Scellant l'âge d'or de l'homme Delon et ouvrant humblement le soir de la vie de l'homme Gabin ce polar tranché mais modeste dans le même temps permet à José Giovanni d'accoucher d'un superbe et très élégiaque réquisitoire contre la peine de mort. Nous sommes sous la France pompidolienne de 1973 et Deux Hommes dans la Ville marque quelques points d'avance sur son temps : le film s'avère très réussi dans la conduction de son récit, drôlement bien interprété par Michel Bouquet principalement (incarnant pour l'heure un condé sans scrupules désireux de faire tomber un mauvais sujet repenti...) ; on peut également constater la présence de Gérard Depardieu dans l'un de ses tous premiers rôles, pas si éloigné de l'étiquette de voyou qui lui collait alors à la peau dans sa vie privée, moins d'un an avant la sortie du classique Les Valseuses de Bertrand Blier...

Alain Delon, également producteur, parvient à insuffler son charisme sans néanmoins se départir d'une attitude poseuse parfois un tantinet ridicule, peu aidée par la musique tour à tour mémorable mais légèrement sentimentaliste de Philippe Sarde. Gabin joue, est Gabin et donc fidèle à lui-même d'un bout à l'autre du film, évoquant à sa façon les grandes figures hugoliennes du célèbre romancier : sa prestation naturelle et brusque d'éducateur adepte de réinsertion sociale demeure émouvante et sauve considérablement le propos de sa dimension caricaturale, permettant au métrage de témoigner d'une certaine profondeur existentielle.

Sinon Mimsy Farmer - alors au sommet de sa gloire et deux ans avant La Traque de Serge Leroy - joue les femmes éplorées avec délice et efficacité, aux côtés d'un Alain Delon aussi fascinant que déconcertant. La réalisation de José Giovanni demeure tout à fait correcte mais ne dépasse jamais son sujet, ce qui est - dans le cas présent - autant un écueil qu'une qualité dramatique. Allant à l'essentiel malgré son trait artistique un peu trop appuyé Deux Hommes dans la Ville restera un bon petit classique du cinéma français des années 1970. A revoir.

stebbins
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le 19 mars 2024

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