ne sera pas une comédie et que l'on pourrait rire jaune avec "une laisse dans le cul" pour rester un citoyen docile et sans histoire, de peur de finir comme les considérés moins que rien vivants dans les souterrains et hostiles à la politique d'un Cocteau (je me demande souvent pourquoi le choix de ce nom ?).
Mais ce n'est pas pour autant qu'il faut cautionner la violence destructrice. Cependant, que la violence serve de prétexte à imposer une servitude pour l'éradiquer, à une population programmée au détriment des meurs et de la culture effacés par des gestes barrières et des spots publicitaires (ou la chanson sur le gentil géant vert dans la Pizza Hut, enseigne qui domine ici la restauration mondiale) selon la vision d'un mégalomane à l'apparence très inoffensive, ça fait davantage plus froid dans le dos.
Demolition Man se présente comme un comédie d'action visionnaire, de science-fiction qui se rapproche de la réalité de nos jours, un film dont l'anticipation, même si elle est parodique et décontractée, montre un tel avenir qui semble ou risque de devenir de plus en plus plausible dans un aspect politique et sociétal privilégiant une liberté tronquée. Et ça, ce serait moins marrant !