Dans la famille Cuaron, je voudrais le fils.

Un Cùaron aux commandes d'un thriller dans lequel Jeffrey Dean Morgan explosant de charisme poursuit implacablement et méthodiquement des mexicains qui tentent d'entrer aux États-Unis ? Un mélange entre l'intensité et la solitude absolue d'un Gravity et d'un Duel ? Oh oui, on peut dire que j'attendais ce film. Malheureusement, n'est pas Alfonso qui veut.


Tout commençait bien, des plans larges qui valorisent l'immensité du désert, la radio qui met en place la chaleur extrême qui s'y fera sentir au cours des prochains jours, les protagonistes et l'antagoniste sont successivement présentés. Muy bien, la chasse est ouverte.


Souhaitant faire du désert et de ses multiples dangers un personnage à part entière, intention on ne peut plus louable, Jonas Cuaron se plante déjà à ce niveau (diantre !). Un épisode désertique de Pékin Express est plus palpitant à ce niveau (dois-je préciser que c'est bien triste ?). Les serpents à sonnette ne semblent pas bien dangereux, les cactus picotent un peu mais sans plus, et enfin, la chaleur est absolument impalpable.
Marchant à une allure soutenue dans cette étuve et en plein soleil, chassé ou non, n'importe quel être humain devrait transpirer comme un goret, quelques-uns devraient s'évanouir, les vivres devraient manquer, les esprits devraient eux aussi s'échauffer. Mais non.
Quasiment aucune tension entre les mexicains, sauf lorsque le héros sauve une demoiselle des pattes de son nouveau mari qui cherche évidemment à la tripoter à plusieurs reprises sans son consentement. Voila à peu près tout ce que vous saurez des personnages qui ne sont que des coquilles vides.
Jonas tente bien de leur fourrer une backstory histoire de, mais il le fait avec la grâce d'un blob. Pire encore, il la leur fait dire dans des instants émotion/ennui bien lourdingues, que ce soit du côté des bouffeurs de guacamole ou du patriote alcoolique dont le but dans la vie semble se résumer à boire du whisky et tuer du Mexicain.
Quelle est sa motivation ? Aucune en particulier, il tue des mexicains parce qu'il est méchant donc il est raciste donc il vote Trump. Mais ça ne l'amuse même pas de les tuer. Pourquoi est-il si las ? Vous vous doutez bien que vous ne le saurez pas.
Comment s'attacher à des personnages aussi vides ? Vous ne pourrez pas. On ne connait même pas leurs noms, ils sont tout juste caractérisés (et s'ils le sont, il sont caractérisés avec les pieds), leur vie ou leur mort n'importe que peu. Dommage, tout l'enjeu du film reposait là-dessus. Donc on attend la fin (qui est prévisible dès les 10 premières minutes, easy).


Enfin si, je me suis attaché au chasseur quand le mexicain a buté son chien. Et à partir de ce moment je voulais que le mexicain crève. Clairement. Pauvre chien va... Sa mort dure super longtemps en plus. Le chasseur a la décence de tuer les gens en un coup ou deux.


Jonas m'a laissé penser à un moment donné que ses personnages étaient un peu contrastés après une action douteuse du héros. Mais en fait non. Il est tout lisse. Comme une peau de bébé. Le manichéisme n'est pas forcément une mauvaise chose, surtout dans cette chasse à l'homme, mais il aurait pu être brisé lorsqu'à un moment donné, le prédateur devient proie et inversement (moment par ailleurs intéressant mais diablement inexploité).


Je parle du moment où le chasseur et le mexicain se tournent autour pendant mille ans autour du même putain de caillou. Entendons-nous bien, l'idée de cet inversement des rôles était intéressante, mais une fois de plus Jonas en fait n'importe quoi.


Mais j'aurais dû me méfier de ce film. À partir du moment où on te le vend parce qu'il a été fait "par les créateurs de Gravity" et parce que la musique a été composée par Woodkid, tu peux sentir la bonne entourloupe des familles.


Enfin bref, regardez Duel, au moins vous ne perdrez pas votre temps en plus de voir un excellent Spielberg, si ce n'est l'un de ses meilleurs.

CinMathias
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le 14 avr. 2016

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CinéMathias

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